Les Soudanais attendaient samedi avec impatience la publication par les militaires au pouvoir de leur enquête sur la dispersion sanglante début juin d'un sit-in à Khartoum, alors que la diplomatie américaine et le leader de l'opposition soudanaise ont réclamé une enquête internationale sur cette "répression". Le Conseil militaire à la tête du pays depuis la destitution du président Omar al-Bachir le 11 avril, sous la pression de la rue, a reconnu jeudi avoir ordonné la dispersion le 3 juin du sit-in de milliers de manifestants devant le QG de l'armée dans la capitale soudanaise. Selon un comité de médecins proches de la contestation, quelque 120 personnes ont été tuées le 3 juin, la plupart dans la dispersion du sit-in. Les autorités contestent ce bilan et avancent de leur côté le chiffre de 61 morts. La crise au Soudan a éclaté en décembre 2018, rappelle-t-on, lorsque le gouvernement a décidé de tripler le prix du pain dans un climat de crise économique aigüe, provoquant des manifestations d'une ampleur inédite réclamant le départ du président al-Bachir. Après la destitution de celui-ci, les contestataires exigent le départ de l'armée et la remise immédiate des clefs du pouvoir aux civils. Le bras de fer entre les parties en conflit s'est durci lorsque les contestataires ont lancé fin mai une grève générale de 48 heures suivie quelques jours après d'un mouvement de désobéissance civile ayant paralysé le pays, lancé pour protester contre les évènements du 3 juin. Pour apaiser la tension, l'armée a fait des concessions en libérant trois militants soudanais arrêtés dans la foulée des manifestations et en arrêtant certains éléments parmi les forces régulières impliqués dans les évènements du 3 juin. La satisfaction de ces deux points était avancée par les leaders de la contestation comme des préalables de toute reprise de dialogue avec les militaires Ainsi, les leaders de la contestation et les dirigeants militaires ont accepté de reprendre les pourparlers après une médiation menée par le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed. Le leader de l'opposition soudanaise Sadek al-Mahdi estime que cette médiation "peut avoir un impact positif". "A terme, le Conseil militaire ne peut pas gouverner, c'est clair, et les forces civiles ne peuvent pas parler d'un avenir excluant la participation du Conseil militaire", a-t-il dit.