Les Burundais élisent lundi leurs députés et conseillers dans un climat très tendu marqué par la poursuite des violences après l'ouverture des bureaux de vote, et le refus des observateurs d'observer ces élections controversées. Quelque 3,8 millions d'électeurs, selon les autorités, sont appelés aux urnes pour ce scrutin proportionnel à un tour. Ils doivent élire 100 députés, auxquels s'ajouteront trois membres de l'ethnie ultra-minoritaire twa ainsi que, si nécessaire, un nombre variable de députés cooptés au sein des listes en lice pour parvenir aux équilibres prévus par la Constitution: l'Assemblée doit compter 60% de députés hutu (environ 85% de la population), 40% de députés tutsi (environ 15%) et 30% de femmes. Centres de vote attaqués, tirs et grenades dès la première heure Des violences - essentiellement des jets de grenade - ont parfois retardé le début des opérations de vote à Bujumbura. Mais dans tout le pays, les élections se dérouleront sous tension. Sans compter les centres de vote attaqués à Bujumbura et en province avant le vote et les tirs qui ont résonné une bonne partie de la nuit de dimanche à lundi dans la capitale, retardant parfois de deux heures le début du vote dans des quartiers contestataires. Signe du climat toujours tendu, une grenade a explosé peu avant 9 h (heure locale) dans le quartier contestataire de Musaga, à Bujumbura, à quelques centaines de mètres d'un centre de vote. Selon la police, elle a visé des policiers postés sur la principale rue mais n'a pas fait de victimes. Dans ce centre de vote, militaires et policiers surtout faisaient la queue pour voter. "Les manifestants ont fermé les routes pour nous bloquer, mais nous sommes allés chercher des policiers pour nous accompagner", a raconté Annick Niyonkuru, l'une des rares personnes civiles à attendre avec eux. Plus au nord en territoire présidentiel, dans un centre de vote de Kamenge lui aussi gardé par des policiers fouillant au corps les électeurs, de petits groupes d'une dizaine de personnes attendaient devant les bureaux de vote. Le centre de Bujumbura avait lui des airs de ville fantôme: les magasins étaient fermés, la circulation clairsemée. Une bonne partie de la population est partie se réfugier en province ou au Rwanda voisin de crainte d'une attaque de grande ampleur à l'approche des scrutins. L'UA et l'UE refusent d'observer les scrutins L'Union africaine (UA), comme l'Union européenne (UE), a renoncé à observer les élections, estimant elle aussi que les conditions n'étaient pas remplies pour un scrutin crédible. L'UA a, sans succès, demandé le report de ce scrutin et de l'élection présidentielle prévue le 15 juillet, et a refusé dimanche soir d'observer les scrutins de lundi. L'UA a réaffirmé dimanche la nécessité impérieuse d'ouvrir le dialogue et d'établir un consensus pour parvenir à une solution durable à la crise au Burundi et a appelé à répondre positivement aux appels urgents lancés par la région. L'UE a, de son côté, condamné le maintien ce lundi par le président burundais Pierre Nkurunziza des élections législatives et communales, qu'elle a qualifié de "fait grave" qui "ne pourra qu'exacerber la crise profonde que traverse le Burundi". "L'organisation des élections législatives ce 29 juin, sans mettre en place les conditions minimales pour assurer leur crédibilité, transparence et inclusivité, ne pourra qu'exacerber la crise profonde que traverse le Burundi", a estimé dans un communiqué un porte-parole du service diplomatique de l'UE. L'UE a indiqué qu'elle retirait les quelques membres de son équipe d'observation électorale encore sur place. Les seuls observateurs internationaux sont ceux de l'ONU, qui a précisé que leur présence ne devait pas être "interprétée comme une validation" du processus. Plus de 70 personnes sont mortes et plus de 120.000 Burundais terrifiés par le climat préélectoral ont fui le pays.