Du haut de la Sears Tower, on voit la « grandeur » des States. Celle de Chicago surtout. Cet imposant building de 110 étages et d'une hauteur de 442 mètres est le plus haut gratte-ciel des Etats-Unis, loin devant les défuntes tours jumelles. Construit en 1974, il était le plus haut du monde avant que les tours Petronas de Malaisie (1998) et le centre financier Taïpei 101 de Taïwan (2004) ne le surclassent. Chicago (IIlinois, USA) : De notre envoyé spécial Sears-Tower reste la fierté des Chicagoans qui, durant leur rare temps perdu, montent au haut de cette tour pour profiter de la vue qu'elle offre sur l'immense ville au charme exceptionnel. D'une telle position, égale à celle d'un hélico en plein air, on peut bien admirer l'interminable succession d'immeubles, chacun avec son cachet particulier, soigneusement arrangés, entrecoupés par de larges et longues avenues. Pour le visiteur, Sears Tower est une véritable attraction touristique, une curiosité à ne pas rater. Elle reçoit tous les jours des centaines d'« hôtes », qu'ils soient Américains d'autres Etats ou étrangers. Ils viennent tous dans cette tour, pour prendre un peu d'altitude qui leur permet d'avoir une meilleure vue sur le centre-ville de Chicago, qui s'étend le long de la côte du lac Michigan. « Je me sens comme dans un avion qui s'immobilise en plein air. J'ai sous mes yeux l'ensemble du centre-ville et plus. C'est vraiment faire le tour de cette belle ville sans bouger. Je suis impressionné », s'extasie Morgan qui, Américain du Minnesota, est en visite à Chicago pour la première fois. Loin de cette faune de bâtiments, de quartiers résidentiels et de sites industriels, se trouvent de vastes étendues de pays plat dont une grande partie est couverte de champs de blé et de maïs qui s'étendent sur des milliers de kilomètres jusqu'aux pieds des Montagnes Rocheuses. Sans barrières naturelles, comme les montagnes ou les collines, la ville est exposée en plein aux attaques du vent et des tempêtes qui soufflent au travers de ces « prairies », d'où son surnom « windy city » ou la cité du vent, ou venteuse. Chicago est également surnommée la « City of big shoulders (ville aux larges épaules) » ou encore la « Second City (Deuxième Ville) ». Cela parce qu'elle a été reconstruite en 1871 après le fameux grand incendie qui a ravagé la ville : 300 morts,18 000 bâtiments démolis et 100 000 personnes sans abri. Rongée par la corruption et prise en otage par la mafia locale à l'époque de la Prohibition, Chicago, deuxième centre industriel des Etats-Unis a pu, depuis peu, se hisser au rang des villes propres des States, au propre et au figuré. Et elle a réussi la prouesse de se débarrasser des « monstres » qui la hantaient, à l'image du célèbre mafieux d'origine sicilienne, Al Capone, dont simple la prononciation du nom faisait frémir les habitants de la ville. Le retour de Chicago à la vie normale s'est fait grâce au travail de fourmi du maire Richard M. Daley, dont les efforts sont reconnus et appréciés par tous les habitants. « Richard Daley est un brave type. Il a réussi à faire le ménage, à débarrasser la ville de sa rapine, du mal qui la rongeait depuis de longues décennies comme un cancer », soutient Cayden, employé d'une boîte de communication qui souhaite longue vie à ce démocrate de 66 ans. Depuis 2006, Chicago est sortie de la sombre liste des 25 villes américaines les moins sûres et a acquis la réputation d'une belle ville, agréable, propre et très vivante. Sa devise, est « Urbs in Horto (La ville dans un jardin) ». L'ère d'Al Capone oubliée L'ambition du maire est de favoriser la protection de l'environnement tout en maintenant Chicago parmi les métropoles mondiales les plus influentes. Des aménagements d'avenues et de façades d'immeubles sont en cours. La reconstruction de certains vieux buildings est également engagée. Un grand nombre de nouveaux gratte-ciel sortent de terre, manifestant ainsi la prospérité économique de Chicago. La superficie des espaces verts est étendue et le centre de la ville est rendu plus sûr la nuit. Le plus important projet reste celui de Chicago Spire, dont les travaux, entamés 2007, devraient être achevés en 2010. Chicago Spire serait le plus grand gratte-ciel du continent américain avec 150 étages et 609,60 mètres de hauteur. Ainsi, les Chicagoans semblent vouloir embrasser davantage le ciel et prendre plus d'altitude. « J'estime qu'il s'agit d'un projet prometteur qui permettra de maintenir le cachet particulier de la ville, connue grâce à ces tours hautes et ces grands buildings », lâche Callie, une jeune fille afro-américaine vendeuse dans un grand magasin de prêt-à-porter. C'est