L'ancien porte-parole de la délégation algérienne à Evian, Redha Malek, a indiqué, dans un entretien accordé à l'APS, que les Accords d'Evian, conclus le 19 mars 1962, avaient mis fin à la colonisation française en Algérie, en consacrant les principes de l'intangibilité de l'intégrité du territoire de l'Algérie, l'unité de son peuple et son indépendance totale. Pour M. Malek qui a souligné que ces Accords avaient été obtenus dans la "difficulté", la délégation du Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA), "n'avait rien cédé sur les principes énoncés dans la Déclaration du 1er Novembre 1954, à savoir l'intangibilité de l'intégrité du territoire national, l'unité du peuple algérien qui a existé bien avant la colonisation en 1832 et surtout l'indépendance totale de l'Algérie". "Ces Accords ont une philosophie particulière", a-t-il poursuivi, expliquant qu'"ils (Accords) n'étaient pas seulement un moyen de mettre un terme à une guerre extrêmement dure de 7 ans et 8 mois, mais aussi, il s'agissait d'une occasion pour montrer d'une façon éclatante que l'Algérie était devenue adulte et qu'elle ouvrait droit à la souveraineté. Pour le porte-parole de la délégation du GPRA à Evian, les velléités de partition du territoire algérien exprimées dans le plan de Guy Mollet, visant particulièrement le Sahara algérien, suite à la découverte du pétrole en 1956, avaient été derrière le prolongement de la guerre en Algérie. C'est ainsi qu'il a considéré que l'action du GPRA "était nette, claire et précise", dans ce sens, a-t-il expliqué que la délégation algérienne affichait une attitude "intransigeante" sur la question de l'intégrité territoriale. Tout au long de ces négociations, a-t-il soutenu, la partie française cherchait à faire admettre au Front de libération national (FLN) qu"'en Algérie, il existait une mosaïque bigarrée de populations, dont faisait partie la minorité d'origine européenne". La partie algérienne n'a pas cédé sur ce point, selon M. Malek, qui a rappelé, à ce sujet, le retrait de la délégation algérienne au cours des négociations de Lugrin et son entêtement à inscrire la question du Sahara algérien au menu du dernier round des négociations. Intransigeance et flexibilité de la délégation algérienne à Evian M. Malek est revenu sur les divergences opposant l'Etat-major de l'Armée de libération nationale au GPRA sur ces négociations, estimant que cette opposition illustrait "la particularité" et "la force" de la Révolution algérienne. Lors d'une session du Conseil national de la Révolution algérienne (CNRA), après le round des négociations des Rousses, le GPRA avait présenté pour la première fois un projet de texte non finalisé des négociations, se rappelle M. Malek qui a affirmé que les membres de l'Etat-major de l'ALN ayant voté contre les négociations s'étaient pliés à la décision de la majorité des membres du CNRA pour la poursuite des négociations. Le long de ces négociations "difficiles", raconte encore l'ancien chef du gouvernement algérien, les principes fondamentaux pour la délégation algérienne n'étaient pas négociables, reconnaissant, néanmoins, qu"'il y avait d'autres questions sur lesquelles la partie algérienne devait être flexible". Parmi ces questions, M. Malek a cité le ''statut des pieds-noirs (minorité d'origine européenne) et le maintien de bases militaires françaises en Algérie''. Il fallait donc, selon ce responsable algérien, donner un maximum de trois ans pour la minorité européenne pour choisir entre la nationalité française et la nationalité algérienne. Pour ce qui est de la base navale de Mers El Kebir, a-t-il ajouté, la France avait demandé une enclave de souveraineté française sur le sol algérien, "une sorte de Gibraltar de la France". "Nous avions refusé", a-t-il rappelé, arguant du fait que le GPRA "était contre des bases militaires étrangères sur le sol algérien". "Un accord sur une présence française de 15 ans a été obtenu pour Mers El kebir", a-t-il dit. L'Irgoun à la rescousse de l'OAS Interrogé sur des révélations faites dans son livre consacré aux Accords d'Evian, sur la participation d'éléments terroristes israéliens de l'Irgoun de Menahem Begin aux côtés de l'organisation de l'Armée secrète (OAS), dans les attentats perpétrés en Algérie à la veille de l'indépendance, M. Malek a insisté sur le fait que ces éléments s'étaient introduits sur le sol algérien pour "contribuer à imposer la solution voulue par l'OAS à la question algérienne". Pour le porte-parole du GPRA à Evian, il est aujourd'hui admis que des éléments de l'Irgoun avaient participé à l'entraînement des terroristes de l'OAS qui avaient semé, a-t-il rappelé, la terreur dans les villes et villages algériens pour remettre en cause les Accords d'Evian. C'était Charles de Gaulle, selon M. Malek, qui avait envoyé un émissaire en Israël pour exiger de Begin d'arrêter d'envoyer ces éléments en Algérie. En 1960, a-t-il encore rappelé, c'était David Ben Gourion qui avait demandé, lors de sa visite à Paris, à de Gaulle de créer un Etat pour la minorité européenne au nord de l'Algérie. Pour l'ancien chef du gouvernement algérien, les actions terroristes de l'OAS avaient précipité le départ des pieds-noirs, au moment où l'attitude israélienne avait, aussi, dissuadé la minorité juive d'épouser les thèses indépendantistes du FLN, malgré, a-t-il précisé, l'"engagement de quelques juifs algériens dans le combat des Algériens pour la liberté".