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Allaitez au nom de Dieu, de la loi et des droits de l'homme(1)
Publié dans El Watan le 06 - 12 - 2008

Comment une sécrétion biologique aussi banale dans sa composition puisse asseoir une autre forme d'adoption, créer des obligations tant du côté de la mère que du père ... Ne serait-ce que par ces intrusions dans les rapports humains, le droit se trouve interpellé.
Doté d'une seule syllabe, le lait c'est d'abord un mot délicieux, expressif par nature de l'idée et de l'objet qu'on lui fait représenter. Plusieurs expressions sont imagées autour de lui. Premier aliment de la vie extra utérine et seule nourriture produite par le corps humain, le lait est un liquide chargé de sens et de symbole. Incarnant la pureté par sa couleur blanche, liquoreux par son aspect, il est perceptible dans la réalité physiologique dans un mélange de protéines, de lipides et de glucides. Il est fluide, chaud et appétissant, souvent associé, dans Livres monothéistes, au miel. Il protège de toutes sortes d'infections et rendrait même - semble-t-il - les enfants plus intelligents. Ainsi, il fait passer le meilleur. Mais le pire aussi lorsqu'il devient le vecteur de la maladie. Avec le sang et le sperme, le lait est une des grandes humeurs fondamentales du corps humain. Comme tel, il est toujours chargé d'une haute valeur symbolique. Dans la mythologie antique, il incarne la puissance et la vie et est représenté comme ayant un pouvoir mystérieux. Il est le canal par lequel passent les qualités de la mère ou l'animal nourricier (Rémus et Romulus, Jupiter ... ). A l'aube de l'Islam, on recherchait désespérément l'une des épouses du Prophète comme première nourrice dont le lait est appelé « le lait des descendants du Prophète » (Ilban shurfâ). « Ayez des généalogies une connaissance qui vous permette d'être attentif aux liens de parenté par le sang », avait dit le Prophète Mohammed (QSSSL). Aujourd'hui, le lait maternel a investi le champ des sciences sociales et humaines. Le thème a fait l'objet de nombreuses recherches en socio-anthropologie, en psychologie, en psychanalyse, en médecine, en psychopathologie et même en sciences économiques. Cependant, dans le domaine du droit, il demeure quelque peu « insoumis » et rebelle à la mise en forme juridique.
Le lait maternel en tant que réalité « chosifiable » se trouve à l'intersection de plusieurs disciplines juridiques. Il engage la mère avec la création à sa charge d'obligations, il est évoqué dans les interdits matrimoniaux, il fait l'objet de conventions internationales, il acquiert une valeur marchande et oppose les intérêts mercantiles des multinationales avec ceux humanitaires des organisations internationales. Le lait maternel bouleverse les systèmes juridiques de la parenté en créant un rapport filial en dehors de tout lien de consanguinité. Il met en jeu le corps de la femme et ressuscite le débat sur le féminisme ... Tant de questions qui ne laissent pas le droit indifférent à son égard.
Droit international
Nous ne pouvons parler d'un droit international proprement dit de l'allaitement. Toujours est-il, il existe assez d'intérêts et suffisamment de textes pour que le thème occupe une place de choix dans la littérature du droit international. L'allaitement maternel acquiert ses lettres de noblesse grâce à la mobilisation et aux efforts des organisations onusiennes (Unicef, OMS et Unesco) et à la société civile internationale. Le mouvement des ONG a été très productif en actions et en littérature. Les instruments juridiques, les documents techniques, les initiatives volontaires, les stratégies proposées et notamment les codes de bonne conduite ont été d'un grand apport. Derrière l'implication des instances internationales rattachées à l'ONU, il y a eu tout un travail de forcing mené par la société civile internationale, notamment l'IFBAN et la Leche League. Non seulement ils ont exercé des pressions considérables au niveau international en divulguant les abus des multinationales du lait en poudre, en participant à des consultations et par des boycotts à la consommation, mais ils ont aussi encouragé l'adoption de lois, la mise en place de mécanismes de contrôle, la formation aux questions de santé et exercé une surveillance aux niveaux international et local. Le réseau international des groupes d'action pour l'alimentation infantile (IFBAN, International Baby Food Action Network) est le fer de lance de ce mouvement citoyen mondial. Créé en 1979, et très actif notamment en Amérique du nord, son objectif consiste à mettre fin aux abus promotionnels dans le domaine de l'alimentation infantile et diminuer la mortalité des nourrissons. Le réseau a pris sur lui la mission d'évaluer régulièrement le respect du Code international de commercialisation des substituts du lait maternel.
