1200 kilomètres de côte. Il faut juste 1 mètre pour mettre une embarcation à l'eau. Il y a donc près d'un million de points de départ possibles pour l'Europe. C'est ce qu'ont fait Kawter, Saber et Amel, après avoir longé presque toute la côte pour trouver la porte de sortie de leur malentendu géographique. Ironie du sort, c'est finalement du Club des Pins qu'ils sont partis, là où se décide l'avenir du pays et se programme quotidiennement la fuite quotidienne des Algériens. Sauf qu'en pleine mer, après avoir rempli les réservoirs de leurs jet-skis, ils se sont aperçus que les bidons d'essence que leur a donné Samir étaient des bidons de vodka, celui-ci étant par ailleurs revendeur de vodka. Mais la vodka, c'est bien un carburant, non ? a demandé Kawter, désespérée. Peut-être pour les jet-skis russes mais pas pour les japonais. Il n'y a plus rien à faire. Pendant plus de deux heures, ils ont attendu les gardes-côtes en pleine mer, assis tous les trois sur leurs jet-skis en panne, flottant mollement sur cette maudite Méditerranée. Une patrouille est passée, par hasard, qui cherchait un banc de crevettes pour un anniversaire. Les trois clandestins ont été emmenés au tribunal, un endroit bien terrestre. Jugés parmi les premiers harraga puisque depuis l'été 2008, c'est devenu un délit de vouloir quitter son pays, ils ont écopé d'un mois de prison chacun, soit un Ramadhan complet à l'ombre. Heureusement, avec l'argent prévu pour le voyage, ils ont pu se payer de bons avocats et atténuer les dégâts des eaux. Amel a disparu et on dit qu'elle est partie avec son gardien de prison. Mais Kawter et Saber se sont mariés juste après l'Aïd et se sont rappelés leur folle aventure en riant. Et les dernières paroles du juge, devant qui le couple a décliné son identité : Comment ? Tout ce feuilleton et vous n'étiez même pas mariés ? ! Naâlatou allah aleïkoum ! Fin