Le général Gilbert Diendéré, proche de l'ancien président Blaise Compaoré, a pris la tête des putschistes qui ont renversé jeudi les autorités de transition au Burkina Faso, suscitant une large condamnation de la communauté internationale, alors que le pays se prépare pour des élections présidentielle et législatives. Les militaires du Régiment de sécurité présidentielle (RSP) au Burkina Faso, qui avaient pris en otages mercredi le président Michel Kafando et le Premier ministre Isaac Zida mercredi, ont annoncé jeudi matin avoir "dissous" les institutions de la transition et promis d'organiser des "élection inclusives". Plusieurs responsables politiques ont appelé les Burkinabè à se mobiliser dans la rue pour protester contre ce coup de force. Le président du Conseil national de la transition (assemblée de transition), Cheriff Sy, a notamment appelé "le peuple à se mobiliser immédiatement contre cette forfaiture". Les putschistes ont annoncé vendredi que M. Kafando a été libéré jeudi soir "en signe d'apaisement et d'intérêt général", mais pas son Premier ministre Isaac Zida. Le chef de l'Etat sénégalais Macky Sall, président en exercice de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao) est attendu vendredi au Burkina Faso en vue d'essayer de calmer les esprits. Ce coup d'Etat militaire intervient alors que ce pays de 17 millions d'habitants, enclavé au cœur du Sahel, se préparait à des scrutins présidentiel et législatifs le 11 octobre, censés clore la transition ouverte après la chute de Blaise Compaoré il y a moins d'un an. Retour au calme après des violences ayant fait trois morts Les violences survenues depuis le début du coup d'Etat militaire au Burkina Faso ont fait au moins trois morts et une soixantaine de blessé, selon un bilan rendu public jeudi soir de source médicale au principal hôpital de la capitale Ouagadougou. La situation était calme vendredi matin à Ouagadougou après la première nuit sous le couvre-feu imposé par les militaires putschistes, et la ville n'était plus étroitement quadrillée, comme la veille, par les hommes du Régiment de sécurité présidentielle (RSP), selon des médias. C'est cette unité d'élite de l'armée qui a pris le pouvoir, en accusant les autorités installées après la chute en octobre 2014 du président Blaise Compaoré, d'avoir dévoyé la transition, notamment en excluant les partisans de l'ex-homme fort des prochaines élections. Le couvre-feu a été respecté dans la capitale, mais pas dans plusieurs villes de province, notamment à Bobo Dioulasso (ouest), deuxième ville du pays, où des manifestants se sont rassemblés pour protester contre le putsch, ainsi qu'à Fada-Ngourma (est). Le protestations se sont déroulées sans incidents, les forces de l'ordre n'ayant pas cherché à intervenir. L'armée, la police et la gendarmerie sont restées très discrètes depuis le coup d'Etat. Large condamnation de la communauté internationale, appels à la "libération immédiate" des otages L'ONU, l'Union africaine (UA) et la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao) ont "exigé" mercredi soir la libération "immédiate et inconditionnelle" du président intérimaire du Burkina Faso et de son Premier ministre retenus en otage par des militaires d'un corps d'élite à Ouagadougou. L'UA, la Cédéao et les Nations Unies "soulignent avec force que les auteurs de cet enlèvement inacceptable répondront de leurs actes et seront tenus responsables de toute atteinte à l'intégrité physique du président du Faso, du Premier ministre et des autres personnalités qu'ils détiennent", écrivent les trois organisations dans un communiqué conjoint diffusé sur le site internet de l'UA. Les pays membres du Conseil de sécurité de l'ONU ont exigé que les putschistes "restaurent l'ordre constitutionnel et rendent le pouvoir aux autorités civiles de transition sans délai" et qu'ils respectent le calendrier de la transition, "notamment la tenue d'élections libres, équitables et crédibles", prévues pour le 11 octobre, ajoutant que "les auteurs de cette prise inconstitutionnelle du pouvoir par la force doivent rendre des comptes". Le Conseil a réaffirmé son "ferme soutien" aux efforts de médiation du représentant de l'ONU en Afrique de l'Ouest, Mohamed Ibn Chambas, qui a rencontré jeudi le chef des putschistes, le général Gilbert Diendéré. Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon se déclare dans un communiqué "scandalisé" par ce coup de force, indiquant que "les Nations unies soutiennent fermement les autorités de transition et le président (Michel) Kafando". De même, la chef de la diplomatie européenne, Federica Mogherini, a fait savoir que l'UE soutient les efforts en cours par les représentants de l'ONU, de l ́Union africaine (UA) et de la Cédéao (Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest) pour obtenir la libération des otages. Washington a menacé de réévaluer l'aide américaine à ce pays si une résolution pacifique de la crise n'était pas trouvée. La réaction de l'Algérie ne s'est pas fait attendre en condamnant jeudi fermement le "coup de force" et appelé à la libération "immédiate" et "sans conditions" des responsables de la transition. "L'interruption violente et illégale du processus de transition politique en cours, à quelques jours de la tenue des élections devant consacrer le rétablissement de l'ordre constitutionnel dans ce pays frère, est un acte inacceptable qui compromet gravement les chances d'une sortie rapide de la crise politique que traverse le Burkina Faso", indique un communiqué du ministère de Affaires étrangères. Le président français François Hollande a quant à lui appelé à la libération "immédiate de toutes les personnes arrêtées, à la remise en place des autorités de la transition et à la reprise du processus électoral", selon un communiqué de l'Elysée.