Saber et Kawter sont enfin partis. Ou presque. De nuit, de la plage de Boulimat, ils ont démarré dans une large barque à fond plat avec 7 autres clandestins et longent la côte béjaouie, illuminée par les pétroliers américains. Saber s'inquiète du détour quand il apprend une escale à Tichy. Car si Boulimat, petit village tranquille est sur la côte ouest de Béjaïa, Tichy est de l'autre côté, noire de monde en été. On est obligés d'aller chercher ce passager à Tichy ? Il a payé, je suis un voyagiste sérieux, s'offusque Mohand en se resservant un verre de Ricard. La bouteille de Ricard de Mohand est finie. Ivres, trois passagers ont vomi, le mal de mer, selon eux, et deux autres ont tenté de rejoindre l'Europe à la nage, heureusement rattrapés et raisonnés par Mohand. Bon, on va accoster, annonce-t-il. Mohand manœuvre habilement sa barque et échoue tranquillement sur un bout de sable fin. Le rendez-vous n'est pas arrivé. Mohand descend de l'embarcation et fouille la nuit avec une puissante lampe torche. De ce côté de la plage, il n'y a personne. Tout le monde est agglutiné plus haut aux abords de la route ou sur les plages voisines de Capri Tour et de la Grande Terrasse. On démarre dans une demi-heure, annonce Mohand. S'il n'est pas là, tant pis pour lui. D-achou ? Une mobile lumière dans la mer. Un bateau de gardes-côtes patrouille le long de la côte. Inquiet, Mohand observe le hors-bord un bon moment. Il fait le tour de la plage puis revient vers le groupe, qui n'a pas bougé de l'intérieur de la barque. Il y a un cabaret juste-là, fait Mohand en désignant une bâtisse qui se voit de la plage et qui laisse échapper des vagues de musique raï. Il a des chambres et tout ce qu'il faut. On partira à l'aube. C'est comme ça que Saber et Kawter, ainsi que leurs compagnons d'infortune ont débarqué à 1h au Saphir bleu. A suivre…