Allaiter, un droit de l'homme
Les droits de l'homme sont entendus comme les prérogatives et facultés préexistantes à la loi et aux institutions, assurant sans discrimination à la personne sa liberté et sa dignité humaines. Evoquer l'allaitement en termes de droit de l'homme ou en termes de liberté publique, amènerait à appréhender l'allaitement selon trois cas de figure :
Pour le nourrisson, il peut se présenter comme un droit de l'homme (le droit à être allaité).
Pour la mère, la question peut être posée en termes de droit de l'homme également (le droit d'allaiter) mais aussi en termes de liberté publique, émanation du droit de disposer de son corps.
Enfin, si l'allaitement du bébé s'installe dans la théorie des droits de l'enfant, il faut cependant rechercher quel type d'obligation (juridique ou morale) il crée à la charge de la mère. Situer l'allaitement parmi les droits de l'homme conduirait à l'introduire dans le couloir du droit à l'alimentation. C'est à notre sens, la seule voie pour le définir ainsi. Mais l'allaitement maternel serait-il un jour reconnu comme un droit de l'homme ? Telle est l'ambition de l'OMS et l'Unicef. Comme tel, il sera plus protégé, plus encouragé et mieux promu. Pourquoi un droit de l'homme ? Pour la simple raison que la vie du nourrisson en dépend. Dès lors qu'il est allaité par sa mère, les chances de survie d'un enfant y sont en effet multipliées par trois. Le droit international des droits de l'homme ne retient pas l'existence d'un droit d'allaiter ou à être allaité. Cependant, il peut se présenter ainsi de part son lien intrinsèque avec la vie, à la santé et au bien-être, qui sont autant de droits sociaux reconnus par plusieurs instruments internationaux. L'enfant bénéficie dès la naissance d'un droit naturel au lait maternel et aux soins de sa mère. Le droit à l'alimentation peut être envisagé comme faisant partie de cette deuxième génération des droits de l'homme, doté d'une nature différente, destiné à assurer au citoyen des prestations concrètes (la satisfaction de besoins réels). De fait, il ne suppose plus la simple abstention de l'Etat (comme c'est la cas pour une bonne partie de droits), mais, au contraire, il commande son intervention active. Ce droit marque le passage du droit « de » (liberté) au droit « à » (créance), en donnant au citoyen, non pas le seul pouvoir de faire, mais encore celui d'exiger, conféré par la possession d'une créance sur l'Etat. Le lait maternel fait partie de l'alimentation. Dans cette logique de base, le droit à être allaité et celui d'allaiter devraient être traités comme une partie intégrante du droit à l'alimentation lequel est directement rattaché à la philosophie des droits de l'homme. Ils peuvent d'ailleurs être présentés comme la mise en œuvre du principe énoncé depuis l'adoption de la Déclaration universelle des droits de l'homme (1948) : « Toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille, notamment par l'alimentation ». Si les définitions des droits humains - dans la perspective juridique - mettent en évidence les revendications de personnes contre l'Etat ou contre des organes semblables à l'Etat, dans l'allaitement maternel avec le rapport qu'il crée avec la mère, la situation se trouve bouleversée et les définitions évoquées plus haut ne pourraient s'appliquer. Mais il faut attendre la Déclaration internationale sur les droits des enfants pour que l'allaitement proprement dit soit réhabilité, même de manière timide. C'est la première amorce de ce que nous pouvons appeler un droit en gestation. Cette consécration juridique en devenir est le résultat du constat que l'allaitement au sein reste un moyen inégalé de donner aux nourrissons l'aliment idéal pour une croissance et un développement sains de l'enfant. L'article 24 de la Déclaration dispose en effet que :
1. Les Etats parties reconnaissent le droit de l'enfant de jouir du meilleur état de santé possible et de bénificier de services médicaux et de rééducation. Ils s'efforcent de garantir qu'aucun enfant ne soit privé du droit d'avoir accès à ces services.
