L'ampleur de la corruption contenue dans ces inculpations est stupéfiante », a commenté le procureur Patrick Fitzgerald. Le gouverneur de l'Illinois, Rod Blagojevich, a commis l'erreur de sa vie, celle qui lui coûte déjà son poste pour une histoire de sous. Ses jours sont donc comptés à la tête de cet Etat, sur lequel les projecteurs sont encore braqués, pour avoir donné au pays son 44e Président. Un Président qui doit remettre son mandat de sénateur. Et c'est au gouverneur qu'il doit le faire, et ce dernier peut en disposer comme il veut, sauf le monnayer. C'est ce qu'il a fait, et cela lui a valu une arrestation, mardi. Un scandale « stupéfiant » de corruption qui éclabousse de nouveau cet Etat du Nord. Le gouverneur démocrate, 51 ans, et son directeur de cabinet, John Harris, 46 ans, qui ont été inculpés de tentative de fraude et de corruption, sont également accusés d'avoir menacé de suspendre l'aide de l'Etat de l'Illinois au groupe de presse du Chicago Tribune afin de « provoquer une purge des éditorialistes du journal », selon un communiqué du bureau du procureur. M. Blagojevich, qui risque jusqu'à 30 ans de prison, a été libéré en échange d'une caution de 4 500 dollars. Son bureau n'a commenté ni les accusations ni les appels à la démission dont il fait l'objet, indiquant uniquement que les allégations à son encontre « n'avaient aucun effet sur les services, les tâches ou le rôle de l'Etat ». Selon certaines informations, M. Blagojevich aurait rejeté les appels à la démission ou à un retrait temporaire de ses fonctions venant de parlementaires de l'Etat, qui pourraient entamer rapidement une procédure de destitution. Barack Obama s'est dit « attristé et interloqué » en apprenant cette affaire, précisant au cours d'un point de presse, qu'il n'avait pas eu de contact avec le gouverneur ni avec son bureau. « L'ampleur de la corruption contenue dans ces inculpations est stupéfiante », a commenté le procureur, Patrick Fitzgerald. Ces inculpations « stipulent que Blagojevich qui a mis une pancarte ‘'A vendre'' sur la nomination d'un sénateur des Etats-Unis, s'est impliqué personnellement dans une pratique de pots-de-vin avec la précipitation d'un vendeur qui doit atteindre son objectif annuel, et a utilisé son bureau de façon illicite pour tenter de bâillonner des voix d'éditorialistes critiques », relève le communiqué. Plusieurs sénateurs démocrates influents ont appelé à une élection spéciale pour nommer le sénateur qui remplacera Barack Obama. « Il est clair que quiconque serait nommé au Sénat par le gouverneur Blagojevich serait à tort ou à raison entaché d'illégitimité. Un processus différent doit être choisi pour la nomination d'un nouveau sénateur », écrit dans un communiqué le chef de la majorité démocrate au Sénat, Harry Reid. Rod Blagojevich a été confondu, par des écoutes autorisées par la justice, de discussions portant sur les bénéfices qu'il pourrait tirer du fait que c'est au gouverneur qu'il revient de nommer un sénateur américain quand un siège est vacant. Selon l'acte d'accusation de 76 pages, au lendemain de l'élection de Barack Obama à la Maison-Blanche, Blagojevich déclarait à un interlocuteur inconnu : « J'ai ce pouvoir et c'est de l'or (juron) et je ne vais pas l'abandonner pour rien (juron). (...) Je peux me parachuter à ce siège. » Il aurait évoqué plusieurs options : recevoir un salaire substantiel en travaillant pour un syndicat ou une fondation caritative, placer sa femme dans des conseils d'administration où elle pourrait être payée quelque 150 000 dollars par an, occuper un poste d'ambassadeur. M. Blagojevich avait été élu en 2003, sur la promesse de nettoyer la corruption qui avait entouré son prédécesseur, le républicain George Ryan, qui purge une peine de 6 ans et demi de prison pour corruption. Mais il a été rapidement impliqué dans de nouveaux scandales. Un de ses proches, Tony Rezko, un homme d'affaires également considéré comme un ancien proche de Barack Obama, a été reconnu coupable en juin de fraude, blanchiment d'argent et corruption. M. Blagojevich est aussi inculpé pour avoir comploté avec Rezko afin d'obtenir des bénéfices financiers pour lui-même et sa famille en échange de contrats ou de nominations dans l'Illinois. Plus dure est donc la chute de ce personnage, mais qu'en sera-t-il du phénomène de la corruption ?