Les premières maladies transmissibles ont commencé à faire leur apparition dans les zones d'Asie du Sud-Est ravagées dimanche dernier par un raz de marée. En effet, le représentant du directeur général de l'OMS, David Nabarro, a déclaré hier : « Il y a de plus en plus d'informations faisant état d'éruption de maladies diarrhéiques en provenance de camps de personnes déplacées au Sri Lanka et en Inde. » Se voulant toutefois rassurant, il ajoute : « Cela ne nous alarme pas car nous l'attendions. Ce qu'il faut faire, c'est s'assurer que nous continuons à distribuer tous les sels de réhydratation et les traitements contre la diarrhée. » Le même responsable a souligné qu'il était trop tôt pour dire si la mobilisation internationale suffira à répondre aux besoins des populations du fait des difficultés d'acheminement des secours, particulièrement dans la province indonésienne d'Aceh (nord de Sumatra), la plus touchée par la catastrophe. En outre, des sources médicales ont indiqué que plusieurs personnes blessées dans le nord de l'île indonésienne de Sumatra souffrent de troubles respiratoires, après leur aspiration de particules comme du sable, lorsqu'elles ont été entraînées par les flots du raz de marée. « De nombreuses victimes souffrent d'affections pulmonaires car elles ont aspiré des particules étrangères. Ces cinq derniers jours, nous avons eu beaucoup de morts à cause de cela », a expliqué le docteur Agoes Kooshartoro, responsable de la Croix-Rouge indonésienne dans la province d'Aceh. Selon l'Unicef, la situation sur le plan sanitaire est « extrêmement sombre dans le nord de Sumatra ». « Les blessures non traitées posent problème. Même bénignes, si elles ne sont pas traitées, les risques de mort sont très élevés », a déclaré John Budd, porte-parole de l'organisation. D'après les spécialistes, les quelque 5 millions de déplacés, selon l'OMS, souvent sans abri, privés de nourriture ou d'eau potable, constituent un foyer pour les maladies. L'OMS, qui a déjà tiré la sonnette d'alarme, souligne que le plus grave danger est désormais lié aux risques d'épidémie à la suite de l'empoisonnement de l'eau par les cadavres et de l'infiltration d'eau de mer dans les puits. Dès jeudi dernier, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a lancé un appel pour une aide de 40 millions de dollars destinée aux besoins sanitaires immédiats de quelque trois à cinq millions de survivants qui manquent de tout. Confiant, M. Nabarro a dit : « Il ne fait pas de doute que cet objectif sera atteint. » La situation était particulièrement dramatique dans le nord de l'île indonésienne de Sumatra, proche de l'épicentre du séisme. Les déplacés s'y comptent en centaines de milliers. Les médicaments pourraient manquer La plupart n'ont pu recevoir d'aide internationale en raison de la coupure des routes et d'une grave pénurie d'essence. « Les corps en putréfaction vont provoquer des maladies comme le choléra, la diarrhée ou la typhoïde si nous n'intervenons pas rapidement », a expliqué jeudi dernier William Carré, de l'ONG française Pompiers sans frontières. Les autres pays touchés, principalement le Sri Lanka, l'Inde et la Thaïlande, sont également concernés par ces problèmes sanitaires. Au Sri Lanka, deux régions posaient les plus gros problèmes : le nord-est de l'île sous contrôle des rebelles tamouls qui se sont plaint de ne pas recevoir d'aide, et l'extrême sud, tout aussi difficile d'accès. L'ambassadeur du Sri Lanka en France, Ananda Goonasekera, a souligné avant-hier à Paris que son pays, l'un des plus touchés par les tsunamis, a besoin en urgence de médicaments, de matériel médical, d'eau potable ainsi que de systèmes de purification d'eau. « Ce dont le Sri Lanka a le plus besoin en urgence, ce sont des médicaments, du matériel médical, des tentes, des couvertures, de l'eau en bouteille, des vêtements ainsi que des pastilles de purification de l'eau. Si ces besoins ne sont pas satisfaits à temps, nous courons le risque d'épidémies dans les zones sinistrées », a appelé Ananda Goonasekera lors d'une conférence de presse. Il a ajouté que le risque de propagation d'épidémies augmentera encore plus le nombre de morts. L'Unicef redoute pour sa part que des millions de personnes supplémentaires meurent d'épidémie si rien n'est fait dans les plus brefs délais pour leur fournir de l'eau potable. L'OMS, par la voix de son représentant à Genève, affirme qu'« il s'agit de la catastrophe naturelle la plus grave qui a touché la région en plusieurs décennies ». L'OMS estime à quelque 300 000 personnes le nombre de blessés, dont une majorité aurait besoin d'interventions chirurgicales. « Entre trois et cinq millions de personnes dans la région sont privées des conditions élémentaires pour rester en vie », déclare l'organisation en mettant en garde contre les risques de propagation d'épidémies. Un seul hôpital fonctionne dans une des zones les plus dévastées, la province indonésienne d'Aceh, privée d'électricité et de carburant. Au Sri Lanka, « la majeure partie des infrastructures de santé publique dans les zones côtières est endommagée » et les unités qui fonctionnent sont débordées. L'aide demandée par l'OMS est prioritairement destinée aux hôpitaux, à la fourniture d'eau potable pour prévenir la dysenterie et d'autres maladies comme la malaria et la dengue qui se propagent dans des zones où subsistent les eaux stagnantes des inondations. « Si les fonds nécessaires ne sont pas mobilisés d'urgence et coordonnés sur place, des maladies pourraient faire autant de morts que la catastrophe même » des raz de marée qui ont ravagé dimanche dernier huit pays d'Asie du Sud-Est et du Sud, a averti David Nabarro. L'OMS a déjà envoyé dans les régions sinistrées des fournitures médicales d'urgence, dont des médicaments, pour soigner plus de 330 000 personnes pendant trois mois. La France a également doublé son aide qui s'élève désormais à 41,3 millions d'euros (soit 56,17 millions de dollars). Ces 20 millions d'euros supplémentaires seront destinés à la prévention des épidémies. Des équipes médicales australiennes étaient, elles, en route pour l'Indonésie. Le numéro un mondial pharmaceutique Pfizer a promis 10 millions de dollars et environ 25 millions sous forme de médicaments.