Le Représentant spécial du Secrétaire général de l'ONU pour l'Afrique de l'ouest, M. Said Djinnit, a affirmé mercredi devant le Conseil de sécurité que la situation au Mali illustrait les risques qui menacent la région du Sahel, affirmant que cette crise a des répercussions bien au-delà des frontières de ce pays. M. Djinnit, qui est aussi Chef du Bureau des Nations Unies pour l'Afrique de l'Ouest (UNOWA), était venu présenter devant le Conseil le rapport du Secrétaire général sur l'Afrique de l'ouest, dans lequel il est relevé notamment que l'instabilité au Mali a aggravé davantage la situation dans la région du Sahel alors que les répercussions du conflit en Libye, qui a pris fin, continuent d'ébranler la région avec le retour de plus de 212.331 ressortissants ouest-africains dans leur pays d'origine. Le Représentant spécial a déploré qu'en dépit des efforts louables de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), les arrangements transitoires, y compris l'adoption d'une feuille de route en vue de la tenue d'élections et de la restauration de l'intégrité territoriale du Mali, n'aient pas encore été consolidés. Cette situation, a-t-il noté, a conduit les dirigeants de la CEDEAO à accélérer le déploiement de la Force en attente de la CEDEAO au Mali, et ce, sans avoir recueilli au préalable l'accord des autorités maliennes. Soulignant les risques pesant sur la région du Sahel, le Chef de l'UNOWA a informé les membres du Conseil qu'une équipe inter-institutions des Nations Unies basée à Dakar (Sénégal) finalisait le développement d'un plan d'action afin de renforcer les capacités des pays du Sahel aux niveaux local, national et régional. Par ailleurs, le rapport présenté par M. Djinnit note qu'au Mali, les groupes criminels et terroristes, dont Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI), "ont noué des alliances de circonstance avec les rebelles et les intégristes islamiques pour prendre, par la force, le contrôle d'une grande partie du nord du pays". Cette région, de plus en plus utilisée comme refuge par les organisations criminelles et terroristes, "pourrait servir de point de départ à ces dernières pour étendre leurs opérations dans la sous-région et au-delà", a-t-il prévenu. En outre, les pays du Sahel craignent que la prolifération des armes provenant de l'arsenal libyen n'ait permis à ces organisations de renforcer leurs capacités opérationnelles, indique le rapport. M. Djinnit a ensuite détaillé les autres défis auxquels fait face l'Afrique de l'Ouest tels que le développement de la piraterie dans le golfe de Guinée et la résurgence de la violence à la frontière entre le Libéria et la Côte d'Ivoire. Le Directeur exécutif de l'Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (UNODC), M. Yury Fedotov, qui participait à la réunion du Conseil, a affirmé, pour sa part, que les drogues illicites et la criminalité transnationale organisée sapaient la stabilité de l'Afrique de l'Ouest et affectaient la santé des populations, la démocratie et le développement économique. En 2011, a-t-il rappelé, environ 30 tonnes de cocaïne avaient fait l'objet d'un trafic en Afrique de l'Ouest. Les profits générés par le trafic de cocaïne dans la région, et dont bénéficient les réseaux criminels, sont estimés à quelque 900 millions de dollars par an, a-t-il précisé. M. Fedotov a souligné que l'Afrique de l'Ouest n'était plus simplement une route de transit pour la cocaïne de l'Amérique latine vers l'Europe, mais était devenue une destination finale, en faisant remarquer que l'Afrique de l'Ouest et l'Afrique centrale comptaient jusqu'à 2,3 millions de consommateurs de cocaïne, une majorité d'entre eux se trouvant en Afrique de l'Ouest. M. Fedotov a aussi indiqué que l'UNODC suit de près le terrorisme dans la région, lequel, a-t-il dit, "a la capacité de déstabiliser des pays comme le Mali".