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Une académie pour le second collège
Publié dans El Watan le 21 - 06 - 2018

Le gouvernement a tenu parole : «le projet de loi organique relatif à l'Académie de la langue amazighe» a été présenté à l'APN, comme promis au plus tard à la fin du premier semestre. Avant d'exposer quelques remarques substantielles sur son contenu, il est important de signaler d'emblée que son élaboration n'a pas du tout impliqué le corps enseignant des quatre départements de langue amazighe ( Tizi Ouzou ; Bougie ; Bouira et Batna).
Hormis l'association de représentants du CNPLET et du HCA et de personnel de cabinet du Premier ministère et des ministères de l'Education nationale et de la Formation professionnelle, l'élaboration du texte a exclu également toute concertation officielle ou officieuse avec les spécialistes ou toutes autres figures emblématiques engagées dans le combat citoyen pour l'amazighité.
Le texte confirme les prétentions d'un régime autoritaire archaïque à s'approprier le monopole d'une revendication hautement subversive en vue de la figer en patrimoine muséographique à défaut de pouvoir couvrir ses ruines du linceul des morts enterrés.
La filiation batarde du Projet de Loi proposé
Avant-projet de commission et projet de loi définitif adopté par le gouvernement sont formellement inspirés du canevas de la loi morte-née 86/10 du 19 août 1986 portant création de l'académie algérienne de langue arabe. Mais loin s'en faut puisque les dispositions les plus intéressantes n'en sont pas reprises, comme pour nous balancer à la figure une nouvelle fois la même filiation arabe batarde que les thuriféraires de nos prétendues «origines yéménites» collent à l'identité amazighe.
L'avant-projet n'est pas révolutionnaire car déjà très en deçà de cette défunte loi. Les dispositions les plus intéressantes et les plus fertiles de celle-ci, telles que l'élection des membres, la diversité/pluralité de leurs statuts académiques, la prise en compte de la nature transnationale de la langue, sont superbement ignorées, exception faite de la tentative des auteurs de l'avant-projet de réintroduire le mécanisme électif pour le président à l'issue de l'expiration du premier mandat désigné, une incursion stoppée net par le projet présenté à l'APN.
Il demeure que les auteurs de l'avant-projet expurgé inscrivaient celui-ci – de par son titre même – dans la perspective pertinente et plus cohérente politiquement de «la promotion et du développement de la langue amazighe». Un titre auquel le gouvernement a substitué un intitulé strictement administratif et juridique de «PL organique relatif à l'académie algérienne de la langue amazighe».
Une appellation sèche qui rend compte de la création d'une administration ordinaire de l'Etat et qui trahit l'absence de volonté politique et de démarche historique chez les «nouvelles recrues» amazighes lovés dans les salons feutrés d'un régime arabiste-islamiste inamovible depuis les dures réalités du Mouvement national de «libération» de la présence militaire et populaire française.
Le texte proposé à l'APN est même très en deçà d'un projet de décret présidentiel portant «création, missions, organisation et fonctionnement de l'académie algérienne de langue amazighe», élaboré et soumis par le professeur Abderazak Dourari en mai 2008, projet de décret aligné à juste titre sur les dispositions les plus intéressantes de la loi 86/10 précitée. Il est utile pour l'histoire de signaler que ce projet de décret adopté trois fois en Conseil de gouvernement avait été aussi trois fois programmé et trois fois retiré des ordres du jour du Conseil des ministres à la même époque.
J'ai le droit de penser que ce projet abandonné était destiné à l'époque à fluidifier, ou si vous voulez «vaseliner» le passage du déverrouillage constitutionnel de la limitation des mandats présidentiels. Ses inspirateurs l'ont certainement abandonné lorsqu'ils se sont limité à solliciter le seul constituant parlementaire, un endroit où il n'est pas nécessaire de «draguer et duper» les Kabyles et autres amazighophones éveillés.
Logiques de contrôle et seuil de survie
Mais même ainsi, «l'avant-projet de loi organique» produit par ce groupe restreint a subi des retouches ou plutôt des coupes drastiques des mains des politiques du gouvernement, principalement du premier ministre himself. De cinquante articles, il est ramené à trente et un.
Il est toutefois intéressant de noter que les quelques petites incursions utiles et équitables osées par le groupe qui a élaboré cette première mouture, ont été – passez-moi l'expression – balayées «à plate couture». Une double logique de contrôle politico-idéologique et de maintien de tamazight à un strict niveau de survie formellement institutionnel, domine le projet de loi contrairement à la loi défunte d'académie de langue arabe, qui respirait et transpirait la fougue de ses concepteurs arabistes et leur statut de seigneurs et maîtres dans le régime du déni anti-amazigh.
Contrôle juridico- idéologique des constantes nationales
Les rédacteurs de l'avant-projet de loi ont essayé de rétablir un minimum de justice et d'équité en tentant de consacrer la notion de «constante nationale» au profit de la langue amazighe, dans la foulée du préambule et également celle de «composante fondamentale de l'identité nationale» dans l'article 4. La réplique des gardiens du temple de l'arabisme-islamisme a été immédiate. Ces incursions dans la cour des «grands» ont été néantisées.
D'aucuns diront que cette «censure» est tout à fait justifiée au plan juridique pour ne pas tomber en situation d'anticonstitutionnalité avec la Constitution révisée de 2016, qui ne nous avait pas accordé cet «honneur» d'aligner notre langue sur la langue étrangère (arabe classique), qui a usurpé le statut de notre propre langue nationale arabe maghrébine.
