Copieusement arrosée tout le long de l'année, la ville de Béjaïa a tous les atouts pour être une ville de jardins, de parcs et d'espaces dédiés à la nature. Sa situation géographique de ville côtière sertie de montagnes fait que son climat, humide et tempéré, favorise une végétation luxuriante digne des latitudes tropicales. Il n'y a pas très longtemps, la ville était ceinturée par un tissu végétal dense. L'immense forêt du mont Gouraya se permettait même de tendre quelques tentacules à l'intérieur du tissu urbain. Ce sont les bois des Oliviers, de Bouyeblaten, de Oued Seghir et le Bois Sacré. L'ancienne ville s'arrêtait aux portes de Lekhmiss, une plaine où l'on pratiquait encore l'agriculture et l'élevage. Outre les pâturages, la pépinière et les vergers des Concessions, les routes d'accès à Bejaia étaient de véritables tunnels de platanes, de mûriers et de peupliers. La campagne était aux portes de la ville. Une ville qui, dans ses anciens quartiers, chaque maison avait sa cour où trônait un citronnier, un néflier ou un jasmin. La population qui ne dépassait pas durant les années soixante les 30.000 âmes avait à sa disposition le square Pasteur, le jardin de la place Emir Abdelkader et le square du boulevard Bouaouina. Par la suite, il y eut hasardeusement quelques espaces verts intégrés dans le développement urbain qui a suivi : le parc d'attraction, le square d'El Qods, les deux jardins de la Route de Sétif, les buttes de Rabea, et des poches récupérées telles celle qui borde le cité CNS et celle du rond point à l'intérieur de la cité Iheddaden. Mais les autres gros appendices urbains collés plus tard à la ville ignorent ce qu'est une place publique et encore moins ce qu'est espace vert. Le béton prend jusqu'au dernier millimètre. Le square Pasteur n'a plus cette fière allure que lui conféraient autrefois ses haies de romarin harmonieusement dimensionnées et les cercles étagés de marjolaine et de rosiers délimitant des carrés parcourus de fleurs. Il y a quelque temps, le square a pourtant repris des formes avec notamment l'introduction de nouvelles espèces de plants. Les petits jardins el Qods, Bouaouina, Porte Sarrasine, Route de Sétif ne sont pas plus avantagés. Le nombre de plants à fleurs frôle le zéro. Le Parc d'attraction est envahi par les mauvaises folles. Ces espaces verts ont, pour certains, une agrémentation qui constitue une attraction particulière. Comme la statue du Zéphyr exécutée par Eugène Morion de Cis en 1894 et déplacée de la place Gueydon vers le square Pasteur, les pierres tombales romaines du jardin Emir Abdelkader, la porte Sarrasine édifiée par les hammadites, sise dans le jardin qui en porte le nom ainsi que les oiseaux d'eau du parc d'attraction. Bien évidemment, tout cela exige entretien et mise en valeur. Y a-t-il donc intégration d'un tel attribut dans la conception des nouveaux espaces verts qui se dégagent dans les nouvelles cités ? Malheureusement non, quelques bancs publics, quelques mottes de gazon et le tour est joué. On comprend donc aisément que la fréquentation tombe à sa plus simple expression. Mis à part le jardin de la place Emir Abdelkader qui, par son atmosphère romantique et discrète, attire les couples, les autres espaces deviennent un lieu ou passer le temps pour les personnes âgées. Les petits jardins de la route de Sétif sont presque effacés de la mémoire collective. Que fait la commune pour redonner vie à ces lieux ? Le service des espaces verts dispose, nous dit on, de jardiniers formés sur le tas mais en absence de paysagistes dont la mission est l'agencement attractif des espaces, l'évolution vers des parcs tels que conçus ailleurs ne sera pas pour demain.