Des dizaines d'engins de travaux publics, de soutien logistique ainsi que des moyens d'intervention ont été dépêchés pour les opérations de déblayage. Le convoyage des différents produits se faisait avec l'aide précieuse des sages de la ville qui connaissent la population. Ghardaïa. De notre envoyé spécial Un mois après les inondations meurtrières qui ont endeuillé leur région, les citoyens de la vallée du M'zab tentent de dépasser leur douleur. Les rues et ruelles qui étaient englouties sous des tonnes de boue, de cadavres d'animaux et de carcasses de voitures ont été, pour leur majorité, déblayées. Rideaux levés, les commerces sur les routes principales et ruelles avoisinantes ont retrouvé leur clientèle, alors que la gare routière « grouillait de monde » lors de notre passage. Jeunes militaires, gendarmes, éléments de la protection civile et ouvriers des voiries s'attelaient à soustraire les derniers déchets des ruelles. Munis de pelles, brouettes et balais, ils tentaient d'effacer les stigmates de l'inondation du 1er octobre dernier pour donner un nouveau visage à la ville. « Nous ne savons pas si nous aurions pu nous en sortir sans l'aide précieuse des éléments de l'ANP et des autres corps constitués, comme la Gendarmerie nationale, la Sûreté et la protection civile », a déclaré un citoyen de cette localité. Arme au poing, militaires et gendarmes veillent à la sécurité des biens et des personnes. Ces éléments ont reçu des ordres fermes afin de prévenir et de lutter contre le pillage et la destruction des biens touchés par les inondations. Au niveau de la mosquée de Haï El Ghaba, la palmeraie la plus touchée de la commune de Ghardaïa, de jeunes gendarmes avec pelles et brouettes sont affairés à déblayer ce lieu de culte. Ici, les traces du niveau de l'eau sont visibles à l'œil nu. Une odeur de boue se dégage de ce lieu de culte, alors qu'un mur qui longe la berge de l'oued M'zab a été littéralement rasé. L'apport des éléments de l'ANP « Vous savez, les pluies diluviennes ont charrié des torrents d'eau et on n'a rien pu faire. Ceux qui ont accompli la prière du fedjr ont vite regagné leurs maisons. Heureusement qu'il n'y a pas eu de morts dans cette mosquée », témoigne un habitant, qui ajoute que même l'école coranique située juste à côté a subi de gros dégâts. Les demeures construites tout le long des berges ont été littéralement rasées, sinon sérieusement endommagées, a-t-on constaté. Située à quelque trois kilomètres du chef-lieu de wilaya, cette zone demeure la plus touchée par les crues meurtrières de l'oued M'zab. « Cette palmeraie a été totalement engloutie par les eaux, carrément rasée ! », témoigne un jeune rescapé. « Il y en a qui ont perdu des membres de leurs familles restés engloutis sous les décombres et d'autres ont été emportés par les eaux en furie. C'est le mektoub (la volonté divine). On n'y peut rien. Certains ont été sauvés d'une mort certaine. Ils n'oublieront pas de sitôt cette journée de l'Aïd », a-t-il ajouté, les larmes aux yeux. « Nous avons fait appel à deux bataillons, c'est-à-dire plus de 1100 éléments de l'Armée nationale populaire pour faire face à cette catastrophe naturelle. Nous avons ramené des dizaines d'engins de travaux publics, de soutien logistique et déployé des moyens d'intervention de plusieurs de nos unités avoisinantes ainsi que depuis l'état-major à Alger. Plusieurs sections de l'ANP, dotées de moyens d'intervention, ont été réparties dans les quartiers El Ghaba, Hassi Mesbah, Benganem, Karkoura et Ghardaïa-ville ainsi que dans la zone sinistrée d'El Atteuf », a déclaré le chargé de la communication de la 4e Région militaire, le lieutenant-colonel Hakem Cheikh. Lors d'un point de presse improvisé au siège de la wilaya, cet officier supérieur de l'ANP a ajouté qu'au premier jour de la catastrophe, les unités de la 4e Région militaire ont été mises en état d'alerte. « Nous avons envoyé des camions semi-remorques depuis la ville de Ouargla et les villes environnantes, comme Laghouat et Hassi R'mel, pour évacuer les sinistrés et apporter aide et assistance à la population locale. Des avions militaires de type Hercule C130 et Illiochine ont décollé le même jour de la base aérienne de Boufarik transportant des éléments de la Protection civile, des vivres et des couvertures pour les sinistrés. Sauver des vies humaines et évacuer les blessés en urgence, c'étaient nos priorités ce jour-là », a précisé notre interlocuteur. Il a ajouté que, suivant les ordres de sa hiérarchie, une plate-forme de soutien logistique était installée au stade de Ghardaïa pour déposer les vivres et coordonner la distribution des aides. Notre interlocuteur a indiqué que l'acheminement des vivres depuis les villes avoisinantes et par voie aérienne n'a pas cessé et s'est poursuivi tout au long des journées suivantes. Même le matériel lourd (porte-chars, semi-remorques, bulldozers, grues girafes lumineuses, niveleuses, groupes électrogènes, boulangeries