connu, les Américains aiment se distinguer par tout ce qui est grand. Les Chicagoans aussi. Son aéroport international qui porte le nom de l'aviateur américain Edward O'Hare, mort en 1943 au combat dans le Pacifique, est également l'un des plus grands au monde en matière de trafic. Cet aéroport enregistre une moyenne de 3 800 mouvements d'avions par jour. Loin de cette infrastructure gigantesque et des tours qui donnent le vertige, Chicago brille aussi et surtout pas ses grands centres commerciaux, ses restaurants, ses parcs, ses discothèques, ses clubs musicaux… « Vous savez, ici, ne s'ennuie que celui qui le veut », nous balance un taxieur qui dit être d'origine malienne. Traditionnellement, les genres musicaux diffusés dans les clubs sont blues, country, disco, hip hop, jazz et rock. Aujourd'hui, ces clubs mythiques ont disparu. C'est le cas de Theresa's Lounge, Sylvio's, Smitty's Corner, Florence Lounge, Pepper's Hide Out ou David et Thelma's où se sont produits les glorieux anciens artistes, tels Howling Wolf, Muddy Waters, Elmore James et Hound Dog Taylor. Le Smitty's Corner a été transformé comme beaucoup d'autres en liquor store, le Theresa's (4801 south Indiana), ancien fief de Buddy Guy et Junior Wells est abandonné, le Florence's a complètement brûlé, le Brown Sugarr a été démoli avec toute une partie de la Roosevelt road. Du Blues à la Techno Cela a chagriné les amoureux du blues, du country et du jazz qui trouvent de moins en moins des endroits à leur goût. Mais il reste néanmoins une zone blues très active sur Chicago où les clubs restent nombreux. Il s'agit cette fois-ci du centre et du nord de la ville. Le blues résiste tant bien que mal au rythme de la techno, l'electro, la house, la deep house, la progressive, la drum and bass, l'ambient, la dance ou des musiques groove comme le ragga/dancehal, le r'n'b ou le rap mais aussi le zouk. Il demeure particulier à la région. « C'est ici que le blues a vu le jour. On le chantait devant les maisons entre familles et amis. Il a longtemps porté la tristesse, le désarroi et la pauvreté des gens. Il continue à exister plus qu'ailleurs », commente Bonnie, rencontrée devant un club de blues au centre ville de Chicago. Des milliers de gens passent de longues soirées animées dans ces endroits pleins de vie. Une fois le soleil levé, le centre-ville grouille de monde et prend d'autres couleurs, celles d'une ville commerçante. Si « The Loop » fait partie du quartier financier et touristique principal avec de nombreuses adresses populaires comme le Chicago Theatre ou la patinoire « Skate on State », State Street se distingue par ses boutiques, avec des magasins comme Carson Pirie Scott Company ou encore Marshall Field's dont la première horloge a été installée à l'angle de Washington et State Street le 26 novembre 1887. L'horloge coulée en bronze pèse 3,5 tonnes et s'élève à un peu plus de cinq mètres du sol. Mais on trouve aussi beaucoup d'acheteurs dans « Magnificent Mile » qui, grâce à ses magasins, ses centres d'achat et ses boutiques, est devenue l'artère commerçante la plus prestigieuse. Il y a également le North Pier qui abrite une collection de jeux de réalité virtuelle, un golf miniature, des musées, une troupe de théâtre et des musiciens ambulants. Cela, en plus des nombreux restaurants luxueux et ethniques. A Chicago plus qu'ailleurs, on trouve toutes les nationalités du monde ou presque : ses habitants forment de nombreuses communautés d'origine étrangère. Il y a aussi des centaines de milliers de sans-papiers qui sont venus surtout du Mexique et d'autres pays d'Amérique latine. Comme toutes les villes cosmopolites, Chicago compte un nombre important de quartiers communautaires. Greek town (ville grecque), Little Italy (petite Italie), Chinatown (ville chinoise), Little Saigon (petit Saïgon) et Ukrainian Village (village ukrainien) sont tous situés près du loop du centre-ville et les quartiers allemands, polonais, afro-américains et hispano-américains n'en sont pas loin. Chaque quartier offre un air culturel distinct avec de nombreux magasins et restaurants ethniques. Il y a aussi les quartiers des Noirs Bronzeville et celui des Mexicains qui sont moins développés que les autres. Il y a au moins une soixantaine de secteurs communautaires. Mais l'égalité n'est pas partout. Entre les quartiers qui sont exclusivement habités par les Noirs américains ou les immigrés et les autres, la différence saute aux yeux. Les quartiers noirs sont moins lotis, dégradés et complètement délaissés par endroits. Contrairement aux autres secteurs qui sont merveilleusement entretenus, très branchés et pleins de vie.