La wilaya d'El Tarf compte neuf zones humides classées Ramsar d'une richesse faunistique et floristique exceptionnelle, sur un total de 50 sites à l'échelle nationale. L'importance de la sensibilisation à la protection de cet écosystème lacustre unique, partie intégrante de la réserve de la biosphère depuis 1990, revient chaque année tel un leitmotiv à l'occasion de la célébration de la Journée mondiale des zones humides. Le responsable des zones humides au parc national d'El Kala (PNEK), Faouzi Haou, signale "l'urgence de la mobilisation de tout un chacun pour garantir un développement durable de cette biodiversité". Selon ce responsable, l'enjeu est de "s'intégrer dans la ligne de conduite de la convention de Ramsar pour l'année 2014 qui a choisi pour thème "Les zones humides et l'agriculture : cultiver le partenariat". Il reste que bien qu'elles jouent un rôle important dans les processus vitaux, entretiennent des cycles hydrologiques et accueillent poissons et oiseaux, les zones humides sont confrontées à de nombreuses menaces. Tout comme les forêts tropicales, les zones humides sont détruites à un rythme sans précédent. Privées parfois de leur eau par des pompages excessifs ou par la construction irréfléchie de barrages, elles sont même complètement drainées au profit de l'agriculture et même pour l'urbanisation. Selon M. Haou, le dernier recensement effectué en 2006 a dénombré 1.451 zones humides en Algérie, dont 762 sont naturelles. Aujourd'hui, le nombre de zones humides dépasse le millier si l'on inclut oueds, grottes, oasis, dayas, et zones côtières. Cinquante (50) sites sont classés sur la liste de Ramsar des zones humides d'importance internationale, avec une superficie de plus de 2,5 millions d'hectares, soit quelque 50% de la superficie totale estimée des zones humides en Algérie. Les zones humides algériennes sont d'une grande diversité biologique. L'on y recense une trentaine d'espèces de poissons d'eau douce, 784 espèces végétales aquatiques connues et plus de 70 espèces aviaires inféodées, propres aux milieux aquatiques, sans oublier d'autres espèces dont la vie dépend étroitement de la pérennité de ces écosystèmes. Malgré leur importance, en tant que sièges d'une biodiversité sans pareille, les zones humides n'échappent pas à une dynamique de destruction qui remet en cause l'existence d'un nombre élevé d'espèces floristiques et faunistiques. L'impact le plus important est la disparition de certaines plantes rarissimes. La wilaya d'El Tarf est reconnue pour être une wilaya agricole et rurale, mais elle est également considérée comme la région par excellence des zones humides. D'ailleurs, les deux premiers sites Ramsar inscrits en Algérie sont situés dans cette wilaya (le lac Tonga et le lac Oubeira). El Tarf renferme les plus grandes zones humides d'Afrique du nord. Le lac Tonga, réserve intégrale d'importance internationale pour les oiseaux d'eau, se caractérise par une importante couverture végétale en mosaïque offrant un refuge hivernal idéal pour plus de 25.000 anatidés et foulques. Ce lac, en communication avec la mer Méditerranée par le biais du canal Messida, constitue également un site de nidification pour de nombreuses espèces dont certaines sont très rares, à l'exemple de l'érismature à tête blanche, le fuligule Nyroca, la poule Sultane et la guifette Moustac. La réserve intégrale du lac Tonga est un bon exemple de zone humide représentative, rare et unique de type zone humide naturelle de la région méditerranéenne, se situant dans un complexe de zones humides qui viendrait en troisième position après ceux du delta de l'Ebre en Espagne et la Camargue en France. Le Tonga, qui s'étale sur 2.700 hectares, compte une centaine d'espèces végétales appartenant à une quarantaine de familles botaniques dont plus de 40 % sont classées entre "assez rares" et "rarissimes", à l'exemple de la nymphaea alba et de l'utricularia exoleta, auxquelles s'ajoutent une vingtaine d'insectes, de reptiles et d'amphibiens (grenouilles, crapauds de Mauritanie, lézard ocellé et couleuvre vipérine. Autant de variétés et de richesses qui nécessitent protection et préservation. Tout comme le Tonga, le reste des zones humides, telles les réserves intégrales des lacs Oubeira et Mellah, dans la commune d'El Kala, la Tourbière du lac Noir (Berrihane), les Marais de la Mekrada (Berrihane et Ben M'Hidi) et les aulnaies de Bourdim, joue un rôle important dans la maîtrise des crues en période d'hiver, le captage des sédiments et matières arrachées par les crues en amont et charriées vers les lacs et la stabilisation des dunes littorales. Chaque année, la célébration de la Journée mondiale des zones humides est mise à profit pour rappeler l'importance et la valeur des services rendus par ces milieux naturels, notamment en matière de fourniture d'eau potable. L'exploitation irrationnelle de ces plans d'eau se poursuit un peu partout à El Tarf faute d'une prise de conscience des uns et des autres. Si le lac Tonga jouit aujourd'hui d'une certaine "tranquillité" après l'abandon, dans les années 1980, des cultures de maïs et de tabac, le lac Oubeira continue, quant à lui, de pâtir des activités agricoles pratiquées sur la périphérie des berges, notamment la culture des arachides. Compte tenu de l'originalité et de la rareté de cette importante biodiversité, les zones humides de cette région dans l'extrême nord-est du pays, offrent des formes et une composition floro-faunistique variée et diversifiée d'intérêt écologique certain, méritant attention et davantage d'actions visant leur protection. A l'occasion de la célébration, le 2 février 2014, de la Journée mondiale des zones humides, le PNEK a concocté un programme aussi riche que diversifié. Selon M. Haou, le menu arrêté cible en premier les élèves par l'organisation de concours de dessin, de sorties ornithologiques, en plus de la tenue, au parc de Brabtia, d'expositions et de portes ouvertes sur les zones humides. Au menu de cette célébration figurent également des rencontres-débats regroupant l'ensemble des acteurs activant dans les zones humides, pour mettre en relief le rôle de ces espaces. L'enjeu est de "sauvegarder ces zones humides qui font la particularité de cette wilaya aux potentialités indéniables", avait souligné le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, lors de sa dernière visite à El Tarf.