Des dizaines de personnes ont été tuées mercredi dans les violences survenues après l'intervention de la police pour disperser des partisans du président déchu Mohamad Morsi au Caire, suscitant des craintes pour l'avenir du pays, où l'état d'urgence a été décrété pour un mois. La police, soutenue par l'armée, a donné l'assaut en début de matinée sur Rabaa al-Adawiya et Nahda, les deux places que les partisans du président déchu Mohamed Morsi occupaient depuis plus d'un mois avec femmes et enfants. Des centaines de partisans avaient commencé à quitter la place Rabaa al-Adawiya et les forces de l'ordre ont laissé passer ceux qui le désiraient, selon un haut responsable de la sécurité. Certaines personnes demeuraient retranchées derrière les barricades et des affrontements avec les forces de l'ordre se poursuivaient toujours à une autre entrée de la place Rabaa al-Adawiya. Selon le ministère de la Santé, 149 personnes ont été tuées à travers le pays après l'intervention de la police et de l'armée pour disperser les pro-Morsi. Des correspondants de médias étrangers sur place ont dénombré 124 manifestants à Rabaa al-Adawiya. Les Frères musulmans, la confrérie dont est issu de M. Morsi, parlent quant à eux de plus de 2.200 morts et de 10.000 blessés. Etat d'urgence et couvre-feux Suite à ces violences, la présidence égyptienne a décrété l'état d'urgence pour un mois à travers le pays. Le gouvernement égyptien a aussi instauré des couvre-feux au Caire et dans 11 autres provinces du pays. Ces couvre-feux "seront imposés de 19H00 (17H00 GMT) à 06H00 (04H00 GMT) jusqu'à nouvel ordre", a indiqué un porte-parole du gouvernement. Ces mesures s'appliquent pour un mois au Caire et aux provinces de Guizeh, d'Alexandrie, de Beni Sueif, de Minya, d'Assiout, de Sohag, de Beheira, du Nord et du Sud-Sinaï, Suez et Ismailia. Le gouvernement a mis en garde que toute personne qui ne respecterait pas cette mesure s'exposerait à une peine de prison. Alors que le pays comptait ses morts, le vice-président Mohamed ElBaradei a annoncé avoir présenté sa démission au président par intérim, Adly Mansour. L'ancien directeur de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) et prix Nobel de la Paix, a expliqué qu'il lui était "devenu difficile de continuer à assumer la responsabilité de décisions" avec lesquelles il n'est "pas d'accord". La communauté internationale a condamné la dispersion par la force des partisans Mohamed Morsi, et exprimé son inquiétude devant la tournure dramatique prise par les évènements en Egypte. Des observateurs ont mis en garde contre une dégradation de la situation en Egypte suite à l'intervention violente des forces de sécurité pour évacuer les lieux occupés depuis plusieurs semaines par le camp de Mohamed Morsi, qui a vu mardi sa détention prolongée de 15 jours. Cherif Driss enseignant à l'Institut des Sciences politiques de l'université d'Alger, a indiqué que l'assaut donné par la police égyptienne pourrait mener à l'"escalade" et plonger le pays dans l'"incertitude". Pour ce politologue joint par l'APS, les Frères musulmans ont jusque-là manifesté pacifiquement pour obtenir le retour du président démocratiquement élu. Mais l'opération de la police soutenue par l'armée "ouvre une nouvelle page" et "peut amener les Frères musulmans à radicaliser leurs revendications". Cette radicalisation, pourrait se traduire par la violence sur le terrain, a encore estimé M. Driss. "Une réaction violente de la part des Frères musulmans est redoutable. Tous les scénarios sont envisageables", a-t-il prévenu.