D'une actualité terriblement brûlante, le phénomène des harragas en Algérie reste peu évoqué dans la création livresque. Seulement, en mettant le doigt sur la plaie, Slemnia Ben Daoud auteur d'un intéressant essai intitulé Harragas, ces éternels incompris !, publié par les éditions El Maârif, veut susciter le débat et amener les réflexions pour en trouver les solutions. Partant d'une somme de constats affligeants où des jeunes n'hésitent pas prendre la mer au péril de leur vie, M. Ben Daoud avance quelques interrogations dramatiques et dévorantes à la fois. A sa façon, il tente de sonder les dessous inextricables « d'un grave phénomène de société auquel nous tournons volontairement le dos », relève-t-il dans le liminaire de son livre de 143 pages. Les origines de ce « nouveau mode d'emploi pour la mort » sont liées, selon l'auteur, à une profonde régression des valeurs de la personnalité algérienne depuis l'indépendance et à la mauvaise, voire la non-gouvernance du pays. De ces deux raisons, une foultitude d'épiphénomènes font que la harga est devenue à la mode depuis 2000. En effet, le chômage, la crise du logement, la hogra, le rôle défaillant de l'école et une religion aux prêches douteux viennent globalement et dramatiquement nourrir l'imaginaire du futur harrag. L'auteur a la conviction selon laquelle « l'Algérie manque de projets de société et de perspectives d'insertion et d'avenir pour les jeunes ». Il tire la sonnette d'alarme. « L'heure est grave (...) Les clignotants sont au rouge », prévient-t-il, tout en invitant les autorités concernées à s'intéresser davantage à cette « fuite en avant », qui est aussi bien celle des harragas que des autorités. Enfin et sans pour autant désarmer ou de tomber dans une fatalité sclérosante, M. Ben Douad apporte quelques potions non pas magiques, mais seulement pratiques, afin de retrouver cette confiance perdue entre les citoyens et les gouvernants. Le rétablissement de cette confiance ne saurait se faire sans l'application saine d'un ordre politique et social qui intégrerait les aspirations des jeunes. Autrement dit, consacrer une mode de gouvernance démocratique, loin de toutes facéties où tous les jeunes et sans exclusion aucune, auraient droit au chapitre.