Les dossiers des victimes algériennes des essais nucléaires français dans le Sahara relatifs à la reconnaissance du statut de victime et des indemnisations qui en découlent, ont été rejetés par la commission ad-hoc mise sur pied à la faveur de la loi Morin, a-t-on appris jeudi auprès du président de l'Association des vétérans des essais nucléaires, Jean-Luc Sans. "En ce qui concerne l'Algérie, 32 dossiers de civils ont été déposés, tous rejetés au motif que les pathologies déclarées ne rentrent pas dans le cadre de la Loi Morin de 2010", a indiqué M. Sans à l'APS, au lendemain d'une rencontre de son association et de celle de Moruroa et tatou (Polynésie) avec le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian, sur ce sujet. Lors de cette troisième réunion de la commission consultative de suivi de la loi Morin, le comité d'indemnisation composé, selon le ministre, de "grands experts", statuant "en toute indépendance", a été doublé de Jean-Paul Bodin, ancien directeur adjoint de cabinet de M. Morin et principal promoteur de la loi controversée du 5 janvier 2010. Les deux associations ayant pris part à cette réunion se sont dites, dans un communiqué commun, qu'elles étaient "médusées" d'entendre la présidente du Comité d'indemnisation leur annoncer que sur les 782 dossiers reçus, 400 avaient été examinés. A l'issue du travail de ce Comité, il a été donc conclu au rejet de 391 dossiers et à l'indemnisation de 9 victimes, ont déploré les deux associations. Pour le ministre français de la Défense, ces résultats qu'il a qualifiés de "décevants" n'ont qu'une seule cause : le trop faible nombre de dossiers déposés, prenant pour responsables de cet échec les associations qui, selon lui, n'ont pas incité leurs membres à "profiter" des dispositions de la loi Morin. Au lieu de trancher, avec courage politique, l'injustice faite aux victimes des essais nucléaires, M. Le Drian, comme ses prédécesseurs, a préféré s'en remettre à la décision de "scientifiques" acquis à la thèse des effets ‘'négligeables'' des radiations", ont encore déploré les associations des victimes. L'Observatoire des armements, un mouvement antimilitariste français, avait réclamé, en février dernier, justice et vérité pour "toutes" les victimes des essais nucléaires français dans le Sahara algérien et le Pacifique, s'interrogeant sur la persistance du discours officiel vantant leur quasi-innocuité. Il critique le décret d'application de la loi qui, selon lui, réintroduit notamment le discours sur l'innocuité des essais nucléaires français, autre version des "essais propres". Le 13 février 1960, la France faisait exploser sa première bombe atomique, "Gerboise bleue", dans le ciel de Reggane, en plein Sahara algérien, un désastre écologique et humain qui, 52 ans après, continue de provoquer des maladies dont des cancers radio-induits. A ce jour, aucune des victimes civiles de ces essais, suivis par d'autres jusqu'à 1966, n'a été reconnue comme telle.