Moustapha El Barghouti, né il y a cinquante ans à Jérusalem et demeurant à Ramallah, en Cisjordanie occupée, est le seul parmi les sept candidats qui se présentent face à Mahmoud Abbas - ce dernier superfavori de l'élection présidentielle palestinienne d'aujourd'hui - à prétendre représenter un sérieux candidat à la relève du défunt président Yasser Arafat. Tous les sondages le donnent second. Comment s'est déroulé votre voyage à Ghaza ? Difficile est le moins que l'on puisse dire. Il m'a fallu plus d'une heure et demie avant de réussir à passer au travers du point de passage d'Erez contrôlé par les Israéliens. Deux de mes compagnons ont été refoulés vers Ramallah. Les forces israéliennes ne nous facilitent nullement la tâche. Pendant cette campagne, j'ai été agressé par les soldats israéliens dans la ville d'El Khalil, tout comme j'ai été arrêté à Jérusalem-Est et retenu pendant de longues heures en garde à vue. Pas de campagne sans argent. Qui finance la vôtre ? Les ressources financières que nous utilisons lors de notre campagne sont des dons palestiniens, de l'intérieur et de l'extérieur de la Palestine. Nous n'acceptons aucune aide financière étrangère. C'est d'ailleurs interdit par la loi électorale palestinienne. Bien sûr, nous n'obtenons aucune aide financière de l'Autorité palestinienne. Pensez-vous que cette élection sera propre et impartiale ? Je l'espère, car c'est dans l'intérêt du peuple palestinien. Celui qui nuit à ces élections nuit à la marche démocratique du peuple palestinien. Il faut qu'il y ait un fort contrôle populaire afin que ne se reproduisent pas les fraudes des élections législatives de 1996. Nous sommes inquiets de la décision du Conseil législatif palestinien de mixer les listes électorales avec celles de l'état civil. Cela pourrait entraîner certaines malversations. Considérez-vous que le peuple palestinien est prêt à se lancer dans cette expérience démocratique ? Le problème n'a jamais été le peuple, mais l'Autorité palestinienne. Elle est en place depuis dix ans, mais n'a fourni aucun effort dans le sens de la démocratisation de la société palestinienne. Le Conseil législatif en place n'a pas été renouvelé depuis 1996. Le peuple palestinien est très conscient et très politisé, ce qui en fait un véritable postulant à un régime réellement démocratique. Si vous remportez cette élection, comment assumerez-vous votre charge puisque le Fatah contrôle toutes les institutions palestiniennes ? Nous accomplirons toutes nos missions selon la loi. Le frère Abou Mazen dirige l'olp, et je suis prêt à coopérer avec lui pour le plus grand bien de notre peuple. Deux avis sont meilleurs qu'un. Quels sont vos atouts pour remporter ce scrutin ? Le soutien populaire. Le désir des citoyens de changer les figures en place. Le désir du peuple de voir un commandement jeune, indépendant, qui croit en sa dignité et qui n'est pas prêt à faire des concessions sur ses droits fondamentaux. Mahmoud Abbas prône la démilitarisation de l'Intifadha. Quelle est votre opinion à ce sujet ? D'après moi, il est préférable que le frère Abou Mazen se concentre sur l'union nationale au lieu de déclarations destinées à faire plaisir à certaines parties étrangères. Ces choses-là ne peuvent être résolues que dans un cadre d'union nationale où on pourra mettre en place un système de lutte unifié sur lequel toutes les parties palestiniennes se mettront d'accord. J'ai toujours appelé au renforcement de l'aspect populaire de l'Intifadha. Je suis pour des négociations appuyées par la lutte, et celle-ci peut prendre des formes variables.