Les Frères musulmans et l'opposition qui a soutenu la destitution du président Mohamed Morsi ont rejeté mercredi la "déclaration constitutionnelle" décrétée par le président intérimaire Adly Mansour, tandis que l'armée a mis en garde contre toute perturbation dans le "délicat et complexe" processus de transition. Les Frères musulmans dont est issu Morsi, ont rejeté par la voix d'un de leurs hauts responsables, Essam al-Erian, la "déclaration constitutionnelle faite par un homme nommé par des putchistes", jugeant qu'"elle ramène le pays à la case départ". Ils ont également refusé mercredi l'offre d'entrer au nouveau gouvernement que compte former le Premier ministre Hazem Beblawi, affirmant ne pas "pactiser avec des putschistes". Dans la nuit, un porte-parole de la présidence, Ahmed al-Muslimani, avait indiqué que Beblawi, désigné mardi soir, allait offrir "quelques postes" au sein du cabinet de transition au Parti de la Liberté et de la Justice, le bras politique des Frères musulmans. "Nous ne pactisons pas avec des putschistes. Nous rejetons tout ce qui émane de ce coup" militaire, a déclaré un porte-parole des Frères, Tareq al-Morsi. La principale coalition de l'opposition égyptienne, qui a ouvertement soutenu la destitution du président Morsi, a dénoncé mardi la déclaration constitutionnelle investissant le président intérimaire de pouvoirs etendus et esquissant une feuille de route en vue de nouvelles élections. La coalition, qui était dirigée par Mohamed ElBaradei jusqu'à sa nomination comme vice-président dans le nouveau gouvernement, s'est plainte d'un manque de consultation avant l'adoption du décret. "Le Front de salut national (FSN) annonce son rejet de la déclaration constitutionnelle (...) Nous exigeons qu'elle soit amendée et nous proposerons nos propres amendements au président", a annoncé la coalition. Auparavant, le mouvement Tamarod, qui avait organisé les manifestations de masse anti-Morsi, a lui aussi regretté de ne pas avoir été consulté pour l'élaboration du plan de transition. Le porte-parole de Tamarod, Mahmud Badr, a dit que le mouvement proposerait lui aussi des changements pour cette déclaration, notamment en ce qui concerne les pouvoirs accordés au nouveau président pendant la période de transition qui doit durer au moins six mois avant la tenue d'une élection présidentielle. Le président par intérim, Adly Mansour, a décrété dans la nuit de lundi à mardi que l'organisation des élections législatives serait lancée avant la fin de l'année. La déclaration constitutionnelle prévoit le lancement de l'organisation des législatives avant fin 2013 et sa fin avant début février 2014. Une présidentielle sera ensuite annoncée. Avant cela, une nouvelle Constitution sera soumise à référendum. — Inititaives pour faire baisser la tension Ces déclarations interviennent au lendemain d'une mise en garde de l'armée mardi contre toute perturbation dans le "délicat et complexe" processus de transition en Egypte. Face à ce climat de tension, plusieurs partis politiques et figures religieuses se sont empressés mardi de présenter des initiatives en vue de réaliser la "réconciliation nationale" dans le pays. Al Azhar a approuvé, dans un communiqué, l'initiative du parti salafiste al Nour portant sur la création d'un "comité de sages" pour enquêter sur le différend entre partisans et opposants de Mohamed Morsi, ainsi que l'ensemble des mesures prises après la destitution de ce dernier, dans le but d'aboutir à une formule consensuelle de sortie de crise. L'initiative d'al Nour repose sur la réalisation d'"une véritable réconciliation nationale" entre toutes les forces et institutions sans exclusive et la mise au point d'un nouveau plan qui devrait être accepté par les forces politiques et les forces armées sous l'égide d'une "commission de réconciliation". La diplomatie égyptienne a assuré mercredi par voix de son porte-parole, Badr Abdelatty, que le président déchu Mohamed Morsi se trouve "en lieu sûr" et il ne fait "pour l'heure l'objet d'aucune poursuite" judiciaire. — Aide financière de l'Arabie Saoudite et des Emirats arabes unis Par ailleurs, l'Arabie Saoudite et les Emirats arabes unis (EAU), qui ont accueilli favorablement la mise à l'écart du président démocratiquement élu Mohamed Morsi, ont apporté une aide financière, à hauteur respectivement de cinq et trois milliards de dollars au profit de la nouvelle administration égyptienne. Le roi Abdallah ben Abdelaziz d'Arabie Saoudite a décidé mardi d'accorder une aide de cinq milliards de dollars américains à l'Egypte, comprenant deux milliards de produits pétroliers et gaziers, un dépôt, sans intérêt, de deux milliards d'euros à la Banque centrale d'Egypte et un don d'un milliard d'euros. Les Emirats arabes unis ont annoncé pour leur part une assistance de trois milliards de dollars aux nouvelles autorités égyptiennes. Cette assistance prendra la forme d'un don d'un milliard de dollars et d'un dépôt, sans intérêt, de deux milliards de dollars à la Banque centrale égyptienne.