WASHINGTON - Les Etats-Unis sont en pourparlers avec le gouvernement libyen pour la mise en place d'un programme de rachat des missiles portables (MANPAD) pillés lors du conflit armé, a indiqué vendredi le New York Times citant de hauts responsables américains. "Nous pensons que nous sommes arrivés à un point où nous avons besoin d'une sorte de programme spécial", a fait valoir un officiel américain. Jusqu'à l'heure actuelle, les équipes d'experts américains et libyens sur place ont identifié et sécurisé près de 5.000 Systèmes portatifs de défense aérienne (MANPAD) alors que la Libye disposait d'un stock de 20.000 missiles portatifs avant le début de la révolte, en février dernier. Selon le quotidien new-yorkais, les discussions entre les Etats-Unis et le régime libyen actuel sont dans leur ultime phase pour ce programme mais dont les détails restent encore inconnus. Mais substantiellement, indique-t-il, il s'agirait pour les Etats-Unis de fournir argent et assistance technique au gouvernement libyen pour racheter les missiles, qui se trouvent soit entre les mains des centaines de milices libyennes soit disparues, pour les remettre dans les dépôts ou les détruire carrément. Un officiel américain proche de ce dossier considère que la proposition de mettre de l'argent ou d'octroyer d'autres formes d'aide sur la table, en échange de missiles, pourrait inciter les milices à les restituer. Ces missiles, qui sont vendus à des prix élevés sur le marché noir, constituent une menace limitée pour les avions militaires de combat modernes mais présentent des dangers potentiellement graves pour les aéronefs civils. Selon des responsables américains, le secrétaire d'Etat adjoint américain pour les Affaires politiques et militaires, Andrew Shapiro, qui était récemment en Libye, a fait part au ministre libyen de la Défense du souhait des Etats-Unis d'organiser ce programme de rachat. Les Etats-Unis ont engagé une enveloppe de 40 millions de dollars pour sécuriser les stocks d'armes en Libye, afin d'éviter la prolifération des MANPAD. Cependant, le montant du budget destine à ce programme de rachat d'armes ainsi que le prix à payer pour chaque missile et de ses composantes n'ont pas été encore déterminés, selon les mêmes responsables cités par NYT. Si la Libye donne le feu vert à ce programme, les prix seront probablement établis par les responsables libyens en se basant sur le prix du marché, ajoutent-ils. Selon eux, bien que ce type d'opérations est souvent appelé programme de "rachat", cette appellation "soulève des sensibilités". En effet, expliquent-ils, après avoir fourni des missiles Stinger aux forces afghanes pour lutter contre les Soviétiques dans les années 1980, les Etats-Unis avaient, par la suite, organisé un programme de rachat, en essayant de réduire les risques que les missiles soient utilisés contre le trafic aérien international civil ou des avions militaires occidentaux. En Libye, arguent-ils, "le programme ne serait pas techniquement un rachat du fait que ces armes n'ont pas été fournies par l'Occident mais par des fournisseurs de l'ancien bloc de l'Est". Des responsables américains avertissent que vu le grand nombre de missiles présumés disparus, et la capacité limitée des autorités Libyennes pour contrôler les frontières et les milices, il ne sera pas possible d'inventorier ou de sécuriser tous les missiles. Le but, disent-ils, est de réduire les risques qu'un grand nombre de ces armes aillent sur le marché noir. Il est également rapporté que de nombreux facteurs rendent difficile la réalisation d'un inventaire complet des armes en raison notamment de "la mauvaise tenue des registres de l'armée d'El Gueddafi", ajoutant que les équipes d'enquête n'ont pas trouvé de registres détaillés d'inventaire, ou combien d'armes ont été délivrés dans le cadre de la formation militaire. "Nous n'avons pas trouvé de bases de données, absolument rien", a déclaré Nicholas Spignesi, un officiel du Département d'Etat qui a supervisé ces opérations en Libye en novembre dernier. Pour le NYT, la décision de chercher un accord avec la Libye pour un programme de rachat de missiles "est un aveu que les efforts menés jusqu'ici ont eu leurs limites". S'il venait à être appliqué, ce programme de rachat pourrait conduire les milices à revoir à la hausse les prix des missiles portables par rapport à ceux pratiques actuellement sur le marché noir. Mais selon un responsable américain, cette question constitue "un équilibre délicat entre la nécessite d'appliquer ce programme ou de ne pas le faire".