Les prix de la matière première, devenue assez rare, ont connu une hausse vertigineuse, et les produits proposés sur le marché sont désormais de piètre qualité. L'inquiétude s'installe ces derniers temps dans le secteur de la dinanderie à Constantine. Déjà que le marché au niveau du nouveau Remblai, plaque tournante du cuivre dans la ville des Ponts, bat de l'aile, voilà que les prix de la matière première connaissent une hausse vertigineuse susceptible de mettre en péril le métier. On apprend, en effet, que le prix du kilogramme de cuivre rouge a atteint ces jours-ci la barre des 2000 DA alors que celui du cuivre jaune avoisine les 650 DA. Autant dire que tous les prix des objets en cuivre sont continuellement revus à la hausse. « Si les prix continuent de grimper de la sorte on ne s'en sortira plus », nous avouera un dinandier qui se rappelle le temps où le métier avait le vent en poupe et où de véritables unités employant jusqu'à 40 ouvriers activaient dans ce secteur. Aujourd'hui, nous dit cet ancien artisan, le nouveau Remblai est orphelin de ses marchands ambulants originaires notamment des wilayas de Médéa, Mascara et même de la région de Boussaâda, venant par dizaines chaque jour, et qui écoulaient de grandes quantités de cuivre aux quatre coins du pays. Et là, c'est l'aveu même des artisans dinandiers qui multiplient les stratagèmes pour garder les prix raisonnables face à la cherté de la matière première et la raréfaction de la clientèle. Mais la qualité s'en ressent forcément comme nous l'affirme un dinandier. Celui-ci nous parlera, en effet, du processus de fabrication des ustensiles en nous affirmant qu'aujourd'hui pour faire face à cette hausse des prix, les artisans jouent sur la rémunération de la main-d'œuvre bon marché. Et de nous expliquer que la sculpture des plateaux de différentes dimensions, allant de 60 cm à un mètre de diamètre, se fait désormais d'une manière sommaire. Etant dit que ces ustensiles de « bataille », selon le jargon des dinandiers, qui ne nécessitent pas trop de temps à l'ouvrage contrairement aux ustensiles appelés « tloue », c'est-à-dire de qualité supérieure, submergent le marché. Des professionnels expliquent à ce propos que les plateaux ou encore les sucriers ou autres « mahbas », dont les prix sont encore abordables sont de piètre qualité. D'abord, ils présentent un nickelage défaillant qui, au bout d'un certain temps, perd son éclat et même la couche de brillance qui le recouvre. Des ustensiles fabriqués à la hâte Ensuite, la décoration de ces ustensiles reste à la limite de l'amateurisme ; ils présentent un fil de sculpture décousu et des dessins effectués à la hâte n'ayant rien à avoir avec le doigté des artisans dinandiers. On saura, à ce sujet, des gens du métier, que les ouvriers qui pratiquent ces sculptures sommaires sont payés à la pièce et à moindre coût, et donc sacrifiant la qualité à la quantité. D'autres artisans dinandiers préfèrent garder intacte la qualité de leurs produits mais jouent sur le poids de la matière première. Ainsi, des plateaux d'un mètre vendus sur le marché ne dépassent pas le 5/10 de millimètre et ne présentent qu'un poids de 3 kg. Ils sont cédés sur la place du nouveau Remblai à 6 000 DA l'unité. Alors que normalement ces plateaux d'un mètre, pour garder toute leur rigidité, doivent être réalisés avec du cuivre de 12 à 16/10 de millimètre. Quand le client arrive à trouver ces plateaux, il doit débourser parfois plus de 20 000 DA et jusqu'à 30 000 DA quand ce même plateau est de très bonne qualité. Les autres plateaux de dimension inférieure suivent la même cadence. Même les objets comme les sucriers ou les mahbas ont vu leurs prix passer du simple au double en quelques années.