L'Observatoire des armements, un mouvement antimilitariste français a réclamé hier justice et vérité pour «toutes» les victimes des essais nucléaires français dans le Sahara algérien et le Pacifique, s'interrogeant sur la persistance du discours officiel vantant leur quasi-innocuité. Dans sa dernière lettre parue en février, dans sa revue Damoclès, il affirme pour que vérité et justice soient obtenues pour l'ensemble des victimes de ces essais, il est «légitime et indispensable de s'interroger sur les raisons de la persistance de ce discours officiel français vantant leur quasi-innocuité». «S'agit-il encore de couvrir quelques anciens dirigeants, politiques, civils ou militaires, qui portent la responsabilité d'avoir exposé sciemment aux risques de contamination radioactive leurs personnels et les populations vivant dans l'environnement des zones d'essais au Sahara et en Polynésie», s'interroge l'éditorialiste de Damoclès qui se demande aussi si le propos n'est pas de «défendre des institutions», CEA, service de protection radiologique des armées, service historique de la défense qui gardent encore aujourd'hui la maîtrise de l'information et des archives des essais nucléaires». Commentant la loi Morin adoptée en 2010 et prévoyant, pour la première fois l'indemnisation des victimes de ces essais, il relève que cette loi est «tellement bien verrouillée depuis plus d'un an après son entrée en vigueur, seules deux personnes ont pu bénéficier d'une indemnisation», regrettant que les questions environnementales ne soient pas prises en compte par le texte. «Cette loi a minima a permis aux experts de la défense d'employer de nouvelles nuances de vocabulaire : désormais, la France reconnaît officiellement que ses essais n'étaient pas «propres», elle dit seulement que leurs effets sont «négligeables», signale l'Observatoire des armements pour qui cette nouvelle version sémantique des «essais propres» est «d'autant plus inquiétante qu'elle est inscrite dans le mécanisme d'indemnisation mis en place par le décret d'application de la loi Morin». Ce décret réintroduit notamment le discours sur l'innocuité des essais nucléaires français , autre version des «essais propres et l'applique à l'objet même de la loi portant sur l'indemnisation des victimes. Ainsi, l'article 7 stipule que le principe de la présomption de lien entre les essais nucléaires et l'un ou l'autre des dix-huit cas de cancers retenus par le décret ne pourra être écarté «que si le risque attribuable aux essais nucléaires peut être considéré comme négligeable». Le 13 février 1960, la France faisait exploser sa première bombe atomique, Gerboise bleue, dans le ciel de Reggane, en plein Sahara algérien, un désastre écologique et humain qui, 52 ans après, continue de provoquer des maladies dont des cancers radio-induits. Par ailleurs, l'historien Gilles Manceron a indiqué que la loi Morin «même lacunaire, notamment dans son application, reconnaît pour la première fois la «non-innocuité» des essais nucléaires français tant dans le Sahara algérien qu'en Polynésie».