Des Eurodéputés ont fustigé mardi depuis Strasbourg, siège du Parlement européen, le Maroc pour les avoir "injustement" expulsés la semaine dernière alors qu'ils s'apprêtaient à aller dans les territoires occupés du Sahara occidental pour s'y enquérir de la situation des droits de l'homme. Lors d'une conférence de presse de l'intergroupe parlementaire pour la Sahara occidental, Ivo Vajgl, du groupe libéral, a qualifié cette expulsion d'"inacceptable" et d'"inhumaine". Tout en regrettant d'avoir été traités comme des "criminels" avec trois de ses collègues en se faisant expulsés de Casablanca, l'ancien ministre slovène des Affaires étrangères a affirmé que durant 30 ans de carrière politique, il n'a jamais été traité de la sorte. "Le Maroc essaye de vendre un image de démocratie qui n'est pas la sienne. Tous les rapports comme celui du Centre de Robert Kennedy et du rapporteur spécial sur la torture, Juan Mendes, témoignent de la détérioration de la situation critique des droits de l'homme des populations sahraouis dans les territoires occupés", a-t-il dit. Sa collègue du groupe des Verts, Isabelle Loevin, s'est dite "choquée, voire humiliée, ainsi que le sont ses électeurs" suite à cette expulsion, alors qu'elle voulait mener son travail de "façon professionnelle". Elle s'en est vigoureusement prise à la lettre de l'ambassadeur marocain au Parlement européen pour justifier cet acte, la qualifiant de "concentré d'accusations ridicules". "C'est malheureux que le Maroc invite les parlementaires acquis à sa cause, qui, eux, ne se soucient pas de rencontrer la Minurso ou les ONG sahraouies ou les victimes de la répression marocaine", a-t-elle regretté, signalant que l'accord de pêche, en cours de renégociation entre Rabat et l'UE, fait référence aux droits de l'homme que le Maroc est en train de "fouler au pied". L'eurodéputé socialiste Pino Arlacchi, a affirmé, de son côté, qu'il est désormais "inconcevable" de considérer le Maroc comme un interlocuteur fiable, puisqu'il "prétend opérer des réformes démocratiques, mais se comporte comme une dictature médiévale". Antonio Massip, observateur au dernier procès de Gdeim Izik, a estimé que la dernière lettre de l'ambassadeur marocain est une "insulte". "Nous n'avons pas eu le respect qui nous était dû et nous avons été expulsés manu militari", a-t-il fulminé, rappelant que ses collègues et lui continuent à porter deux exigences : que la présidence du Parlement européen se prononce sur cette expulsion et qu'il y ait un engagement "clair" pour l'envoi d'une délégation officielle du PE aux territoires occupés du Sahara occidental. Pour Marco Scouria, du groupe populaire européen, il est "inconcevable de déclarer des parlementaires européens persona non grata par un pays sensé entretenir avec l'UE d'étroites relations". Le même eurodéputé avait interpellé en séance plénière lundi le président du PE, Martin Schulz, sur l'expulsion "inadmissible" et "scandaleuse" de parlementaires européens depuis Casablanca. Interrogé à la fin de cette conférence de presse, Mohamed Sidati, ministre délégué sahraoui pour l'Europe, a estimé que "c'est une erreur de casting de Rabat que d'empêcher des eurodéputés d'accéder au territoire du Sahara occidental illégalement occupé par le Maroc". "Celui-ci s'obstine à maintenir un huis clos sur les populations vivant sous son joug, mais la vérité finira par se faire connaître et cet acte aura des conséquences fâcheuses sur les relations supposées étroites entre le Maroc et l'UE", a-t-il affirmé. Une délégation composée de quatre députés du Parlement européen et de cinq assistants parlementaires, devant se rendre à El Ayoun (capitale sahraouie occupée) avait été expulsée le 6 mars dernier dès son arrivée à l'aéroport de Casablanca au Maroc. Représentant différents groupes parlementaires du Parlement européen, elle devait se rendre à El Ayoun pour s'informer auprès de défenseurs sahraouis des droits de l'homme et des responsables de la Mission des Nations unies pour l'organisation du référendum au Sahara Occidental (Minurso) sur la situation des droits de l'homme dans les territoires sahraouis occupés.