Un travail de mémoire et de recherches historiques approfondies est nécessaire pour conduire l'Etat français à reconnaître officiellement les massacres du 8 mai 1945 en Algérie, a indiqué samedi à Sétif l'historien Gilles Manceron. Ce travail doit se baser sur "des échanges entre universitaires algériens et français (à) pour apporter toute la lumière sur ces douloureux événements", a ajouté M. Manceron au cours d'un colloque international sur "les massacres coloniaux", organisé à l'université Lamine-Debaghine de Sétif après Constantine et Guelma. Pour cet historien, "des travaux scientifiques associant historiens, sociologues, psychologues et anthropologues autour des massacres du 8 mai 1945 apporteraient de nouveaux éclairages et contribueraient à déclencher le processus qui conduira la France à reconnaître sa responsabilité dans les événements de Sétif, de Guelma et de Kherrata". M. Manceron a rappelé que les événements du 8 mai 1945 ont été "dissimulés à l'opinion publique française et internationale pendant soixante ans par les autorités et la presse française", et remplacés par ce faux postulat : "des violences commises à Sétif contre des Européens ont obligé l'administration coloniale à agir". Soulignant que la vérité finit toujours par triompher, il a affirmé que les "gestes" de la France officielle, celui du président François Hollande reconnaissant, à Alger en 2012, "les souffrances que la colonisation a infligées au peuple algérien" et, plus récemment, l'hommage rendu par le secrétaire d'Etat français chargé des Anciens combattants et de la mémoire, Jean-Marc Todeschini, aux victimes algériennes de Sétif, sont le début d'un "frémissement" qui devrait mettre, à terme, la France "devant ses responsabilités". L'historien a également souligné que le vote de certains conseils municipaux de villes françaises en faveur de la reconnaissance des massacres du 8 mai et la commémoration du 70ème anniversaire de l'événement à Paris, Nanterre et Rennes sont des "signaux forts". Organisé par le département des colloques de la manifestation "Constantine, capitale 2015 de la culture arabe", ce colloque a donné lieu à plusieurs communications qui ont abordé divers aspects des événements du 8 mai 1945. Il a notamment été question des témoignages de ceux qui ont survécu aux massacres et de la position "décevante" de la gauche française. Les intervenants ont également abordé la question des massacres coloniaux en Afrique équatoriale sous domination française. Le colloque international sur "les massacres coloniaux" se poursuivra dimanche à l'université Abderrahmane-Mira de Bejaia.