La communauté algérienne installée en France est toujours partagée à la veille de Noël. Faut-il le célébrer ou pas ? Si la plupart optent pour le sapin et y voient une occasion de s'entourer de sa famille et de ses amis, d'autres crient à la perte des valeurs « musulmanes ». Tour d'horizon. Nadia n'arrête pas de rigoler en accrochant ses guirlandes à son impressionnant sapin de Noël que ses deux filles tiennent fermement. « Je le fête chaque année depuis que ma file aînée, Kahina a 4 ans. Je ne le fais pas par conviction religieuse mais plutôt pour faire comme tout le monde. Dehors, tout est illuminé. Autant prolonger cette lumière dans la maison. » Elle a commencé le 10 décembre. « Il fallait sortir le sapin en plastique du placard comme chaque année. Je n'utilise plus de vrai sapin depuis longtemps à cause de la moquette qu'il faut nettoyer tous les jours, et aussi du prix. » Malgré cette économie, la fête revient cher. « Les cadeaux ne sont pas donnés et puis le nouvel an arrive une semaine plus tard », remarque Nadia. Changement de décor. Mahmoud est fier de son beau sapin. Installé dans un pavillon en banlieue parisienne, il se fait un point d'honneur de faire le tour des supermarchés avec son enfant de dix ans pour trouver le plus grand sapin à « un prix raisonnable », précise-t-il. Son immense salon ressemble à une crèche d'église. « Ma femme est française et croyante. Chaque année, nous recevons sa famille et les miens, et on se fait un dîner ‘‘astronomique''. Et rebelote pour l'Aïd. Comme ça, tout le monde est content, et cela nous donne plus d'occasions de faire la fête. Finalement, Noël c'est le Mouloud chez nous, on a juste la dinde au lieu du pigeon à l'haricot blanc. » Mahmoud peut se permettre de ne pas regarder à la dépense, ses cadeaux semblent démesurés. « Je fais la même chose pour l'Aïd », explique modestement le généreux donateur. Smaïl ne fêtera pas Noël : « Je suis contre toutes les fêtes commerciales et religieuses. J'en ai marre qu'on me dicte le jour où je dois m'amuser, faire des cadeaux, manger... Ce soir-là, je ne ferai rien de spécial. Ni sapin ni dinde. Ce sera un jour comme les autres. Je n'ai aucune conviction religieuse. » Samira aussi ne sera pas de la fête le 24 décembre. Elle porte ostensiblement le hidjab dans les rues de Paris, selon ses propres dires. « Je suis musulmane pratiquante. Noël est et demeure une fête chrétienne. Je ne vois pas pourquoi je m'associerais à cette débauche de nourriture et de consommation. Ma religion m'interdit de célébrer d'autres fêtes que celles inscrites dans le Coran. Ce n'est pas parce que je vis en France que je me comporterais comme une chrétienne ! », s'offusque-t-elle presque sous le regard admiratif de son mari. Yacine, lui, ne se pose pas de question. Il ira en Alsace rejoindre ses grands-parents. Il est vrai qu'à six ans, les cadeaux sont toujours magiques et les lumières féeriques. Que ce soit Noël, l'Aïd ou le 1er Mai. Les enfants se moquent des querelles d'adultes.