Fin du cauchemar pour les 4 jeunes ouvriers des Ouadhias, accusés d'« atteinte aux préceptes de l'Islam ». Condamnés en première instance le 30 septembre à 3 ans d'emprisonnement et à 100 000 DA d'amende, ils ont été libérés hier soir du pénitencier d'El Harrach (Alger), après 58 jours de détention. La cour d'Alger a rendu, au cours de la journée, son verdict dans le procès en appel opposant le ministère public aux 4 prévenus. Un verdict qualifié par l'un des avocats de la défense d'« indulgent », contrairement à celui rendu par le tribunal de Bir Mourad Raïs. Celui-ci a prononcé l'une des peines les plus lourdes prévues par l'article 144 bis (alinéa 2) du code pénal qui punit toute personne coupable d'atteinte à l'Islam d'une peine de 3 à 5 ans ferme et de 50 000 à 100 000 DA d'amende. La présidente de la 5e chambre correctionnelle, Mme Bouamrane, désavoue le tribunal de Bir Mourad Raïs et prononce la relaxe pour S. Saïd (22 ans) et condamne les trois autres, Mustapha T., Farid M. et Hocine T. (le plus âgé a 25 ans) à deux mois de prison avec sursis, assortis d'une amende de 1000 DA. « Ce verdict consacre la victoire du droit », déclare euphorique l'avocat Iddir Mohamed du barreau de Tizi Ouzou. Rappelons que les accusés ont été arrêtés le 21 septembre dernier sur l'avenue Littoral dans le quartier « chic » de Hydra, sur les hauteurs d'Alger, alors qu'ils s'apprêtaient à rejoindre leur lieu de travail. Les tâcherons ont été surpris par une patrouille de police en train de… griller une cigarette en plein Ramadhan, mois de jeûne musulman. Ils ont été déférés, sous la procédure du flagrant délit, devant le parquet. Une semaine plus tard, le 30 septembre, sans l'assistance d'un avocat, ils sont condamnés au bagne. Dans un communiqué rendu public, le collectif SOS Libertés, initiateur en mars 2008 de l'appel à la tolérance et au respect des libertés, qui a rassemblé plus de 2500 signataires, s'insurge contre « les dérives policières et les procès d'opinion qui piétinent la légalité républicaine pour imposer l'ordre moral d'un autre âge » et réaffirme sa « solidarité avec toutes les victimes de l'arbitraire d'une justice sous influence ». « Alors que l'humanité s'apprête à célébrer, le 10 décembre prochain, le 60e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'homme, l'Algérie se distingue une fois de plus par l'intolérance et l'extrémisme officiel visant à régenter les convictions du citoyen », lit-on dans déclaration du collectif, qui dénonce « un procès en sorcellerie dicté par des considérations extrajudiciaires » et qui « constitue un outrage intolérable à la liberté de conscience (et) viole les principes fondamentaux du droit, les conventions internationales ratifiées par l'Algérie et les lois de la République ». Le collectif SOS Libertés appelle les partisans des libertés et des droits de l'homme à « la vigilance citoyenne pour établir la primauté du droit et résister ainsi aux menaces de l'intolérance, de l'archaïsme et de la régression ».