2. Les Etats parties s'efforcent d'assurer la réalisation intégrale du droit susmentionné et en particulier, prennent les mesures appropriées pour : (...) - faire en sorte que tous les groupes de la société, en particulier les parents et les enfants, reçoivent une information sur la santé et la nutrition de l'enfant, les avantages de l'allaitement au sein, l'hygiène et la salubrité de l'environnement et la prévention des accidents, et bénéficient d'une aide leur permettant de mettre à profit cette information ...
Les obligations qui pèsent sur l'Etat consistent donc à permettre la jouissance de ce droit et de ne pas entraver son exercice. Cela consiste concrètement à mettre en pratique tous les programmes nationaux en faveur de la PMI, à encourager matériellement l'allaitement et prévoir les conditions tangibles pour son accomplissement telles la réservation d'espaces pour sa pratique dans les établissements publics et privés (restaurants, cafétérias, cinémas, théâtres ... ), ordonner aux opérateurs économiques de respecter la pause d'allaitement avec tout le confort que cela nécessite ... Si l'allaitement peut être revendiqué en termes d'un droit de l'homme au profit du nourrisson, ce même droit peut être revendiqué en faveur de la mère. La liberté d'allaiter se transforme en droit dont sa revendication est à la pointe d'un nouveau combat féministe.
Allaiter : une liberté publique
Concept philosophique, la notion de liberté est entendue comme le droit à ne pas subir de contraintes sociales excessives au regard de la personnalité. Elle consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui : ainsi, l'exercice des droits naturels de chaque homme n'a de bornes que celles qui assurent aux autres membres de la société la jouissance de ces mêmes droits. Ces bornes ne peuvent être déterminées que par la loi. On peut admettre que l'allaitement fasse partie des libertés. Mais le contenu et la portée de cette liberté restent à éclaircir. Que recouvre-t-elle, de quelle garantie bénéficie-t-elle ? Les aspects de la liberté d'allaiter sont a priori multiples ; droit d'allaiter mais aussi le droit de le refuser, le droit d'en choisir le mode (au sein, tire-lait, biberon ... ) rétribué ou non ... Or, tous les aspects n'ont pas le même statut juridique. Le droit d'allaiter n'est pas garanti sous la forme d'un « droit subjectif ». Ce droit n'a pas pour contrepartie le droit pour la mère de respecter une obligation (créance). Mieux, il n'existe pas d'obligation pour l'Etat de garantir les possibilités pour la mère d'allaiter, et puis, on ne voit guère comment l'Etat ou la société puissent proclamer un véritable droit à l'allaitement en tant que droit créance. C'est pour ces raisons qu'on ne peut parler pour le moment de liberté « publique », car ce terme désigne la liberté en tant qu'elle est reconnue et le cas échéant organisée ou aménagée. Le qualificatif « public » ne doit pas s'interpréter dans l'opposition à « privé », mais comme renvoyant à l'existence d'une intervention étatique, donc publique, consacrant la liberté. Les libertés publiques pour reprendre le Doyen Rivero, seraient donc « des pouvoirs d'auto-détermination consacrées par le droit positif ». Si le droit d'allaiter serait appréhendé comme une liberté, il aurait le même régime juridique que les autres activités humaines faisant l'objet de libertés (liberté du culte, liberté d'association, liberté de réunion ... ). Or, cette liberté n'est proclamée par aucun texte. Elle apparaît seulement comme le corollaire d'autres libertés telle que la liberté de disposer de son corps. En effet, l'idée de faire découler la liberté d'allaiter du principe de la libre disposition de soi, donc, de son