Le secrétaire d'Etat chargé de la communauté nationale à l'étranger, Halim Benatallah, a salué dimanche les acteurs de la société civile en France pour le rôle que celle-ci assume "avec courage et ténacité" pour le rétablissement d'une vérité historique sur les massacres perpétrés le 17 octobre 1961 contre des Algériens qui manifestaient pacifiquement pour leur droit à la dignité et la liberté. Le secrétaire d'Etat qui se recueillait à Nanterre devant une plaque commémorative, où des gerbes de fleurs ont été déposées et la Fatiha du Saint Coran lue à la mémoire des nombreux Algériens tués lors de la sanglante répression de la manifestation du 17 octobre 19961, a affirmé que la mémoire des peuples "survit toujours aux méfaits de ceux qui la tourmentent". S'adressant au maire socialiste de Nanterre, Patrick Jarry, sur la place des droits de l'homme, en face de la Préfecture de police, construite sur le site du bidonville "La folie" le plus grand de France où s'entassaient des centaines d'immigrés algériens, M. Benatallah a lancé: "nous sommes ici pour accomplir un devoir de mémoire grâce à vous Monsieur le maire et d'autres hommes de conviction". "Ce message, dira-t-il, se transmettra de génération en génération, et entre gens de paix acquis aux vertus de justice et de liberté des peuples". Ce lieu de recueillement, a-t-il ajouté, "porte les stigmates d'une page déjà sombre de l'entreprise coloniale que l'on veut, tantôt blanchir ou glorifier, tantôt enfouir dans les dédales de la mémoire et des catacombes des archives". "Se souvenir aujourd'hui c'est aussi faire œuvre de travail de mémoire et de vérité", dira à son tour le maire de la municipalité de Nanterre, qui souligne que si cette municipalité a pris la responsabilité en 2003 de poser cette plaque commémorative c'est parce que de nombreuses victimes de ce crime d'Etat venaient de cette ville. Il est temps, dira-t-il, que "l'Etat français reconnaisse officiellement son crime, que le nombre de morts lors de cette manifestation soit véritablement avoué et qu'il ne fasse plus l'objet d'une quelconque polémique". "Nous souhaitons tous que les plus hautes autorités de l'Etat, 50 ans après, reconnaissent enfin officiellement leur responsabilité dans ces massacres à travers un acte qui engage la République", a-t-il souligné. "Le devoir de mémoire et de vérité est d'autant plus important et permettra de développer un véritable vivre ensemble, encouragera et réaffirmera une solidarité et identité citoyenne", a-t-il relevé. M. Jarry a annoncé dans la foulée que le point d'orgue de la commémoration par sa municipalité en 2011 du cinquantenaire de ces massacres sera la future dénomination d'un "Boulevard du 17 octobre" qui se situera entre la place de la croisée et le boulevard des Provinces françaises, une première en France pour évoquer le souvenir de ces événements. Nanterre a connu une forte présence d'Algériens qui s'y établiront en intégrant très vite la dimension des luttes syndicales et politiques, comme en témoigne la création du Parti du peuple algérien (PPA) de Messali Hadj dans un café de Nanterre en 1937. Une séance de travail avait auparavant réuni M. Benatallah et M. Jarry à l'issue de laquelle le secrétaire d'Etat a salué la "leçon d'amitié et de fraternité" qui se distingue ainsi dans la perpétuation de la mémoire de ceux qui se sont sacrifiés. "Nous sommes en train de jeter des passerelles afin que l'histoire soit rétablie dans toute sa vérité", a-t-il dit. Après l'étape de Nanterre, M. Benattalah s'est rendu sur le pont de Clichy à la mairie de Clichy-La Garenne où il a été accueilli par le maire, Gilles Gatoire, également Conseiller municipal des Hauts-de-Seine, accompagné des élus locaux, en présence des membres du mouvement associatif sur fond d'exécution des hymnes nationaux de l'Algérie et de la France. Des dizaines de roses ont été lancées dans la Seine où furent jetés de nombreux Algériens après avoir été torturés par la police du sinistre Papon. Dans son intervention, le secrétaire d'Etat, a rappelé le devoir de mémoire dû à ces événements tragiques longtemps enfouis. Il a remercié au nom du gouvernement algérien l'"acte ainsi posé qui contribue à la réhabilitation de l'histoire". Il a également adressé, au nom du président de la République, Abdelaziz Bouteflika, à la communauté nationale, "les sentiments les plus profonds de compassion et de solidarité" en ce jour douloureux, commémoratif de ces événements tragiques. Intervenant à son tour, M. Gatoire a notamment souligné que des échanges se développent entre les collectivités, entre élus et associations algériens et français et qui "seront déterminants" pour créer "un climat de confiance entre nos deux pays". "Nous allons œuvrer à renforcer la coopération entre la France et l'Algérie pour construire un avenir partagé qui s'appuiera sur cette histoire partagée par nos deux pays", dira, quant à lui, Manuel Allamelou, conseiller municipal délégué à la vie associative, aux maisons de quartier et au devoir de mémoire. A l'issue de cette cérémonie commémorative, une rencontre a réuni M. Benatallah et des diplomates algériens avec le maire dans son bureau. Le secrétaire d'Etat chargé de la communauté nationale à l'étranger a, par ailleurs, rencontré au siège du Centre culturel algérien (CCA) les membres de l'ancienne fédération de France du FLN, qui ont exprimé leurs préoccupations et appelé à un devoir de "reconnaissance" pour tous les sacrifices consentis durant la guerre de libération nationale par la communauté immigrée.