Les accords d'association et de libéralisation entre l'Union européenne (UE) et le Maroc étaient appliqués "de facto" aux produits originaires du Sahara occidental occupé qui bénéficiaient, ainsi des tarifs douaniers préférentiels, jusqu'à décembre dernier, a reconnu la chef de la diplomatie européenne, Federica Mogherini. "Jusqu'au jugement de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), les produits du Sahara occidental importés dans l'UE bénéficiaient, de facto, des mêmes préférences tarifaires que les produits originaires du Maroc", a-t-elle écrit dans sa réponse à l'eurodéputée Barbara Matera qui exhortait la Commission à préciser les secteurs économiques qui seront concernés par les négociations sur un accord additionnel à l'accord d'association UE-Maroc visant à se conformer au droit européen. Au cours des dernières années, l'UE a tenté d'éviter le débat sur la prétendue souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental. Pour justifier l'inclusion du Sahara occidental dans ses accords avec le Maroc, l'UE a taillé sur mesure un statut juridique à son partenaire: celui de "puissance administrante de facto". Or, cette notion n'existe pas en droit international. La dernière "puissance administrante" reconnue en droit international au Sahara occidental a été l'Espagne, ancienne puissance coloniale. La Cour de justice de l'UE avait jugé le 21 décembre dernier que l'accord d'association UE-Maroc, et par conséquent l'accord en matière de produits agricoles et de pêche, n'étaient pas applicables au territoire du Sahara occidental "ni de jure, ni de facto", soulignant le statut séparé et distinct garanti au territoire du Sahara occidental en vertu de la charte des Nations Unies et du principe d'autodétermination des peuples. La Cour avait notamment préciser que l'exploitation des ressources naturelles du Sahara occidental doit se faire au seul bénéfice de son peuple, et que l'approbation du peuple sahraoui est requise pour la conclusion d'un accord qui comprenne le Sahara occidental, constatant qu'il n'y avait pas de telle approbation. Dans sa question écrite adressée à la vice-présidente de la Commission et chef de la diplomatie européenne, l'eurodéputée Barbara Matera s'est interrogée sur "les principaux secteurs économiques concernés par les négociations en cours", jugeant "essentiel" d'évaluer le montant et le volume des produits provenant du Sahara occidental occupé dans le cadre du commerce de l'UE avec le Maroc. Federica Mogherini a estimé, à ce titre, la part des produits de la pêche transformés importés dans l'UE en provenance du Sahara occidental à "environ 215 millions d'euros en 2015 et 122 millions d'euros en 2016". "L'un des objectifs de l'étape préliminaire du processus de négociation est de recueillir des données et des informations, afin de mieux évaluer l'impact socio-économique de la modification envisagée", a-t-elle souligné. Dans une lettre adressée aux dirigeants de l'UE et signée par son secrétaire général, Brahim Ghali, le Front Polisario a exhorté l'UE et ses Etats membres à "rejeter la proposition de la Commission européenne de renégocier l'accord d'association UE-Maroc dans les termes actuels en raison des graves conséquences juridiques et politiques sur la question du Sahara occidental". Par ailleurs, la députée européenne Paloma Lopez a exhorté l'UE à exclure le Sahara occidental du champ d'application de ses accords avec le Maroc conformément à l'arrêt de la CJUE, exigeant d'elle de condamner la décision "unilatérale" du royaume du Maroc d'inclure dans ses eaux territoriales celles du Sahara occidental lors de la délimitation de ses frontières maritimes avec les îles Canaries (Espagne). L'eurodéputée a invité l'UE à négocier avec le Front Polisario, le représentant légitime du peuple sahraoui, pour trouver une solution, conformément au droit international, qui définit les frontières maritimes des eaux territoriales du Sahara occidental.