corps, peut faire son chemin. C'est du moins de ce principe que les féministes l'ont réclamé. Toujours est-il, le fondement reste juridiquement discutable, car le principe de la libre disposition de son corps n'est lui-même reconnu par aucun texte de droit positif. Du plus, il demeure borné de tous côtés ; par le principe de l'indisponibilité du corps humain, par la sacralisation de la vie, par le respect de la dignité humaine par les bonnes mœurs ... Pourquoi un « droit d'allaiter » ? La question est posée en Occident, comme étant celle d'un droit pour les femmes de choisir librement entre allaitement et non allaitement, c'est du moins la présentation que fait une certaine littérature. Pour Martine Herzog Evans, la question ne devrait pas se poser en ces termes, ni sur le plan juridique ni sur le plan psychosocial. Aucune pression n'est jamais exercée sur la décision de ne pas allaiter ou de sevrer précocement. Les mères qui n'allaitent pas sont non seulement soutenues dans leur décision par l'absence d'interdiction ou de limitation, sur le plan juridique, mais encore par le fait que le modèle social ambiant est le biberon. « Si le droit d'allaiter pourrait faire sans dommage l'objet d'une protection législative, le droit à l'être ne le pourrait certainement pas, (ce) qui conduirait à imposer nécessairement aux mères d'allaiter. Une telle disposition constituerait d'ailleurs sans doute une atteinte aux libertés individuelles et à des normes supérieures ». Dans l'histoire du féminisme occidentale en général et français en particulier, nous rencontrons deux tendances qui s'entrechoquent. La première dénie aux femmes le droit d'allaiter au titre de l'émancipation et de l'égalitarisme, la seconde le revendique et milite pour que la loi l'entérine. Un même geste est perçu selon deux approches ; l'allaitement serait une liberté tout comme le serait le non allaitement. Le mouvement féministe « égalitariste » représente les femmes donnant le sein comme ayant des tendances plus conservatrices, voire rétrogrades. L'assimilation de la femme aux seins tombants aux mammifères n'est pas loin. Comme l'enfantement, l'allaitement constitue une épreuve où se transforme la personnalité de la femme, à la fois par des bouleversements physiologiques, par des réactions instinctives et animales. Le féminisme refuse de voir dans le lien mère-enfant une relation biologique, vitale et protectrice. Ne pas procréer du tout signifie alors l'affirmation sociale absolue de l'autonomie des femmes et un signe d'égalité avec les hommes. Pour échapper à la « condition mammifère », le mouvement égalitariste contemporain voit dans l'allaitement les vestiges de l'animalité chez l'homme. Corroborant cette thèse, une partie de la psychanalyse décrypte cette phobie de voir le sein tombant comme les restes d'une animalité enfouie. L'auteur de L'Adieu au corps (Métailié, 1999) a écrit à ce propos qu'« à l'heure des ordinateurs, les femmes continuent de nourrir leurs enfants comme il y a des millions d'années, et cela nous déçoit terriblement. L'image du sein maternel nous renvoie à l'humilité de nos origines et à la précarité de notre existence, éminemment organique, évidemment animale. Pour beaucoup, c'est insupportable ». S'inscrivant aux antipodes du premier, le mouvement « lactiviste » dans une forme de féminisme actif, ne considère pas la maternité comme une calamité. Au contraire, être avec un corps de femme avec toutes les fonctions biologiques, est une joie et une fierté qui doivent être assumées. « C'est le corps qui est heureux quand le lait monte dans les seins comme une sève vivace, c'est le corps qui est heureux quand le bébé tète » (Annie Leclerc in. Parole de femme).
