Les subventions accordées tous azimuts représentent une dilapidation des deniers publics, tuent l'économie nationale, selon l'économiste Salah Mouhoubi qui appelle à lancer un débat national à ce sujet. Chérif Bennaceur – Alger (Le Soir) – Invité hier du Forum Algeria Invest, l'économiste et politologue Salah Mouhoubi, dénonçant la prégnance de l'assistanat, a constaté qu'il n'y a aucun secteur ou catégorie sociale qui ne soit subventionné en Algérie. Produits alimentaires de première nécessité avec 300 milliards de dinars annuellement, l'énergie et l'eau, les transports, la santé et les caisses de sécurité sociale, l'agriculture, ces secteurs et d'autres bénéficient d'une manière directe ou indirecte de subventions sans donner réellement de résultats probants. De même, toutes les catégories sociales sont placées sur un pied d'égalité. Censée, selon les pouvoirs publics, garantir la paix sociale et la stabilité du pays, cette politique de subventions tous azimuts et de plus en plus généralisée aboutit pourtant à des résultats contraires, selon Salah Mouhoubi. Cette politique ne garantit pas la paix sociale puisque 9 000 émeutes éclatent annuellement et elle n'assure qu'une stabilité relative, d'autant que les citoyens qui protestent dénoncent davantage la médiocrité des services publics que la famine. Voire cette politique de «facilité» s'avère «suicidaire », «irrationnelle» «inefficace » et «injuste» socialement selon ce politologue, dans la mesure où l'Etat «dépense sans réfléchir, sans demander de contrepartie» et «ne contrôle rien». Comme Salah Mouhoubi observe que l'on n'évalue pas les politiques publiques et on encourage de facto l'informel et l'importation, du fait de cette politique. Or, ces subventions représentent «une dilapidation des deniers publics», cette politique «tue l'économie nationale», dira ce politologue, perplexe sur la capacité à maintenir ce rythme. «Sans pétrole, l'Algérie est un pays PMA (pays moins avancé)», affirme Salah Mouhoubi, déplorant l'absence de bonne gouvernance, le manque d'imagination dans la conduite des affaires économiques. Et l'occasion pour cet économiste d'appeler à lancer un débat national sur cette problématique, à un consensus national. Soit réfléchir sur la question de supprimer les subventions ou de les maintenir pour certaines catégories ou secteurs ciblés en contrepartie de résultats tangibles et efficients. Ce qui permettrait d'encourager la production nationale selon M. Mouhoubi, convaincu que «si l'on impose la vérité des prix, tout le monde sera gagnant». Selon ce politologue, il s'avère nécessaire d'enclencher la réforme économique et que l'Etat s'investisse dans une «feuille de route» sur des décades, selon une vision, des objectifs et une gouvernance revisitée.