La saison hivernale est synonyme de cauchemar pour la population de Béni Amrane. En l'absence d'un plan d'urbanisme et d'aménagement du territoire dans une ville qui n'arrive pas à suivre le développement, à l'instar des autres communes plus récentes, Béni Amrane se noie dans des problèmes inextricables. Dès les premiers instants de pluie, les artères de la ville se transforment en oueds. Le boulevard Saïd Ouzir, principale artère de la ville, n' y échappe pas et se retrouve complètement inondé par les eaux. Les quelques avaloirs et caniveaux qui sont encore opérationnels n'arrivent plus à absorber la quantité considérable des eaux boueuses qui se déversent dans la ville, charriant toutes sortes de déchets à partir de la montagne et autres quartiers surplombant le centre-ville. « Lorsque je traverse la rue, une image me revient à l'esprit. Celle du passé lointain où nous habitions encore la campagne, lorsque pour venir en ville nous étions obligés de traverser la rivière, car le pont n'était pas encore construit », ironise un quinquagénaire. Le même constat amer peut être facilement établi dans les autres quartiers de la ville. A la cité Une (01) par exemple, où la circulation est très intense, vu qu'elle donne accès à la mairie, la poste, l'école Saïd Chaâlal, la mosquée, les arrêts de bus (étant donné qu'il n'y a pas une gare routière à Béni Amrane) et le marché, la rue devient un véritable marécage, dès qu'il se met à pleuvoir. Aussi les commerces installés au centre-ville se trouvent exposés aux aléas du climat. Locataires pour l'écrasante majorité, les commerçants ne peuvent pas effectuer de grands travaux, se contentant seulement des petites bricoles qui s'avèrent infructueuses, vu qu'elles n'empêchent pas complètement les eaux de pénétrer dans les bâtisses. Au marché quotidien, la boue règne. Le peu de gens qui osent s'y aventurer doivent être bien armés et faire très attention. Les baraques en tôles transforment cet endroit en un bidonville et donnent un aspect regrettable à la ville. « Elles seront prochainement rasées pour laisser place à un marché couvert », nous dit-on à l'APC. Mais le projet est seulement au stade de proposition. Sa réalisation n'est pas pour demain, car il nécessite une déviation complète de la route. Même en ville, la circulation piétonne ou automobile est bloquée. L'ouverture qui donnait sur l'autoroute en passant près de la brigade de la gendarmerie est fermée définitivement, après la dégradation de l'état de sécurité dans la région. L'hiver perturbe aussi la frange des étudiants. Car ces derniers et les autres personnes retardataires, à cause de la lenteur de la circulation, trouvent des difficultés à rentrer chez eux. La tombée de la nuit en ce mois de froid à une heure avancée de la journée pousse les transporteurs à aller se reposer prématurément, au moment même où certains étudiants sont encore en cours. Le transport leur est assuré jusqu'au chef-lieu de la commune ; ils doivent se débrouiller pour aller chacun dans son village. Ils sont contraints de faire le chemin à pied dans l'obscurité et le mauvais temps. C'est plus pénible encore pour les filles. Mais, « la quête du savoir défie tous les obstacles et inconvénients », nous a répondu une étudiante concernant les dangers qui les guettent. En attendant le printemps, les Béni Amraniens n'ont qu'à prendre leur mal en patience et croiser les doigts pour que rien de grave n'arrive.