Pour ne pas faillir à une tradition qui date d'un peu plus de 49 ans (l'ES Sétif a remporté sa première coupe d'Algérie le 12 mai 1963 face à l'ES Mostaganem), le stade ultime de cette compétition continue de susciter une indescriptible passion du côté de Ain Fouara. Aussi bien dans les "cercles" initiés que dans la rue, sur les terrasses des cafés, chez le coiffeur du coin ou même dans les chaumières, la finale de mardi prochain face au CR Belouizdad est au coeur de toutes les discussions. Tous les scénarios possibles et imaginables sont passés en revue. Tous sauf un : une défaite en finale de coupe d'Algérie. Cela, personne ne l'envisage ni ne veut en entendre parler. Vainqueur de ce trophée tant convoité à 7 reprises, pour autant de finales jouées, l'Entente sétifienne entend bien poursuivre sa merveilleuse idylle avec Dame coupe. Cet esprit de "la gagne" qui habite tous les supporters est partagé par le coach, le Suisse Alain Geiger, par l'effectif actuel du club, et aussi par les anciens joueurs qui ont eu le privilège de disputer (et donc à gagner) une coupe d'Algérie. Parmi ces "anciens", comment ne pas évoquer Abdelhamid Salhi qui disputa deux finales et qui assomma pour le compte le NA Hussein-Dey, le 19 mai 1968, au cours d'un match épique, en inscrivant le but de la victoire durant les prolongations de cette rencontre qui s'acheva sur le score de parité de 2 buts partout. Une rencontre que les puristes considèrent, encore aujourd'hui, comme l'une des plus belles finales de Coupe d'Algérie. Plus jeune joueur, ce jour-là, de l'équipe sétifienne, avec Abderrahmane Fellahi, Salhi fut, avec Messaoud Koussim, Laïd Messaoudi et le gardien Driss Gaâgaâ, le principal artisan de ce (déjà) troisième succès en coupe. Abdelhamid Salhi, auteur du but de la victoire, qualifié à l'époque de "but miracle" par la presse, est en train de réussir, aujourd'hui, un autre "miracle", celui d'avoir gardé la ligne, à 65 ans, ainsi que son air poupin et sa démarche un petit peu chaloupée. Sétif et la coupe, une "longue et belle histoire d'amour" Pour l'ancien n° 10 de charme des "Noir et Blanc", entre l'Entente sétifienne et la coupe d'Algérie, c'est "une longue et belle histoire d'amour. Rappelant le légendaire second souffle de son équipe, Abdelhamid confie qu'une fois en finale, lui et ses co-équipiers avaient une idée fixe en tête : ne pas rentrer bredouilles à Sétif. Revenant au second souffle qui appartient à "un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître", dit-il, paraphrasant Charles Aznavour, il n'y avait pas de secret. "Nous nous entraînions très dur sous la houlette du regretté Mokhtar Arribi qui ne badinait jamais avec la discipline", se souvient Salhi qui se rappelle aussi de ces footings auxquels les joueurs se pliaient au pied du mont Meghress qui culmine à 1.700 m d'altitude. "Un régime qui nous permettait d'avoir plus d'endurance que nos adversaires, voilà le secret", explique le lutin sétifien. S'agissant de la 8e finale de l'Entente, Salhi prophétise que ce sera un match "très difficile, entre deux équipes qui ont déjà une grande expérience de cette compétition, ce qui interdit tout pronostic". L'ancien meneur de jeu de l'ESS lâche toutefois que Moumene Djabou représente à lui-seul "50% de l'équipe" et que si le reste des joueurs parvient à remplir les 50% restants, la coupe va de nouveau être remplie de l'eau de Ain Fouara". Abdelhamid conclut en demandant aux supporters de "porter leur équipe" dans les moments difficiles et, surtout, d'avoir "une pensée pour les anciens qui ont marqué l'histoire du club, à l'image de Kermali, Koussim, les frères Mattem, sans oublier ceux qui nous ont quitté, paix à leurs âmes, les Layasse, Arribi, Khemicha, Benkari, Neggache, Griche et autre Safsaf". "La coupe d'Algérie aime Sétif" Abderrahmane Fellahi, toujours alerte malgré une silhouette que 63 ans commencent à voûter, les bras et le visage portant encore les stigmates de son engagement physique devenu célèbre en dépit d'un gabarit moyen, confie que la finale de 1968 face au NAHD reste son "plus merveilleux souvenir". Le public était "juste derrière la ligne de touche, au stade d'El Anasser (20-Août 1955, ndlr), et c'est lui qui nous rendait la balle pour la remise en jeu", se souvient "Rahma" qui ne peut s'empêcher d'avoir une pensée pour l'arbitre du match, le regretté Hadj Kouider Benzellat, dit le "Mozart du football algérien". Lors des 90 minutes de la finale, le coach m'avait chargé de marquer "à la culotte le Nahdiste Saâdi et croyez-moi, il n'avait pas bougé, ce jour-là !", soutient l'ancien défenseur de l'Entente qui tient aujourd'hui une petite boutique d'alimentation générale près de la cité Maâbouda, à l'ouest de Sétif. Pour Fellahi, la finale de l'ESS mardi prochain face au CRB "sera peut-être difficile", mais il est "sûr que l'Entente va l'emporter, car la coupe d'Algérie aime Sétif et adore y venir, que l'équipe joue bien ou pas". Une autre figure du club qui a eu la chance de remporter le trophée en tant que joueur puis en tant qu'entraîneur, en l'occurrence le keeper Bouzid Cheniti, rappelle que l'Entente "n'a jamais failli en finale". Il reconnaît toutefois que cette fois-ci, le match "sera extrêmement difficile étant donné que les Belouizdadis, que l'ESS rencontrera pour la première fois à ce stade de la compétition, ont aussi une histoire avec dame coupe". Cheniti, artisan de la victoire en finale face à l'USM Alger en 1980, reste néanmoins "persuadé" que la coupe "ne peut se détourner de Sétif le jour d'une finale". Une conviction que partagent les milliers de supporters de l'ESS, notamment ceux qui effectueront le déplacement, mardi, vers le temple du 5-Juillet.