Le recteur de la Mosquée de Paris et président du Conseil du culte musulman de France (CCMF), Dalil Boubekeur, s'est déclaré jeudi inquiet de la "culpabilisation" de la communauté musulmane en France, regrettant "la lenteur" de la réaction du gouvernement français de qui sont attendues "des paroles rassurantes" à l'adresse des Musulmans. S'exprimant sur les ondes de la chaîne III de radio nationale, M. Boubekeur a estimé qu'il y a un "sentiment de culpabilisation envers les musulmans comme si la communauté musulmane en France était quelque part responsable de l'action de quelques fous, quelques malades et de sociopathes dont les causes sont très différentes de la religion". Le recteur de la Mosquée de Paris a annoncé que "le nombre d'actions contre les musulmans et contre les lieux de culte de l'Islam enregistrés après l'attentat contre l'hebdomadaire Charlie Hebdo est supérieur à ceux signalés durant toute l'année 2014". Il a relevé, à ce propos, que cela "est tout à fait significatif de la tension, de l'émotion, de l'islamophobie", qui règnent en France. Cette situation a généré, a affirmé M. Boubekeur, un sentiment de peur et d'inquiétude au sein de la communauté musulmane en France. "Les musulmans en France, qui sont 6 à 7 millions, redoutent ces amalgames entre islam et intégrisme, djihadisme et tout ce qui marque l'islam agressif ou quelque chose qui n'a rien à voir avec l'Islam", a souligné le responsable. Pour ce qui est de la réaction des autorités françaises face à cette montée de l'islamophobie, l'intervenant estime que "le gouvernement français est assez lent". Il a indiqué, dans ce sens, que les Musulmans de France attendent des paroles rassurantes de la part des autorités françaises. "Des paroles sont attendues par les musulmans : qu'ils soient considérés, au fond, comme des citoyens comme les autres. L'aspiration de nos frères et sœurs est d'être reconnus dans leur dignité et leur citoyenneté", a déclaré M. Boubekeur. "Or, jusqu'à présent, il y a beaucoup de plaintes, de fausses solutions. Beaucoup de retards dans la réalisation de cet élément de stabilité, de consolation en rassurant la communauté musulmane", a-t-il précisé. M. Boubekeur n'a pas manqué de critiquer des milieux intellectuels et médiatiques français où "cette islamophobie devient un mode opératoire", évoquant aussi le parti de l'extrême droite (FN), qui "met dans son programme, la négation et le rejet des musulmans". S'agissant des lieux de culte musulman, le recteur de la Mosquée de Paris a plaidé pour que soit permis aux musulmans d'accomplir leur culte "dans la dignité". Citant le défunt philosophe Mohamed Arkoun, qui disait qu'"il y a un imaginaire d'exclusion réciproque entre les Musulmans et les européens" M. Boubekeur a exprimé sa désapprobation à l'idée des "chocs des civilisation". "L'Islam, c'est la tolérance, la paix, le dialogue, le vivre ensemble", a souligné l'invité de la radio nationale, qui a annoncé que le CCMF avait adopté "une charte du vivre ensemble en respect de la loi et ne pas subir la crise qui frappe électivement la communauté musulmane". Abordant la question des imams et de leurs formations, M. Boubekeur qui a indiqué que "ce sont les meilleurs qui viennent de l'Algérie avec une bonne formation", a émis le souhait que ces imams maîtrisent la langue française dans la mesure ou les jeunes musulmans vivant en France ne parlent pas la langue arabe. Interrogé sur la montée du radicalisme, le responsable a estimé que "le radicalisme vient d'ailleurs, il ne vient pas des musulmans, encore moins des mosquées de France", ajoutant qu'"il vient du (groupe terroriste) Daech et des groupes étrangers". Selon lui, "les Occidentaux ont une responsabilité dans cette montée du radicalisme en poussant les musulmans à aller en Syrie, en Irak et en Libye".