Cela ne nous empêchera pas de souligner que cette réplique sèche est venue confirmer et rappeler en blessant l'indigène, que la ségrégation culturelle consacrée, lors de l'officialisation mitigée de notre langue, dans la révision constitutionnelle de 2016 n'est pas une inattention du constituant ni une erreur de rédaction, mais bel et bien un choix de discriminer la langue autochtone sur son propre territoire. Un choix délibéré qui confine à une proclamation officielle d'un colonialisme culturel et linguistique assumé tout à fait froidement !
Le Code de l'indigénat ès langues entend cantonner tamazight dans un second collège promis – ultime et non moindre différence avec celui du colonialisme français – à une disparition physique (phonique devrait-on dire) programmée, l'arabisation historique faisant son œuvre. Pas la peine de rêver ; le constituant de 2016 est toujours le législateur de 2018.
Langue des institutions et langue du non-état
D'entrée de jeu, le prétexte de l'anticonstitutionalité n'a pas de sens chez une gouvernance qui n'a pas un souci particulier du respect de ses propres textes. Mais le législateur algérien s'est toujours montré soucieux de la cohérence formelle de son droit positif, du parallélisme des formes et de l'Etat de droit lorsqu'il s'agit de la langue amazighe ou des droits sociaux et démocratiques de ses ressortissants. C'est ainsi que la tentative de l'avant-projet de loi pour consacrer (art. 2) la langue amazighe comme «la langue nationale et officielle des institutions de l'Etat algérien» s'est vue supprimer cette «insolente» prétention.
Le prétexte du respect du dispositif constitutionnel vole en éclats lorsque l'on apprend que le projet de loi définitif a rejeté l'engagement confié à l'Etat d'œuvrer à «l'intégration progressive de la langue amazighe dans tous les domaines de la vie publique» (art. 6 de l'avant-projet) bien que l'avant-projet alignait cette intégration sur les «résultats des travaux scientifiques de l'académie...». Le censeur a, ce faisant, allégrement confondu «vie publique» et vie institutionnelle, élargissant ainsi le champ de l'injustice des articles 4 et 4 bis de la Constitution qui reconnaissent un Etat pour la langue arabe et «un non-Etat» pour la langue amazighe. Ce qui n'est pas une bid3a majeure, le pays vivant en état d'urgence de jure depuis 1992 et puis de fait depuis 2011.
Contrôle culturel-linguistique académique
Eh oui ! le projet de loi confirme que le gouvernement n'entend pas vraiment promouvoir la langue amazighe mais vise plutôt à s'en emparer de façon monopolistique pour en freiner l'essor. Il est ainsi intéressant de relever en première lecture l'élimination par le projet de loi définitif de deux missions qui confient à la future académie de «participer à la préservation de la langue amazighe et à veiller à l'adapter aux réalités contemporaines» ainsi que de «concourir au rayonnement de la langue en tant qu'outil de création dans les domaines des lettres, des arts et des sciences», des fonctions figurant dans la loi défunte de l'académie de la langue arabe. A eux seuls, ces deux points trahissent la destination muséographique que les tenants du régime de l'apartheid linguistique et culturel réservent à la langue AUTOCHTONE – c'est-à-dire celle des propriétaires en titre de l'Afrique du Nord.
L'autre disposition nodale éliminée dans le projet de loi proposé est la disparition des statuts académiques de membre honoraire (artistes, intellectuels ressources) et de membre correspondant (spécialistes étrangers de la langue), qui feront de la prochaine académie une institution isolée de tout apport des femmes et hommes de culture de notre pays et du monde en général et qui soustrairont son action à toute universalité de l'apport scientifique. La «censure» n'est pas mince s'agissant d'une langue – le tamazight – dont la nature linguistique et le déni politique transnationaux n'ont pas besoin d'être prouvés. L'exigence de la nationalité algérienne est l'autre verrou qui entend nous enfermer dans les clientèles du régime.
L'affaire est entendue, il faut freiner des quatre fers le bourgeonnement fertile d'une langue qui a l'avantage de bénéficier de la passion militante de ses universitaires et autres locuteurs et promoteurs citoyens ! C'est à cette aune qu'il faut comprendre le refus du régime de faire élire les académiciens par le corps enseignant des quatre départements de langue amazighe.
Le contrôle politique en régime de clientélisme
Indéniablement, la disposition la moins pertinente au plan universitaire et la plus injuste et illégitime au plan politique est celle qui confie le choix des membres de l'académie de langue amazighe à un régime politique arabiste-islamiste inchangé qui a durement combattu – depuis la crise antiberbériste du PPA-MTLD – par l'assassinat, la prison, la torture et la tentative permanente d'épuration linguistique et culturelle, une cause censée relever du droit naturel de la personne humaine.
En sens inverse des dispositions de la défunte loi de l'académie de la langue arabe élaborée à l'époque du parti unique et qui prévoyait l'élection des académiciens, le projet proposé pour ceux de la langue amazighe oppose leur désignation par l'autorité politique au point où rien n'interdit désormais à un Atmane Saadi ou un Hadjar ou un Salah de plastronner à la tête d'une institution relevant d'un idéal que nous avons chèrement payé lorsque d'autres «s'occupaient» des deniers publics du pauvre peuple spolié de ses ressources économiques et déraciné de son identité et de sa culture.
Décidément, ceux qui appellent à soustraire la langue amazighe aux manœuvres politiciennes et partisanes pour la restituer au seul champ scientifique et académique doivent déchanter. Le combat politique est loin d'être terminé. Le régime arabiste et islamiste est encore là, décidé à faire de la politique avec et contre la cause amazighe. Nous aussi, nous sommes là et déterminés à mener l'affrontement politique pacifique jusqu'à la disparition inéluctable de ce régime déjà moribond.


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