Le colloque international sur "la question irrésolue du Sahara occidental" a débuté jeudi à l'Université de la Sorbonne de Paris pour tenter, durant deux jours, de mettre la lumière, 40 ans après sa colonisation par le Maroc, sur ce conflit. Sous le thème "La question (irrésolue) du Sahara Occidental : quels enjeux pour quelles recherches en sciences humaines et sociales ?", le colloque est organisé par l'Université Paris Descartes-Sorbonne, le Centre Population et Développement (CEPED), le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) et l'Unité Mixte de Recherche CITERES de l'Université de Tours. A l'ouverture des travaux de ce colloque, qui se tient deux jours après le décès du président de la République arabe sahraouie démocratique (RASD), Mohamed Abdelaziz, les animateurs ont relevé que la question du Sahara occidental "reste non seulement irrésolue, mais aussi, et surtout, largement oubliée des médias internationaux (et) mal comprise des experts". Ils ont indiqué qu'il leur a fallu 18 mois de travail pour organiser ce colloque de dimension internationale, soulignant qu'ils n'ont invité "ni les chercheurs sahraouis ni marocains" pour cette rencontre scientifique. "Cette rencontre ambitionne d'identifier les pistes pour l'application du droit international, grâce à l'échange et au partage universitaire", a précisé d'emblée Francesco Correale, chercheur et universitaire spécialiste du Sahara occidental. Des chercheurs espagnols ont analysé, chacun dans ses interventions, la question identitaire sahraouie, qui s'est construite au fil des temps, que la puissance coloniale marocaine apporte sa négation "totale". Le juriste et universitaire espagnol de l'Université Complutence de Madrid, Isaias Barennada, a analysé, pour sa part, les facteurs endogènes et exogènes qui ont contribué à la consolidation de l'identité nationale chez les Sahraouis, avant et après l'occupation marocaine. "Après plusieurs décennies, a-t-il expliqué, cette identité s'est consolidée grâce à la résistance politico-culturelle du peuple sahraoui", malgré le "coup de poker de Hassan II avec sa marche verte" et les tentatives du Maroc d'attirer les nomades sahraouis vers lui, comme a soutenu l'anthropologue Romain Simene, qui s'est intéressé sur "les tribus sahraouies face au conflit du Sahara occidental". Isaias Barennada a indiqué que la consolidation de cette identité nationale sahraouie a donné une "visibilité" au conflit et à la présence du peuple sahraoui, citant, entre autres, les manifestations de résistance de ce peuple qui ont favorisé la médiatisation de la question, du problème des droits de l'homme avec la mise en valeur de certaines personnalités sahraouies. Pour lui, la lutte armée menée par les Sahraouis a été un facteur "déterminant" dans la consolidation de l'identité nationale. Jesus Martinez-Dorronsoro, maître de conférence à la Sorbonne, a soulevé la question des archives espagnoles sur le Sahara occidental qui ont été interdites aux chercheurs depuis 2010. Lors de son intervention "la recherche sur le Sahara occidental en Espagne et en France", il a souligné que les historiens ont perdu, avec cette décision du gouvernement espagnol, "tout l'intérêt et les pistes" pour des recherches sur le Sahara occidental, en concluant: "Pouvons-nous nous contenter seulement des sources orales ?". Dans les débats, les intervenants, dont la plupart bien imprégnée des fondements de la question, se sont contentés, chacun de son côté, à apporter des compléments d'information ce que a été dit par les conférenciers. Pierre Galand, président de la Conférence européenne de soutien et de solidarité avec le peuple sahraoui, a rappelé que le mouvement indépendantiste sahraoui était soutenu, pendant la colonisation espagnole, par le Maroc, déplorant la rôle "important" joué par la France pour soutenir la "marche verte". Il a été soutenu, dans ce sens, par le chercheur algérien Yahia Zoubir qui également indiqué que, selon les archives américaines déclassées, ce sont les Etats-Unis qui ont donné à Hassan II le "feu vert pour envahir le Sahara occidental". Inscrit depuis 1966 sur la liste des territoires non-autonomes et donc éligible à l'application de la résolution 1514 de l'Assemblée générale de l'ONU portant déclaration sur l'octroi de l'indépendance aux pays et peuples coloniaux, le Sahara occidental est la dernière colonie en Afrique, occupée depuis 1975 par le Maroc, soutenu par la France. Plusieurs rounds de négociations entre les parties en conflit, le Maroc et le Front Polisario, ont été organisés sous l'égide de l'ONU. Ils buttent sur la position de blocage de la partie marocaine relative à l'organisation d'un référendum pour l'autodétermination du peuple sahraoui.