De nombreux artisans, activant dans le secteur de la dinanderie, se disent inquiets face à la brusque flambée des prix de la matière première. Déjà que le marché au niveau du nouveau Remblai et celui du centre de l'artisanat du Polygone « battent de l'aile », voilà que les prix de la matière première connaissent, ces derniers temps, une hausse vertigineuse susceptible de mettre en péril le métier. L'on apprend, en effet, que le prix du kilo de cuivre a atteint ces jours-ci la barre des 900 DA. Tous les prix des ustensiles fabriqués avec cette matière, sont, par conséquent, continuellement revus à la hausse. Un dinandier du centre de l'artisanat du Polygone nous dira à ce propos : « Si les prix continuent de grimper de la sorte, on ne voit pas comment on pourrait s'en sortir. Il fut un temps, ajoutera-t-il, quand le métier avait le vent en poupe, où de véritables unités employaient jusqu'à 20 ouvriers. Même les marchands ambulants originaires des wilayas de l'ouest du pays, et qui achetaient en grande quantité du cuivre aux artisans dinandiers du nouveau Remblai, se font rares désormais ». En désespoir de cause, et face à la cherté de la matière première, et à la raréfaction de la clientèle, les artisans avouent multiplier les stratagèmes pour garder les prix à la limite du raisonnable, mais la qualité s'en ressent forcément, comme le fera remarquer un dinandier. Celui-ci nous parlera du processus de fabrication des ustensiles, affirmant qu'aujourd'hui, pour faire face à cette hausse des prix, les artisans jouent sur la rémunération de la main- d'œuvre à bon marché. La sculpture des plateaux de différentes dimensions, allant de 60 cm de diamètre à 1m, se fait désormais, à titre d'exemple, de manière sommaire, d'autant que ces ustensiles de « bataille », selon le jargon des dinandiers nécessitent peu de temps à la confection, contrairement aux ustensiles appelés « Tloue », (faits sur commande) de qualité supérieure, lesquels inondent aujourd'hui le marché. Des professionnels nous expliquent, à ce propos, que les plateaux ou encore les sucriers et autres nébuliseurs ( à l'effet de contenir de l'eau de fleur d'oranger) dont les prix sont encore abordables, sont de qualité douteuse. D'abord, ils présentent un nickelage défaillant qui, au bout d'un certains temps, perd de son éclat, alors que traditionnellement ces objets sont faits pour durer. Ensuite, la décoration de ces objets laisse beaucoup à désirer puisqu'ils présentent un fil de sculpture décousu et des dessins réalisés à la hâte, n'ayant rien à voir avec le doigté des artisans dinandiers. L'on apprend d'ailleurs des gens du métier que les ouvriers qui réalisent ces sculptures sommaires sont payés à la pièce et à moindre coût, sacrifiant donc la qualité à la quantité. Pour d'autres artisans dinandiers, qui ont préféré garder intacte la qualité de leurs produits, la seule manière de s'en sortir est de jouer sur le poids de la matière première. Ainsi, des plateaux de 1 m, vendus sur le marché, ne dépassent pas les 5/10 de millimètre et ne pèsent pas plus de 3 kg, alors que normalement, pour garder toute leur rigidité, ils doivent être réalisés dans du cuivre de 10 mm, au minimum.