Le chef-lieu de wilaya, Mila, est une cité qui traîne moult paradoxes. Est symptomatique à cet égard, le commerce informel qui a transformé le visage de la « capitale de la wilaya » en un vaste dépotoir. « Souk trabendo », comme on se plait à le dénommer localement, ce marché bihebdomadaire (chaque samedi et mardi), est un immense bazar florissant en plein centre-ville de Mila, mais qui n'empoisonne pas moins la vie et le quotidien des riverains grâce, faut-il le rappeler, à la bénédiction des pouvoirs publics qui laissent faire. Indisposés au plus haut point, les habitants de la cité Boutout et beaucoup d'autres ensembles urbains situés dans la périphérie de ce gigantesque souk à ciel ouvert en savent quelque chose. Les administrations publiques aussi. Tout le paradoxe est justement là car, la densité des commerces en tous genres est telle que la plupart des accès des institutions de l'Etat sont délibérément bloqués par une engeance de vendeurs qui dressent tentes et étals de fortune là où bon leur semble. Nous n'allons pas nous livrer à l'exercice fastidieux d'énumération de toutes les institutions concernées par ce fléau qui prend de plus en plus d'ampleur, mais il convient de souligner que les cas de la DAS, la DJS, le centre médico-pédagogique (CMP), le bâtiment abritant les directions de l'hydraulique, la formation professionnelle, les mines et l'industrie, en passant par l'agence commerciale d'Algérie Télécom, sont aussi scandaleux que révoltants. Des stands érigés devant l'entrée même des administrations et proposant toutes sortes de bibelots et de chinoiseries, des gargotes et des guitounes (tentes )comme dans les souks d'antan servant à tout va pois chiches et brochettes, des plateaux de pizzas maison dont la qualité ne paie pas de mine, des aliments et victuailles entreposés au mieux sur de simples cartons d'emballage, voilà l'autre image hideuse de Mila qui n'arrive pas à se départir d'une ruralité poignante. Une vraie foire d'empoigne Les ramifications des commerces tous azimuts s'étendent sur, pratiquement, toute la partie inférieure de la ville (en allant vers Grarem). Une véritable toile d'araignée, où circuler à pied ou en automobile relève presque de l'impossible tant le squat des trottoirs et chaussées est imposé comme un diktat. Dès les premières heures de la matinée, une indescriptible marée humaine cosmopolite, avec une très forte présence féminine, investit les lieux. C'est à croire que la plupart des maisons se sont vidées de leurs ménagères. Mères de familles venant des localités environnantes, jeunes filles, lycéennes et femmes fonctionnaires ne jurent que par souk trabendo. En somme, un filon d'or où, certes, les opportunités de fringuer ses gosses ou décorer son salon et sa cuisine à moindre coût font florès. L'on y trouve un peu de tout : de l'habillement à bon marché, du prêt-à-porter (Taïwan), des articles de beauté de pacotille, de la tapisserie, de la quincaillerie, des articles de décoration et tout le toutim. Bref, un gigantesque espace de négoce à ciel ouvert, comme on en voit à El Eulma (Dubaï) ou à Tadjenanet (marché hebdomadaire). Sauf qu'au niveau de ces deux immenses pôles commerciaux, les activités sont structurées dans des enceintes et des sites appropriés. A Mila, en revanche, les autorités semblent s'accommoder du phénomène du commerce informel. Un fléau, pourtant aux nuisances multiples (insalubrité, agressions sonores et occupation illégale des espaces publics) sur le bien-être des citoyens et leur droit au repos.