La dépouille de l'opposant tunisien Chokri Belaïd, assassiné mercredi, a été inhumée vendredi, au milieu d'un dispositif sécuritaire renforcé, alors que les mouvements de protestation appelant à la démission du gouvernement provisoire dirigée par le parti islamiste Ennahda se poursuivaient. Les obsèques se sont déroulées en présence de personnalités officielles, de représentants de plusieurs partis politiques et de milliers de Tunisiens, venus de différentes wilayas. Après les funérailles quadrillées par les forces de l'armée tunisienne et des hélicoptères, plusieurs manifestants ont scandé des slogans condamnant l'assassinat de l'opposant tunisien et appelant à la démission du gouvernement provisoire dirigée par Ennahda. En parallèle, d'autres manifestations ont eu lieu au centre-ville de Tunis appelant à l'arrestation des auteurs de cet assassinat et à leur traduction en justice, outre la "dissolution des ligues de protection de la révolution" que les manifestants ont qualifié de "milices" proches du parti au pouvoir. Suite aux différents mouvements de protestation, les forces de sécurité ont eu recours aux bombes lacrymogènes pour disperser les manifestants. Des obsèques "symboliques" ont été organisées dans les différentes wilayas tunisiennes, marquées par de grandes marches auxquelles ont pris part des représentants de partis politiques et de différentes composantes de la société civile. Une grève générale a été observée ce vendredi à travers tout le pays et un deuil national a été décrété suite à l'assassinat de l'opposant tunisien Chokri Belaid. Cette grève a touché toutes les institutions publiques et privées, ce qui a provoqué une paralysie générale des transports terrestre, aérien et ferroviaire, outre la fermeture de tous les établissements publics notamment éducatifs, à l'exception des hôpitaux et des pharmacies. Tandis que les medias se sont contentées de diffuser des flashs d'information, pour assurer le service minimum. L'opposant politique assassiné, Chokri Belaid, chef du parti des Patriotes démocrates unifié, était connu pour sa forte opposition au gouvernement dirigé par le parti Ennahda et considérait que les partis islamistes constituaient "un réel danger" pour la Tunisie. Cet assassinat est le premier du genre en Tunisie depuis la chute du régime du président Ben Ali le 14 janvier 2011. Il intervient au moment le pays vit une situation politique difficile pouvant s'empirer en raison des divergences entre la coalition au pouvoir et l'opposition, selon plusieurs observateurs. Pour le président tunisien Moncef Marzouki, "cet odieux assassinat d'un leader politique" est "un complot" ourdi contre la Tunisie pour la déstabiliser et semer la discorde dans les rangs des Tunisiens. Le Premier ministre tunisien Hamadi Jebali, secrétaire général du mouvement Ennahda a dénoncé "un acte criminel" à l'encontre de tout le peuple tunisien et contre les principes de la révolution et les valeurs de tolérance. Il constitue "un grave précèdent qui exige davantage de vigilance" en vue de faire échouer les complots visant à "plonger" les Tunisiens dans la violence et "inscrire" les liquidations physiques sur "le dictionnaire de l'action politique", a-t-il dit, appelant à "ne pas se précipiter à accuser des parties gouvernementales ou autres". De son côté, le mouvement Nidaa Tounés a condamné l'assassinat estimant que l'opération visait à entraver le processus de transition, en proie à des glissements depuis la création de milices des ligues de protection de la révolution, proches du mouvement Ennahda. Nidaa Tounés, dirigé par Beji Essebsi a par ailleurs souligné que l'assassinat représentait "une menace" pour les personnalités politiques et les partis politiques, ce qui laisse augurer "que d'autres personnalités sont menacées de liquidation physique". Pour sa part, le porte-parole du parti El Massar Samir Bettaieb a imputé cet acte au mouvement Ennahda qui a toujours, a-t-il dit, "soutenu les extrémistes" appelant le mouvement à "barrer la route devant la menace" que représentent certains extrémistes".