La promotion de la langue amazighe ne se limite pas seulement à la création de l'Académie. Des juristes, des militants de la cause amazighe et des politiques montent au créneau pour rappeler au pouvoir son engagement concernant la mise en application de l'article 4 de la Constitution. Alors que le gouvernement tente à travers le projet de loi organique relatif à l'Académie algérienne de langue amazighe de faire croire qu'il a déjà respecté la disposition constitutionnelle, toutes ces voix le contredisent. «L'article 4 de la Constitution est clair. Il stipule que l'Etat œuvre à la promotion de tamazight et à son développement dans toutes ses variétés linguistiques en usage sur le territoire national. L'Académie n'est qu'un moyen pour la promotion de la langue», explique Ahmed Betatache, docteur en droit, maître de conférences à l'université de Béjaïa et ancien député. Selon lui, la démarche entreprise par l'Exécutif «n'est qu'une fuite en avant». «La loi organique qui doit être promulguée est celle concernant la promotion de tamazight. C'est ce texte qui doit définir les étapes à suivre en vue de l'application de l'article 4 de la Constitution. La loi organique est supérieure aux lois ordinaires», soutient-t-il. Pour Ahmed Betatache, la limitation de la question à seulement la promulgation d'une loi relative à l'Académie est une entreprise visant à minimiser la question amazighe. Pour rappel, la Constitution révisée en 2016 stipule que «les modalités d'application de l'article 4 sont fixées par une loi organique». De ce fait, explique Brahim Tazaghart, ancien militant du MCB, «la loi organique portant création de l'Académie algérienne de la langue amazighe n'est pas la loi organique portant mise en œuvre de l'article 04 de la Constitution». «Les choses doivent êtres claires afin d'éviter toute confusion ou faux débat. La loi organique portant mise en œuvre de l'article 4 doit définir les fonctions de la langue officielle, les champs d'application, les moyens institutionnels qui seront mis à sa disposition», explique-t-il dans un post publié sur sa page Facebook. Brahim Tazaghart rappelle, lui aussi, que «l'Académie est l'instrument scientifique qui permettra à la langue amazighe d'assumer ses tâches de langue officielle. Elle fait partie d'une politique d'ensemble, mais elle ne peut en tout cas pas la remplacer.» «Une loi exprimant une volonté de l'état» Selon lui, la «loi organique portant mise en œuvre de l'article 4 est politique». «Elle exprime la volonté de l'Etat de faire de la langue un facteur de l'unité nationale et un creuset où le peuple se fond en une nation libre. Cette loi doit, pour être légitime, rattraper les lacunes enregistrées dans la Constitution de 2016, en soulignant essentiellement que tamazight est la langue officielle des institutions de l'Etat et une constante nationale inamovible», souligne-t-il. Ce faisant, le militant de la cause amazighe précise que cette loi organique «qui complète la Constitution actuelle peut préparer la constitution à venir». «Il sera plus raisonnable d'opter dans le prochain texte constitutionnel (...) pour un seul article qui concernera les deux langues officielles que sont la langue arabe et la langue amazighe que de laisser la situation en l'état, maintenant ainsi une inégalité préjudiciable», souligne-t-il. Intervenant lors des débats, mercredi dernier à l'APN, autour du projet de loi relatif à cette Académie, le député du RCD, Yacine Aïssiouen, appelle le gouvernement à ne pas «fuir ses responsabilités en se cachant derrière ce projet». «C'est le Premier ministre qui doit venir présenter un projet de loi organique comme le stipule la Constitution», lance-t-il.