Allaiter au nom d'Allah
Sur l'allaitement, plusieurs versets du Coran ainsi que plusieurs hadith-s en parlent. Son étude à l'intérieur du droit musulman témoigne d'une obéissance sans faille au fait religieux. Nous sommes donc dans un domaine inviolable, qui s'oppose par définition au profane, c'està-dire « hors du temple ». Les juristes classiques possèdent une solide tradition doctrinale fondée sur le Coran et la Sunna, ce qui nous autorise à dire que sur certains points, tels que la qualification de l'obligation morale ou juridique de la mère allaitante, les anciens moujtahidine-s avaient déjà une nette avance sur les théories civilistes et publicistes actuelles, développées par les Occidentaux dans les ouvrages tant de droit civil que des libertés publiques. L'allaitement est toujours étudié dans les ouvrages du fiqh juste avant ou après l'obligation alimentaire entre proches parents. Il est traité à partir de deux questionnements sur lesquels les Ecoles du droit ne sont jamais tombées d'accord ; sa nature (obligation juridique ou religieuse) et sa contrepartie, c'est-à-dire la rétribution due à la mère pour son allaitement. S'agissant de la femme mariée, en revanche, il n' y a en principe aucune contrainte juridique pour l'allaitement. L'obligation alimentaire n'incombe nullement à l'épouse. L'Islam envisage la femme mariée, comme un être indépendant qui a le droit de disposer de ses biens et de ses revenus sans avoir à en rendre compte à qui que soit (père, mari, ou quelqu'un d'autre)Le mari a la charge d'entretenir sa femme, ses enfants et le foyer, ce qui relève de ses responsabilités. Du point de vue économique et financier, c'est le mari qui dépense toujours. Si les hommes peuvènt se prévaloir de la qiwama dans leurs rapports avec leurs femmes, c'est bien justement dans cet aspect que cette prérogative doit éventuellement s'exprimer. Au Maghreb réputé malékite dans son ensemble, ce n'est pas toujours le rigorisme de Cheikh Kh'lil qui fait autorité. L'article 54 insère au milieu d'un bouquet d'obligations à caractère moral l'obligation d'allaiter « au sein pour la mère si possible ». De plus, le juge marocain, statuant sur les cas de divorce, décide souvent de la nafaqa (qu'il chiffre à 3000 dirhams par mois) séparément de l'allaitement (600 dirhams mensuellement). Quant au code tunisien promulgué le 13 août 1956, il se borne dans son article 48 à rappeler l'enseignement traditionnel malékite sur la question. Il prévoit les frais d'allaitement mais dans une formulation pour le moins confuse, il stipule : « En cas d'empêchement de la mère, le père est tenu de pourvoir aux frais de l'allaitement conformément aux us et coutumes ». En Algérie, l'allaitement était prévu au deuxième paragraphe de l'article 39 du chapitre IV du code de la famille consacré aux « droits et obligations des deux conjoints ». Il est écrit : « L'épouse est tenue d'allaiter sa progéniture si elle est en mesure de le faire ... ». Aujourd'hui, cette disposition a disparu à la faveur du dernier amendement de 2005. Il ne s'agit donc plus d'une obligation. Ce qui constitue malheureusement un recul monumental.
Note de renvoi :
1) Cet article est tirée d'un ouvrage Normes lactées qui ne trouve pas encore d'éditeur. Pourtant, un organisme national « Agence Nationale pourle Développement de la Recherche Universitaire » existe et dont le budget est essentiellement dédié à la valorisation de ce type de travaux. Le manuscrit lui a été transmis et aucune réponse n'a été notifiée à l'auteur depuis huit 8 mois. L'auteur de ces lignes profite de ces colonnes pour dénoncer publiquement l'attitude des « éditeurs-imprimeurs » publics et privés qui exigent des écrivains et autres essayistes une participation financière exorbitantes.


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