Le chef du gouvernement marocain Abdelilah Benkirane a préconisé mercredi une réforme du régime des retraites, notamment la nécessité d'une prolongation de l'âge de mise à la retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse marocaine des retraites (CMR) pour garantir leurs pensions au-delà de 2021. La CMR, déficitaire depuis fin 2012, serait dans l'incapacité de payer les pensions de ses retraités à partir de 2021 si aucune mesure n'est prise a souligné M. Benkirane devant la chambre des conseillers (2è chambre du parlement) dans le cadre d'une séance plénière consacrée au "régime des retraites, entre pérennité des régimes et limitations de la couverture". Il a précisé que les dépenses de la CMR dépasseront ses revenus à partir de 2014, et que le financement du déficit s'effectuera à travers les réserves de la caisse, qui s'épuiseront à l'aube de 2021, ce qui l'oblige à recourir aux dividendes financiers. Selon lui si aucune mesure n'est prise, entre temps, le déficit atteindra 1,28 milliard de dirhams en 2014, avant de passer successivement à 24,85 milliards de dirhams en 2021, près de 45,66 milliards de dirhams en 2030 et 78,54 milliards de dirhams en 2061. M. Benkirane a expliqué cette détérioration des moyens financiers de la caisse particulièrement par le facteur démographique. Le nombre d'adhérents de la CMR, a-t-il dit, a enregistré entre 1986 et 2011 un taux de croissance quatre fois plus important que le taux de croissance de la tranche des cotisants de la population active. Le rapport entre cotisants et bénéficiaires est passé de 12 contre 1 en 1983 à 6 contre 1 en 1997, puis à 3 contre 1 en 2011 avant d'affirmer que cette tendance se poursuivra à une cadence plus rapide et passera à 1 cotisant contre 1 retraité en 2032, a-t-il fait savoir. Par ailleurs, il fait remarquer que les périodes de cotisation étaient devenues plus courtes à cause d'une tendance à l'embauche tardive où l'âge d'emploi est passé de 24 ans en 1980 à 27 ans actuellement parallèlement à une hausse progressive de la longévité à la retraite, qui est passée de 17,8 ans en 1980 à 21 ans aujourd'hui. Cette longévité implique une charge financière supplémentaire à supporter par le régime des retraites qui paie des pensions pendant des périodes plus longues, d'où la nécessité de prolonger l'âge de mise à la retraite, a-t-il souligné. Il a également relevé que les dysfonctionnements dans la gestion administrative et financière de la caisse et dans des réformes partielles du régime des retraites civiles sont les autres causes de ce déficit financier. Le nombre des adhérents à la CMR frôle les 900.000 fonctionnaires avec un volume global de cotisations estimé à 20,29 milliards de dirhams en 2011 alors que le nombre des bénéficiaires compte 262 mille retraités, avec un volume de pensions payés de l'ordre de 16,5 milliards de dirhams contre des réserves financières de 74 milliards de dirhams en 2011. Le Haut-commissariat marocain au plan (HCP) avait indiqué en août dernier dans une étude que le système de retraite marocain dégagerait un déficit de 7,4 % du Produit intérieur brut (PIB) en 2050. Selon cette étude conduite en partenariat avec le Centre d'études prospectives et d'information international (CEPII, France) la situation financière des systèmes de retraite sera affectée suite à la transition démographique avancée au Maroc et du changement profond qu'il produit dans la pyramide des âges, conjuguée à d'autres facteurs. Le nombre des personnes âgées de 60 ans et plus passerait de 2,7 millions en 2010 à 10,1 millions en 2050. Cette tranche d'âge représenterait, selon l'étude 24,5 % de la population totale alors qu'elle ne représentait que 7,2 % et 8,1 % respectivement en 1960 et 2004 ajoutant que le rapport de dépendance entre les personnes actives et les personnes âgées de 60 ans et plus (bénéficiaires) se situerait à 2,4 individus en 2050 contre 7,7 en 2010.