Les problèmes de l'Algérie doivent être réglés "exclusivement" entre Algériens, loin de toute ingérence étrangère, a souligné dimanche à Alger, Ahmed Bensaada, chercheur à l'Ecole polytechnique de Montréal et enseignant à l'Université d'Oran. Intervenant sur les ondes de la Chaîne III de la Radio nationale, M. Bensaada a évoqué le Hirak, estimant que celui-ci fait l'objet d'une "manipulation" d'officines, comme c'était le cas pour nombre de pays arabes. Il a souligné, à ce propos, que "pour qu'une révolte aboutisse, il faut qu'elle soit absolument intrinsèque, c'est-à-dire nos problèmes doivent être réglés entre nous", a-t-il dit. Il a tenu à souligner, dans ce sens, que "le fait de parler de manipulation ne veut pas dire que je suis contre le Hirak", en relevant certaines similitudes entre le Hirak du 22 février avec les révoltes en Egypte et la Tunisie en 2011, et même les révolutions colorées survenues en Géorgie, l'Ukraine ou le Kirghizistan, visant à changer les régimes "pacifiquement", en utilisant la technique de la "non-violence". Pour le chercheur, ces méthodes sont enseignées par des organismes étrangers spécialisés, et ce qui se passe en Algérie "n'est pas nouveau", a-t-il fait observer, affirmant qu'il "prend sa source dans les révolutions colorées", et les méthodes ressemblent, également, aux pays touchés par, ce qu'on appelle, le "printemps arabe". L'universitaire a expliqué que des officines basées aux Etats-Unis et en Europe "financent et forment différents organismes et associations à travers, notamment, des cyberactivistes pour déclencher des révoltes populaires dans ces pays". Selon lui, "il y'a une manipulation contre l'Algérie et notre pays est visé", en rappelant, à ce propos, qu'après les attentats du 11 septembre 2001, les Etats-Unis avaient décidé de provoquer des "changements radicaux" dans les pays arabes, et se sont alors donné les moyens pour le faire, à travers, entre autres, la formation de "cyberactivistes autochtones" pour la mise en œuvre de leur projet. A travers les réseaux sociaux, ces derniers mettent en œuvre leur stratégie, en planifiant les manifestations, en donnant des directives concernant les lieux de rassemblement, les idées sur les slogans, par exemple. M. Bensaada a tenu à souligner également que les revendications du Hirak sont "justes", et ce mouvement populaire est "bénéfique" pour le pays. "Mais nous n'avons pas besoin de financement étranger qui va nous pousser à nous entre-tuer", et le peuple algérien "n'a pas besoin de revivre l'expérience de la décennie noire", a-t-il fait savoir. "Si nous suivons ce que nous dictent les agendas étrangers nous irons directement droit au mur", a-t-il mis en garde, en rappelant que le député européen, Raphaël Glucksmann, qui est à l'origine de la Résolution du Parlement européen sur la situation en Algérie, fait partie du Cercle de l'oratoire, un cercle de réflexion français "néoconservateur, qui était pour l'invasion de l'Irak et de l'Afghanistan et la destruction de la Libye". "Nous souhaitons un réel printemps en Algérie, régler nos problèmes entre nous, avoir un pays démocratique sans qu'il y'ait une ingérence étrangère", a-t-il insisté, mettant en avant le fait que "jamais notre pays ne reviendra à avant le Hirak". "Nous ne pouvons plus revenir en arrière, sauf que donnez-nous la chance d'avoir un pays qui est tenu par les Algériens et par des agendas purement algériens, et non pas des agendas étrangers", a souligné M. Bensaada. L'auteur de "Arabesque américaine" a souligné que "l'arrogance, l'entêtement et l'obstination sont de très mauvais conseillers dans cette période", appelant à faire en sorte que ce soulèvement populaire "soit un vif succès pour une Algérie nouvelle, apaisée, pleine de promesse pour un peuple qui a tant espéré".