Après une forte chute entamée en été dernier, les cours de pétrole ont légèrement rebondi depuis fin janvier mais restent loin de leurs niveaux d'avant la crise, plombés par l'abondance de l'offre et une demande sans vigueur. Ces derniers jours, le brut a réussi à grimper au dessus de 50 dollars le baril, et à même frôlé la barre des 60 dollars lundi dernier à Londres, mais sans pouvoir se maintenir à ce niveau ou aller au-delà. Les risques pour la stabilité financière des pays exportateurs de pétrole induits par cette dégringolade des cours pétroliers sont relevés par plusieurs institutions internationales telles le FMI et la Banque mondiale. C'est dans ce sens que des initiatives sont menées par l'Algérie pour trouver une base consensuelle à même d'enrayer la chute des cours de brut, et ce, en direction de pays producteurs de pétrole Opep et non-Opep. Certes, le pétrole a, relativement, profité de la fermeture de plusieurs puits de pétrole en activité aux Etats-Unis pour s'apprécier légèrement, tandis que cette réduction du nombre de plateformes a été interprétée comme le signe encourageant d'un rééquilibrage futur de l'offre en réaction à la chute des cours du pétrole. Mais l'offre continue d'excéder la demande alors que les ajustements opérés par des producteurs, à travers des coupes dans leurs investissements en passant par la baisse du nombre de plateformes, ne se sont pas encore traduits par une absorption de l'excédent. L'Agence internationale de l'Energie (AIE) est restée prudente sur cette tentative de rebond en affirmant mardi, dans son rapport mensuel, que ce rééquilibrage des prix aura une portée relativement limitée. Si elle anticipe un redressement des cours pour les prochaines années, elle juge, cependant, qu'ils devraient rester au dessous des niveaux d'avant juin 2014 lorsque l'or noir évoluait au dessus des 100 dollars le baril. Cette agence explique que la faiblesse des cours de brut ne suffit plus à dynamiser la croissance économique mondiale et donc à augmenter la demande ou à freiner l'essor du pétrole de schiste aux Etats-Unis, à l'origine de la surabondance de l'offre. Même la prétendue "guerre pétrolière" menée par l'Arabie Saoudite pour freiner l'essor du pétrole de schiste américain n'est pas susceptible d'atteindre ses objectifs puisque la production du pétrole non conventionnel outre-Atlantique est attendue à la hausse à 5,2 mbj en 2020 contre 3,6 mbj en 2014, selon l'AIE. Selon ses pronostics, l'évolution des prix du pétrole sur le marché devrait se situer à 55 dollars le baril en 2015 et à 73 dollars en 2020. L'Opep, qui pompe plus d'un tiers de la production mondiale, est restée, elle aussi, sceptique sur le redressement des prix, en évoquant, dans son dernier rapport, un léger rééquilibrage du marché dans le sillage d'un marché structurellement excédentaire. Le facteur de rééquilibrage, selon l'Opep, est la hausse de la demande mondiale de brut. Selon ses prédictions, la demande va progresser de 1,17 mbj en 2015 contre un pronostic précédent de 1,15 mbj. Mais le marché reste structurellement excédentaire avec un surplus de production quotidien de l'ordre de 1 million de barils, relève-t-elle. Les commandes de brut adressées à l'Opep doivent désormais atteindre 29,2 mbj en 2015, contre 28,8 mbj dans la précédente estimation. Mais ce chiffre reste largement inférieur à la production effective de l'organisation, qui s'est établie à 30,15 mbj en janvier dernier, en légère hausse par rapport à son plafond de 30 mbj fixé en 2008. L'Opep garde, cependant, un brin d'optimisme en évoquant un possible sursaut des débouchés cette année car les prix bas sont en mesure d'accélérer le rythme de la hausse de la demande. Malgré cette forte dégringolade des prix qui a fait perdre au brut 60% de sa valeur depuis juin 2014, certains membres de l'Opep, sous l'influence notamment de l'Arabie Saoudite, s'entêtent contre toute réduction de la production dans l'objectif de protéger leurs parts de marchés face à l'offre du pétrole de schiste américain. Mais dans cette équation, l'Opep pourrait perdre son rôle de swing producer (producteur en mesure de garantir la stabilité du marché) au profit des Etats-Unis qui connaissent une explosion de la production de pétrole non conventionnel.