Peu importe le nombre de terroristes qui sont toujours en activité, certains annoncent 400, d'autres 600, leur nuisance reste importante. Si ces derniers mois, le pays connaît une certaine accalmie, un repli visible des actions terroristes, la première moitié de l'année 2008, et l'été dernier ont été particulièrement meurtriers. Outre la multiplication des attentats ciblés, comme celui qui a visé à Jijel le commandant du secteur opérationnel, le colonel Yamani, l'ex-Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC), a fait aussi parler de lui, en organisant plusieurs attaques suicides dont les plus sanglantes étaient celles qui avaient pris pour cible l'école de formation de la gendarmerie dans la ville des Issers, les employés algériens de la société canadienne SNC Lavalin à Bouira et la caserne des gardes-côtes à Zemmouri El Bahri. Les trois attentats avaient fait, à eux seuls, 63 morts. Le bilan est lourd mais il faut, toutefois, admettre que le terrorisme n'est plus ce qu'il était dans les années 1990, sauf qu'il s'est profondément muté pour pouvoir s'adapter aux nouvelles donnes, sécuritaires, imposées par la lutte antiterroriste, et politiques dictées par les attentats du 11 septembre 2001 contre les Etats-Unis. C'est dans cette optique, d'ailleurs, que l'ex-GSPC s'est officiellement inscrit depuis 2006 au réseau international d'Al Qaïda bien qu'il s'en revendiquait bien avant cette date, depuis l'intronisation en 2004 de son nouvel émir national, Abdelmalek Droukdel alias Abou Moussaab Abdelawadoud. En fait, ce n'est pas tant le nombre d'attentats commis qui importe à la branche Al Qaïda au Maghreb (l'organisation terroriste n'a ni les moyens ni les effectifs pour mener une guerre ouverte) mais le coup d'éclat médiatique que lui assure son nouveau mode opératoire, à savoir les attentats kamikazes. En témoigne l'onde de choc provoquée par la double tuerie des Issers et de Bouira, sans oublier celle des attaques suicides du 11 décembre 2007 contre la représentation de l'ONU et le siège du Conseil constitutionnel à Alger. L'ex-GSPC n'a, en effet, pas besoin d'une armée pour manifester avec fracas sa présence. Il lui suffit aussi de quelques attentats ciblés, comme celui qui a causé la mort l'été dernier d'un ingénieur français travaillant pour le compte de l'entreprise Razel à Beni Amrane dans la wilaya de Boumerdès pour faire du bruit. Le bilan de la lutte antiterroriste en 2008 annonce plus de 100 terroristes, dont certains sont des émirs locaux, abattus par les services de sécurité. La baisse des actes terroristes, non pas leur cessation parce que l'on signale ça et là des attaques contre des éléments de l'ANP, les dernières en date ayant eu lieu au début du mois de décembre dans la région de Boumerdès, est-il dû seulement aux résultats obtenus par la lutte contre le terrorisme ? Pas si sûr, soutiennent certains analystes de la situation sécuritaire pour qui, s'il est admis que les pertes subies par la branche Al Qaïda au Maghreb ont grandement déstabilisé les terroristes, il reste possible que l'organisation de Abdelmalek Droukdel observe, comme elle a eu déjà à le faire, une relative trêve pour mieux s'adapter aux nouvelles réalités sécuritaires imposées par une présence renforcée des services de sécurité sur le terrain. Si on peut dire que la lutte contre le terrorisme a réalisé quelques coups spectaculaires tels que l'élimination de 12 terroristes dans une opération menée dans la région de Béni Douala après l'attentat suicide qui avait visé le centre des renseignements généraux au centre-ville de Tizi Ouzou, il serait plutôt inapproprié d'annoncer la fin proche de l'ex-GSPC. Au contraire, des signes inquiétants sont parvenus ces derniers temps des régions que l'on croyait pacifiées et débarrassées définitivement de la présence terroriste. Jijel et Collo, dans la wilaya de Skikda qui n'ont connu, des années durant, aucun acte terroriste, ont été soudainement tirées de leur torpeur par deux attentats sanglants commis, au début du mois dernier, par les factions locales de l'organisation de Abdelmalek Droukdel. Rappelons aussi l'attaque suicide qui avait ciblé à Batna, le président Bouteflika en visite dans la wilaya. Mais le fait le plus inquiétant reste la prolifération des réseaux de soutien au terrorisme, venant remettre en cause l'idée admise ces dernières années et qui laisse penser que le terrorisme est totalement coupé de la société. Les services de sécurité en ont démantelé plusieurs, et pas des moindres, à Constantine, à El Oued, dans la wilaya de Boumerdès et en Kabylie... et même à l'ouest du pays.