Des dizaines de personnes ont été blessées jeudi lors d'une manifestation massive réprimée par les forces de sécurité dans la ville d'Al-Hoceïma, où la situation reste "confuse", sept mois après le déclenchement du mouvement de protestation dans cette localité de la région du Rif, ont rapporté des médias. Selon un bilan officiel relaté par les médias, 83 blessés parmi les agents de police et manifestants suite à l'usage du gaz lacrymogène par les policiers pour mettre fin à cette "manifestation non autorisée". Des témoins oculaires qui se sont exprimés sur les réseaux sociaux ont dénoncé un non-respect des règles de l'usage des bombes lacrymogènes qui obéit à des normes. Selon eux, des grenades lacrymogènes ont visé des manifestants, au lieu que ces engins soient lancées par terre, c'est pourquoi expliquent-ils (les témoins), le nombre de civils blessés était important. D'aucuns présentant de graves blessures mais ont refusé de se rendre à hôpital de crainte d'être détenu, selon la même source qui a fait état d'un cas de blessé dans le coma. La situation demeure "confuse" et la répression toujours plus dure Pour l'heure, l'ambiance demeure "confuse" à Al Hoceima, épicentre d'une contestation qui dure depuis 7 mois. L'interdiction de la manifestation à caractère pacifique n'a pas eu raison de la détermination des habitants des villes et villages avoisinants, qui ont afflué sur Al Hoceima", selon la presse locale. "Plusieurs manifestants qui ont essayé de se rendre à Al Hoceima, en provenance d'Imzouren, Beni Bouayach, Tamassint et les autres villages et villes avoisinantes, ont été soit enregistrés dans des fiches rouges, soit interdits de continuer le trajet par les gendarmes ou policiers postés aux entrées de la ville", indiquent plusieurs sources. La répression n'a pas épargné les médias, le parquet d'Al Hoceima a décidé d'ouvrir une enquête sur un journaliste, Hamid El Mahdaoui directeur du site Badil, accusé d'avoir "incité" (des individus)" à sortir manifester malgré l'interdiction de la manifestation. Le site Badil a annoncé jeudi qu'il était arrêté alors qu'il se trouvait à Al Hoceima pour couvrir la manifestation. En effet, la situation dans cette ville de la région du Rif est tendue depuis octobre 2016, lorsqu'un vendeur de poisson, Mouhcine Fikri, a été broyé par une benne à ordures alors qu'il tentait de récupérer sa marchandise confisquée par les forces de sécurité. Ce drame a motivé la prise de conscience face aux injustices sociales et politiques imposées aux populations de cette région, depuis plus de 60 ans. La frustration et le sentiment d'abandon restent bien présents dans l'esprit des habitants rifains. Plus de 80 personnes toujours en détention Les manifestations réclamant justice pour la mort de Mouhcine Fikri ont évolué en un grand mouvement de contestation exigeant davantage d'investissements gouvernementaux pour créer des emplois dans la région. Le but de la grande marche pacifique de jeudi, était d'exiger la libération des prisonniers du mouvement "Hirak", protester "contre la répression" et "maintenir le combat populaire contre le pouvoir en place au Maroc. Depuis que les autorités marocaines ont annoncé le 8 juin le nombre de 86 personnes, les arrestations se poursuivent à al-Hoceima et Nador. (Trois ou quatre par jour", avait affirmé un avocat de la défense des détenus. Sur un premier groupe de 32 quelque 25 ont écopé de 18 mois de prison pour "violences à l'égard des forces de l'ordre", "manifestations sans autorisations" et "rébellion" vingt jours après leur arrestation, selon les médias locaux. L'appel à cette manifestation, annoncée comme la "marche du million", avait été lancé par Nasser Zefzafi, le leader du "Hirak" ("la mouvance", nom donné localement au mouvement de contestation, ndlr), avant son arrestation fin mai par la police. Si la quasi-totalité des figures de la protestation ont été arrêtées depuis, l'appel à manifester a cependant continué à être relayé par les réseaux sociaux. Pour rappel, la journée du 20 juillet intervient 24 heures avant l'anniversaire de la bataille d'Anoual dans la région du Rif 21 juillet 1921, au cours de laquelle Mohamed Abdelkarim El Khattabi avait infligé une défaite à l'armée espagnole. Suite à cette défaite les Espagnols se retirent lui permettant (à El Khattabi) de fonder la "République du Rif" entre 1921 et 1927.