Le 13 février 1960, la France faisait exploser sa première bombe atomique, Gerboise bleue, à Reggane. Paris. De notre correspondante Pour que vérité et justice soient rendues à toutes les victimes des essais nucléaires, il est légitime et indispensable de s'interroger sur les raisons de la persistance de ce discours officiel français vantant leur quasi-innocuité. S'agit-il encore de couvrir quelques anciens dirigeants, politiques, civils ou militaires, qui portent la responsabilité d'avoir exposé sciemment aux risques de contamination radioactive leur personnel et les populations vivant dans l'environnement des zones d'essais au Sahara et en Polynésie ? S'agit-il de défendre des institutions – CEA, service de protection radiologique des armées, service historique de la défense… – qui, encore aujourd'hui, gardent la maîtrise de l'information et des archives des essais nucléaires ? La «raison d'Etat qui a présidé au développement de l'arsenal nucléaire français justifie-t-elle qu'on nie des évidences admises et connues depuis des décennies et qu'on traite avec mépris les victimes des essais nucléaires ?», s'interroge l'équipe de Damoclès, la lettre de l'Observatoire des armements (CDPRC), dans son dernier numéro. Signalons que l'Observatoire des armements a été créé en 1984 à Lyon, par Bruno Barrillot, Patrice Bouveret et Jean-Luc Thierry sous le nom de Centre de documentation et de recherche sur la paix et les conflits, l'Observatoire des armements (CDRPC). Le 17 janvier 2002, deux députés – Marie-Hélène Aubert et Michèle Rivasi – déposaient une première proposition de loi. Il aura fallu six ans – et 17 autres propositions –, pour que le gouvernement français accepte qu'une loi soit adoptée : la loi Morin. Plus d'un an après l'entrée en vigueur de cette loi, seules deux personnes ont pu bénéficier d'une indemnisation ! Sans compter que les questions environnementales ne sont pas prises en compte par la loi Morin. Dans un communiqué transmis à notre rédaction, l'Observatoire des armements se joint à Moruroa e tatou, aux associations et aux victimes algériennes des essais nucléaires français pour «partager leur tristesse et leur revendication commune pour la vérité et la justice sur ces expériences qui ont porté de si graves atteintes tant à leur santé qu'à leur environnement». L'association Moruroa e tatou rappelle : «Il y a deux ans, des membres de Moruroa e tatou ont pu échanger avec les représentants de l'association 13 Février 1960 de Reggane à l'occasion de déplacements à Alger et ils ont visité les anciens sites d'essais français au Sahara. L'inquiétude est grande pour les conséquences sanitaires des 4 bombes aériennes qui ont explosé en 1960 et 1961 à quelque 40 km de leur petite oasis : les habitants n'avaient ni abris ni blockhaus pour se protéger, pas plus d'ailleurs, que les soldats français de la base de soutien aux essais nucléaires. Ils n'avaient que leurs bras pour protéger leurs yeux et que leurs seuls vêtements en guise de tenue de protection contre les radiations.» Dans ce même numéro de Damoclès, à noter l'article de Bruno Barrillot (cofondateur de l'Observatoire des armements /CDPRC), «Essais nucléaires au Sahara : des cobayes humains ?» que nous reproduisons dans son intégralité.