Le ministre de la Justice, garde des Sceaux, Abderrachid Tabi, a affirmé, dimanche à Alger, que la loi 06-01 relative à la prévention et à la lutte contre la corruption fera l'objet cette année d'un "amendement", et ce, dans le cadre du renforcement des dispositions de prévention contre la corruption et celles relatives à la récupération des fonds détournés. Le ministre s'exprimait lors d'une séance plénière de l'Assemblée populaire nationale (APN), présidée par M. Brahim Boughali, président de l'APN, en présence de la ministre des Relations avec le Parlement, Besma Azouar, consacrée à la présentation et l'examen de l'avant-projet de loi fixant l'organisation, la composition et les prérogatives de la Haute autorité de transparence, de prévention et de lutte contre la corruption. M.Tabi a fait savoir, dans ce cadre, que "la loi 06-01 relative à la prévention et à la lutte contre la corruption devra faire l'objet d'un amendement en vue de renforcer les dispositions visant la prévention contre la corruption et celles relatives à la récupération des fonds détournés, tout en abrogeant les dispositions relatives à la Haute autorité". Le garde des Sceaux a fait état de la création, en vertu des lois visant la lutte contre la corruption sous toutes ses formes, "d'une instance d'enquête" sur les signes d'enrichissement illicite chez les fonctionnaires publics, et ce, dans le cadre de la mise en œuvre des recommandations du Conseil des ministres du 2 janvier dernier, portant création d'une instance d'enquête sur les signes d'enrichissement illicite des fonctionnaires publics. Les nouvelles dispositions introduites proposent la création d'un "mécanisme opérationnel et d'application" pour vérifier les déclarations de patrimoine, en ce sens que la Haute autorité de transparence, de prévention et de lutte contre la corruption sera dotée d'une "structure spécialisée habilitée à mener des enquêtes financières et administratives sur l'enrichissement illicite des fonctionnaires publics qui ne seront pas en mesure de justifier la source de l'augmentation de ses revenus et avoirs", a explique le ministre. "Les enquêtes peuvent toucher toute personne potentiellement impliquée dans la dissimulation d'une richesse injustifiée d'un fonctionnaire public, surtout s'il s'avère que ce dernier en est le véritable bénéficiaire", a-t-il ajouté. L'instance peut - selon le même responsable - "demander des explications écrites ou orales à l'employé ou à la personne concernée, de même qu'elle est autorisée, dans le but de protéger les biens et conformément aux nouvelles dispositions, à demander au procureur de la République près le tribunal de Sidi M'hamed d'émettre des mesures conservatoires de saisie de biens ou de gel des comptes bancaires par décisions de justice rendues par le président du même tribunal, une décision susceptible d'appel dans le cadre de la consécration du droit de la défense". Dans son intervention, le garde des Sceaux a passé en revue les grands axes de l'organisation de la Haute autorité de transparence, de prévention et de lutte contre la corruption, instituée dans le cadre de " l'adaptation du système judiciaire de prévention et de lutte contre la corruption aux dispositions de la Constitution, qui a créé en vertu de son article 204 une nouvelle institution de contrôle chargée de la transparence, de prévention et de lutte contre la corruption, en remplacement de l'Autorité nationale actuelle". Dans le même contexte, il a souligné que ce projet "a pour référence le programme présidentiel qui place la moralisation de la vie publique et la lutte contre la corruption parmi les priorités". Ce projet "s'appuie sur plusieurs conventions et traités internationaux ratifiés par l'Algérie, telles la Convention de l'Union africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption de 2003, ainsi que la Convention des Nations unies contre la corruption et d'autres conventions similaires", a précisé le ministre. Selon le texte présenté par M. Tabi, "la Haute autorité est composée d'un président nommé par le Président de la République pour un mandat de cinq ans, renouvelable une fois, tandis que le renouvellement des membres cette Haute autorité (12 membres) sera déterminé par un décret présidentiel pour un mandat de cinq ans non renouvelable". Le projet de loi prévoit 40 articles et plusieurs principes, dont la non-interférence entre les pouvoirs de la Haute autorité et des autres autorités chargées de la prévention et de la lutte contre la corruption, notamment le pouvoir judiciaire et la Cour des comptes. Le texte détermine en outre les attributions de la Haute autorité, notamment dans le domaine de la consécration des principes de transparence et de probité dans la gestion des affaires publiques. Selon le projet de loi, "toute personne physique ou morale peut saisir la Haute autorité de faits de corruption (informations, données ou preuves)" et "pour être recevables, les plaintes ou signalements doivent être adressé(e)s par écrit, être signé(e)s et contenir des éléments sur les faits de corruption et des éléments suffisants sur l'identité de l'auteur du signalement". A travers ce nouveau mode de signalement, il s'agit d'en finir définitivement avec les signalements anonymes, a affirmé M. Tabi. Au titre de ses attributions, l'autorité pourra recevoir et traiter les déclarations de patrimoine et veiller au respect par les administrations publiques, les collectivités locales, les établissements publics et économiques et les associations des dispositifs de transparence et de lutte contre la corruption, voire de s'assurer de l'existence, de l'efficacité et de la mise en œuvre de tels dispositifs. L'autorité peut également, de sa propre initiative ou après sa saisine concernant un manquement aux conditions de probité, prendre plusieurs mesures : adresser des avertissements au concerné et notifier le procureur général compétent en cas de non-déclaration du patrimoine ou de fausse déclaration. Cette autorité œuvrera à la promotion et au renforcement du rôle de la société civile dans la lutte contre la corruption par la mise en place d'un réseau favorisant la transparence dans l'organisation des activités caritatives, religieuses, culturelles et sportives des établissements publics et privés. A noter que la Haute autorité "établira un rapport annuel sur ses activités qu'elle soumettra au Président de la République et informera l'opinion publique de sa teneur, en consécration de la culture de transparence".