L'Afrique possède la population la plus jeune du monde avec près de 200 millions d'habitants âgés de 15 à 24 ans, mais sa forte croissance ne suffit pas à garantir un emploi productif à tous, a indiqué lundi un rapport conjoint entre l'ONU et d'autres organisations régionales. "Si le continent affiche depuis une dizaine d'années une croissance supérieure au taux mondial, cette forte croissance ne suffit pas à garantir un emploi productif à tous", note le rapport élaboré conjointement par le Programme de l'ONU pour le développement (PNUD), la Commission économique de l'ONU pour l'Afrique, la Banque africaine de développement et l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). L'analyse de 53 pays africains montre qu'une création d'emplois insuffisante constitue, de loin, le plus grand obstacle auquel sont confrontés les jeunes Africains qui, pourtant, "sont une opportunité pour la croissance économique future de l'Afrique". "De vastes pans de la population, en particulier les jeunes, peuvent se retrouver laissés-pour-compte et frustrés. En l'absence de processus politique qui leur permette de s'exprimer et d'influer sur l'action publique, c'est l'instabilité qui menace, comme ce fut le cas l'an dernier dans plusieurs pays d'Afrique du Nord", notent ces organisations. "Le moment est venu de réorienter l'agenda des pays africains vers une stratégie de croissance inclusive, créatrice d'emplois et durable, dont l'objectif premier est de répondre aux besoins spécifiques des jeunes", préconisent-ils. "Avec près de 200 millions d'habitants âgés de 15 à 24 ans, l'Afrique possède la population la plus jeune du monde, et celle-ci s'accroît à vive allure", souligne le rapport qui avance que le nombre de jeunes en Afrique aura doublé d'ici 2045. De 2000 à 2008, la population en âge de travailler (15-64 ans) est passée de 443 millions à 550 millions, soit une hausse de 25 %. Sur une année, cela équivaut aussi à une augmentation de 13 millions, soit 2,7 %. Selon les statistiques, si cette tendance se poursuit, la main-d'œuvre du continent sera d'un milliard de personnes en 2040. Ce sera la plus nombreuse au monde, dépassant celle de la Chine et de l'Inde. Il est observé, en outre, que les jeunes sont non seulement de plus en plus nombreux en Afrique, mais leur niveau d'instruction progresse également. "Même si de graves problèmes de qualité demeurent, si l'on arrive à juguler les talents de ce réservoir de capital humain en pleine croissance et à les orienter vers les secteurs productifs de l'économie, cette tendance créera des opportunités uniques pour le développement économique et social", affirme le document. Toutefois, si l'Afrique ne parvient pas à créer des opportunités économiques et d'emploi suffisantes pour offrir des conditions de vie décentes à ce pan de la population, "cette tendance peut aussi induire un risque non négligeable et menacer la cohésion sociale et la stabilité politique", prévient-il. Quelque 60 % des chômeurs africains sont des jeunes et, dans la plupart des pays africains, le taux de chômage des jeunes est deux fois plus élevé que celui des adultes. En conséquence, de nombreux jeunes Africains se retrouvent sans emploi ou, plus fréquemment, en sous-emploi dans le secteur informel, où la productivité et la rémunération sont faibles. Par ailleurs, il est constaté que le coût de l'inadéquation de l'emploi est élevé. La pauvreté en est la conséquence la plus manifeste, selon le rapport qui indique qu'en moyenne, 72 % des jeunes Africains vivent avec moins de 2 dollars par jour. Mais ce n'est pas là le seul coût, soulignent les auteurs du rapport. En effet, expliquent-ils, de longues périodes d'inactivité ou de sous-emploi dans le secteur informel peuvent grever à jamais le potentiel productif et, partant, les opportunités d'emploi. Dans les Etats fragiles, l'absence d'emploi adéquat figure parmi les principaux risques qui menacent la stabilité. "S'ils ne modernisent pas rapidement leur économie, les pays africains risquent de gaspiller l'immense potentiel qu'offre leur population jeune", affirment-ils. Par ailleurs, le rapport relève "l'échec singulier" du monde arabe à mettre sur pied un secteur privé qui soit indépendant, compétitif et intégré aux marchés mondiaux. "Avec la forte croissance démographique de l'Afrique et la compression nécessaire du secteur public dans de nombreux pays, un secteur privé vigoureux constitue la principale source d'emplois pour les jeunes", estime le rapport.