Le Ramadhan, qui coïncide cette année avec la rentrée scolaire, met les familles à rude épreuve. En somme, c'est une véritable saignée pour les bourses moyennes qui se retrouvent, en ces dix derniers jours du mois de carême, contraintes également de faire face aux dépenses de l'Aïd. Tradition oblige, les enfants sont habitués à s'habiller en neuf durant cette fête. Les porte-monnaie prendront ainsi un autre coup après celui de la rentrée scolaire. A Quahouet Chergui, dans la commune de Bordj EL Bahri, c'est la ruée vers le seul marché qui propose à la vente des effets vestimentaires pour enfants. Dès la rupture du jeûne, un nombre impressionnant de familles s'y rendent en compagnie de leurs enfants. Le marché, qui n'est d'ailleurs nullement approprié pour abriter une quelconque activité commerciale, connaît paradoxalement une forte affluence. Il est en fait situé sur une pente abrupte, de sorte que les étals qui s'y trouvent pendent tels des contrepoids, rendant ainsi les virées des clients noctambules ascensionnelles. Toutefois, le supplice de s'y rendre est vite flétri devant des prix attractifs, plus au moins abordables qu'ailleurs. « J'ai trois enfants que je dois vêtir pour l'Aïd, je pense pouvoir le faire à 6000 ou 7000 DA », souligne un père de famille. Ainsi, des pantalons pour enfants qui sont cédés entre 600 et 1000 DA, en passant par les chaussures, les chemises et les T-shirts dont le prix varie selon la qualité. Les chefs de famille déboursent leur dernier dinar dans ces effets en espérant pouvoir clôturer le mois sans trop de difficultés. Mohamed, la quarantaine et fonctionnaire de son état, dira : « Il est très difficile de faire face à toutes les dépenses pour couvrir les trois événements, à savoir le Ramadhan, la rentrée scolaire et l'Aïd. » Et d'ajouter : « Nous sommes obligés de réduire ces derniers jours, ne seraient-ce que les dépenses de la nourriture. » Le soir venu, et face à ce semblant de marché, vient se greffer de temps à autre, et de manière illicite, un nombre surprenant d'étals qui proposent à la vente toutes sortes d'articles, essentiellement des vêtements pour enfants. Ces habits sont écoulés sur le trottoir sans aucune charge, mais ce n'est pas pour autant que les prix affichés sont abordables. Dans la ville de Bordj EL Kiffan, le contraste est perceptible entre les articles bas de gamme écoulés sur les trottoirs et ceux vendus dans les magasins. On peut dénicher dans cette indescriptible mêlée nocturne, des vêtements, des articles scolaires et même des ustensiles de cuisine. Les prix pratiqués varient selon la qualité des articles, mais ils restent globalement peu abordables pour les défavorisés. Une mère de famille, en compagnie d'une ribambelle d'enfants, dira : « Pour faire face aux besoins de mes enfants, d'une part, et aux obligations de l'aide, de l'autre, j'ai recours aux emprunts. » A El Harrach, et dans un autre registre, même les magasins de fripe sont pris d'assaut. Destinés aux plus démunis, ces derniers profitent de l'occasion pour augmenter les prix, le simple pantalon qui coûtait entre 300 et 500 DA a doublé de prix ; mais malgré cela, l'affluence dans ces lieux commerciaux reste des plus grandes. « Les dépenses de la rentrée scolaire et du Ramadhan ont fini par me mettre à sec, dit un citoyen. Je ne peux donc pas vêtir mes enfants avec du neuf. » Le recours cependant des pères de famille à ce genre de magasins démontre en fait le niveau atteint par un pouvoir d'achat en continuelle érosion.