Une "pénurie" et une "raréfaction" des compétences au sein des entreprises économiques algériennes a été relevée mardi à Alger par des experts en ressources humaines. Cette pénurie est notamment due à un déficit en formation, mais aussi à l'exode des compétences et au manque de leur valorisation, ont estimé ces experts qui ont animé une table-ronde au Forum du quotidien El Moudjahid sur le thème "La problématique des ressources humaines dans les entreprises". Le directeur général de l'Institut supérieur de gestion et de planification (ISGP), M. M'hamed Raked, a estime qu'il existait une "pénurie drastique de compétences, en matière d'expertise, particulièrement le profil de formateur". Il a indiqué que son institut "peine" à recruter des experts-formateurs, alors que l'avis de recrutement est publié à cet effet dans la presse depuis trois mois, ajoutant que le "peu" d'experts qui existe sur le marché national ne satisfait pas la demande. Le directeur de l'ISGP, dont l'institut accueille annuellement quelque 2.000 cadres pour formation et mise à niveau, a souligné que pour attirer une compétence, une rémunération motivante est indispensable. En matière de formation, M. Raked a noté que la demande émane des entreprise du secteur public, celle des entreprises privées étant "presque nulle". Le directeur général de l'Ecole supérieure de gestion (ESG), M. Mohamed-Cherif Belkessam, a constaté, lui aussi, que le phénomène de raréfaction des compétences se développe en Algérie et "touche l'ensemble des secteurs et postes d'emploi, allant de l'ouvrier qualifié au cadre dirigeant". "Cette situation a engendré un phénomène subséquent, à savoir le déséquilibre de l'emploi, aggravé par les années difficiles vécues par l'Algérie, qui ont provoqué l'exode des compétences vers l'étranger", a-t-il expliqué. M. Belkessam a identifié, d'autre part, un nouveau phénomène touchant les PME, en l'occurrence le turn-over, précisant que sur 500 salariés, il est enregistré 20 à 30 départs mensuellement motivés par la recherche de conditions de travail meilleures. Il a rappelé, aussi, que l'Algérie a connu une période de "désinvestissement" sur le plan de la formation et des ressources humaines, contrairement aux deux premières décennies ayant suivi l'indépendance au cours desquelles le pays avait investi dans ce créneau. "Aujourd'hui, cette pénurie s'accentue dans la mesure où l'Algérie importe la main-d'£uvre, alors qu'elle en exportait il y a trois décennies", a-t-il encore constaté. M. Belkessam a indiqué, dans ce contexte, que "sans les compétences et les ressources humaines, les nombreux plans de développement lancés ne peuvent pas être totalement concrétisés, malgré la disponibilité des ressources financières et des moyens matériels". Pour remédier à cette situation, il a notamment préconisé une généralisation du e-learning et des visioconférences eu égard, a-t-il dit, à l'étendue du territoire algérien. Le directeur général de l'Institut national de la productivité et du développement industriel (INPED), M. Abderrahmane Moufek, a insisté, pour sa part, sur la compétitivité des entreprises, lesquelles doivent renforcer leur capacité d'innovation à l'heure de l'ouverture du marché mondiale à la concurrence, a-t-il affirmé. Pour M. Moufek, la performance passe par le développement des compétences et des ressources humaines qui doivent être motivées. Il a appelé, ainsi, à revoir le système de rémunération basé sur "l'égalitarisme", déplorant que dans certains cas, "un agent de bureau perçoive un salaire meilleur que celui d'un universitaire". M. Moufek a suggéré que les cadres d'entreprises soient les mieux rémunérées, tout en appelant les organisations syndicales à "évoluer et ne pas limiter leurs revendications aux augmentations de salaires". M. Khaled Kaid, expert consultant en e-learning à l'Université de formation continue (UFC), a indiqué qu'une convention a été signée entre l'UFC et la Fonction publique pour la formation des cadres. Il a évoqué, dans le même ordre d'idées, le "mégaprojet" initié avec le ministère de l'Education nationale pour la formation des enseignants des cycles moyen et primaire dans les nouvelles technologies de la communication.