Le chef du gouvernement italien, après avoir fait une cour tenace à Maâmmar Khaddafi, s'est félicité, hier, de la signature d'un accord d'amitié et de coopération entre Rome et Tripoli. Berlusconi, suivant les meilleures traditions italiennes en matière d'entreprise de séduction, a fait précéder son vol à Benghazi, par l'envoi, par cargo militaire, d'un présent très précieux destiné à son hôte. Rome De notre correspondante Il s'agit de la restitution de la splendide statue de la Vénus de Cyrène, découverte en Libye en 1913 par des archéologues italiens, qui l'avaient dérobée et portée sur la péninsule. Réclamée par les autorités libyennes depuis 1989, la magnifique statue sans tête rentre ainsi dans sa terre d'origine après un siècle d'exil. L'année dernière, la justice italienne s'était prononcée en faveur de la restitution à la Libye de la statue en marbre blanc qui date du IIe siècle après J.-C. Mais ce qui fait courir Berlusconi en Libye aussi souvent - le 27 juin dernier il avait rencontré Kaddafi à Syrthe - ce n'est pas vraiment son envie de sceller officiellement « l'amitié italo-libyenne » mais plutôt l'urgence de faire face aux arrivées massives de jeunes Africains qui débarquent quotidiennement sur les côtes méridionales de l'Italie et posent un véritable casse-tête aux autorités.Poussé par ses ministres, notamment celui de l'Intérieur, le chef du gouvernement italien s'est donc déplacé, hier, dans la ville de Benghazi (1000 km à l'est de Tripoli), où lors de la rencontre qu'il a eue avec Kaddafi sous la tente dressée à l'occasion par les libyens, il a promis de satisfaire les revendications de Tripoli. Déjà en 2004, lors de son second mandat, Berlusconi avait promis la construction, selon le désir des libyens, d'une autoroute qui longera le littoral libyen et relierait l'Est à l'Ouest de la Jamahiriya. Cette lourde infrastructure coûtera à l'Etat italien 4,6 milliards de dollars. Mais en bon seigneur, le leader italien a promis que son pays déboursera 5 milliards de dollars en 25 ans, soit 200 millions par an, pour financer les investissements italiens en Libye. Le gouvernement italien s'est engagé, également, en vertu de l'accord de coopération signé hier à Benghazi, à promouvoir, en Libye, des campagnes de déminage et de destruction des mines antipersonnel, mais aussi l'octroi de pension d'indemnisation aux victimes de ces engins mortels disséminés sur le sol libyen par l'armée italienne, lors de la période coloniale allant de 1911 à 1943. Mais comme tout mariage de raison, la partie italienne ne compte pas concéder des promesses sans en arracher d'équivalentes à la Libye. Les autorités de Tripoli devront œuvrer à renforcer sensiblement la lutte contre l'immigration clandestine, notamment en bloquant les flux de réfugiés africains qui partent des ports libyens pour la Sicile. Les responsables italiens insistent pour l'intensification des opérations de ratissage maritime, au large de la Méditerranée, par des patrouilles mixtes italo-libyennes. Le corps de la garde des finances italienne procède, depuis un an, date de la signature d'un accord en la matière entre Rome et Tripoli, à la formation et à l'encadrement de militaires de la marine libyenne, dans le but de leur permettre d'agir de manière répressive et efficace contre le mouvement des immigrés sans papiers qui quittent l'Afrique pour l'Europe. L'autre front de partenariat que l'Italie voudrait investir davantage en Libye a trait à l'approvisionnement en hydrocarbures libyens. Et bien que l'Italie importe 33% de ses besoins en gaz et 25% en pétrole de la Libye, le groupe énergétique Eni voudrait renforcer davantage sa présence dans la région et compte sur l'offensive de charme de Berlusconi à Benghazi pour plaider sa cause et vendre ses projets à Kaddafi.