Le mouvement Mouwatana (citoyenneté et démocratie) veut invalider les lois interdisant les marches et les manifestations pacifiques. Initiée il y a quelques jours par des chefs de parti, des militants politiques, des avocats et des intellectuels, cette organisation lance sa première action. Ses membres décident de saisir, via l'Assemblée populaire nationale (APN), le Conseil constitutionnel pour lui demander d'invalider deux textes encore en vigueur qui sont en contradiction avec la Loi fondamentale du pays, amendée en 2016. Il s'agit, selon la porte-parole du mouvement, Zoubida Assoul, de la loi 89/28 du 31 janvier 1989 amendée en 1991 concernant les réunions et les manifestations publiques, ainsi que le décret du 18 juin 2001 interdisant les marches et les rassemblements pacifiques à Alger. «Nous avons lancé la procédure», affirme Mme Assoul, intervenant lors d'une conférence de presse animée, hier à Alger, en compagnie des avocats Salah Dabouz et Abdelghani Badi, pour expliquer la démarche. Selon elle, le mouvement a élaboré une requête de saisine du Conseil constitutionnel transmise aux groupes parlementaires de l'opposition qui disposent, comme le stipule la Constitution, de cette prérogative. «Nous ne pouvons pas le faire en tant que mouvement. Nos partis ne siègent pas à l'Assemblée et la Constitution ne permet pas aux citoyens de saisir le Conseil constitutionnel», indique-t-elle. Pour faire aboutir cette action, les membres du mouvement sollicitent les députés des partis d'opposition siégeant à l'APN. «Nous avons adressé des lettres aux groupes parlementaires RCD, FFS, MSP, El Adala, PT et à des indépendants. Dans cette lettre, accompagnée de la requête, nous leur avons demandé d'utiliser leurs prérogatives constitutionnelles pour demander l'invalidation de ces lois qui sont anticonstitutionnelles», affirme Me Dabouz. Elaboration d'une charte des valeurs Rappelant le contenu de l'article 49 de la Constitution garantissant la liberté de manifester pacifiquement, Zoubida Assoul affirme que «la loi 89/28 est caduque» alors que «le décret de 2001 est fantomatique». «Ce texte n'a jamais été publié au Journal officiel. Son application est donc illégale. Le pouvoir ne voulait le publier de peur de la réaction des ONG internationales et des organisations onusienne», dit-elle. En lançant cette initiative, le mouvement compte sur les députés de l'opposition qui peuvent réunir les 50 signatures requises pour effectuer cette saisine de l'institution présidée par Mourad Medelci. «Il s'agit là d'une étape pour opposer au pouvoir ses propres lois», souligne Me Badi. Dans leur requête, les membres du mouvement demandent aux membres du Conseil constitutionnel de «prendre leurs responsabilités» et de statuer en toute indépendance sur la légalité de ces deux textes. Mais l'aboutissement de cette démarche dépend de l'engagement des députés de l'opposition. «Tous les partis dénoncent l'interdiction des manifestations publiques. La Constitution leur donne la possibilité d'invalider les textes anticonstitutionnels», expliquent les membres du mouvement Mouwatana. Outre la saisine du Conseil constitutionnel, le mouvement, annonce Zoubida Assoul, compte élaborer une charte de valeurs à laquelle doivent se référer tous les membres de cette initiative pour le changement. «Nous allons également lancer une plateforme électronique pour permettre à tous les citoyens de rejoindre l'initiative. Le comité de coordination du mouvement préparera aussi la conférence nationale de la citoyenneté qui aura lieu à la rentrée sociale», conclut-elle.