mobiles, etc.) arrivaient au fil des heures depuis le 4e CRTI. « Nous avons même organisé des survols des quartiers touchés par les inondations pour le bureau exécutif de la wilaya afin d'évaluer la situation, pour les officiels qui ont accompagné le chef du gouvernement et même pour les journalistes. Ils ont pu constater l'étendue des dégâts et le travail que nous avons accompli pour sauver des vies humaines et apporter aide et assistance à la population locale. » A propos des boulangeries mobiles, notre interlocuteur a tenu à préciser qu'à la période allant du 6 octobre au 2 novembre, pas moins de 62 660 baguettes de pain ont été confectionnées et distribuées aux habitants de Ghardaïa. « Nous avons même distribué des rations de combat aux journalistes pour leur montrer que nous n'avons pas besoin de notables pour faire nourrir nos éléments. C'est une rumeur et elle est totalement fausse. Nous avons suffisamment de denrées et sommes bien équipés pour ce genre de situation », a expliqué notre interlocuteur. Une virée dans les deux boulangeries mobiles nous a permis de constater le travail accompli par les boulangers. Non loin de ce lieu, des tentes, des couvertures, des lits de camp, ainsi que des tonnes de provisions (sacs de semoule, bouteilles d'eau, huiles, produits d'entretien) sont entassés et bien protégés. « Ces efforts obéissent à une étroite collaboration entre l'armée, les présidents d'APC et la cellule de crise installée par le ministère de l'Intérieur et des Collectivités locales, et les sages de la ville se sont organisés et participent efficacement au convoyage des différents produits, car ils connaissent la population », reconnaît notre interlocuteur. Un peu plus loin, des dizaines de semi-remorques, des tracteurs, des grues et différents engins de travaux publics sont stationnés. « Voyez vous-mêmes ce que nous avons dépêché comme moyens pour venir en aide à la population. L'armée est là pour sauver des vies et nous sommes là pour répondre à tous les besoins. Des dizaines de PCA (personnels civils assimilées) de l'ANP étaient de la partie puisque dépêchées dans ces zones sinistrées en qualité de conducteurs de travaux. » Hai Chahid Rezak, dans la commune d'El Atteuf qui fut totalement isolée, a été reliée à son environnement par un pont de 200 m, érigé grâce à l'intervention de l'armée. Chraa Ali, président de l'association de quartier, nous a accostés. Entouré de quelques habitants de ce douar, il a déclaré : « C'est grâce aux militaires que nous avons pu regagner l'autre rive. Nous sommes restés coupés du monde pendant quatre jours, sans vivres ni électricité. Après leur intervention, ils ont commencé par créer une chaîne humaine afin de nous faire parvenir des sacs de semoule, des bonbonnes de gaz et des fardeaux d'eau minérale. Juste après, ils ont ramené un niveleur, un bulldozer et des engins pour ériger ce pont que vous voyez là », a-t-il reconnu. Sauf que la situation dans ce lieu risque d'empirer s'il n'y a pas une intervention rapide des services de l'hydraulique, de la DTP et de la santé. En effet, avons-nous constaté, des odeurs nauséabondes se dégagent de ces lieux et des mares d'eau noirâtre sont visibles à la surface des eaux de l'oued. Plus de mille gendarmes déployés Les éléments de la Gendarmerie nationale ne sont pas restés spectateurs face à cette catastrophe. Ils ont investi les lieux et occupé le terrain, aux côtés des éléments de l'ANP et des citoyens de la ville, dans le but de sauver des vies humaines et d'apporter aide et assistance aux sinistrés. Le lieutenant-colonel Mokhtar Ben Guedira, commandant du groupement de la Gendarmerie nationale de Ghardaïa, a reconnu que pas moins de 420 éléments ont été déployés, au premier jour des inondations, pour cette mission. Un poste de commandement avancé régional a été installé sous la supervision du commandement régional. Des escadrons et des sections de recherches ont été dépêchés depuis les groupements des villes avoisinantes. Ce sont au total 1012 gendarmes qui ont été dépêchés au niveau des 9 secteurs de la zone sinistrée de Ghardaïa pour différentes tâches, comme le sauvetage et l'assistance avec d'autres éléments de la protection civile et la protection des biens et des personnes contre les vols et les agressions, escorte des dons. La section de recherche s'occupait, quant à elle, des investigations concernant les sinistrés. Notre interlocuteur a affirmé que 44 citoyens ont été sauvés d'une mort certaine dont 6 à Zelfana, 3 sous des décombres à Ghardaïa, 6 à G'rara et 6 autres dans un fourgon qui transportait 18 personnes. Pour le bilan relevant de la juridiction de la Gendarmerie nationale, le chef du groupement de Ghardaïa a fait état de 43 personnes décédées dont 3 disparues. Un ressortissant de nationalité malienne faisait également partie des disparus. 87 personnes ont été grièvement blessées et 8 autres enterrées par leurs parents et proches sans autorisation des autorités locales.